Statut du fermage : une réforme sur la table
Après de nombreuses années de négociation, et parfois d’enlisement, les discussions entre les sections des fermiers (SNFM) et des propriétaires (SNPR) de la FNSEA ont abouti à un projet de réforme du statut du fermage.
Après de nombreuses années de négociation, et parfois d’enlisement, les discussions entre les sections des fermiers (SNFM) et des propriétaires (SNPR) de la FNSEA ont abouti à un projet de réforme du statut du fermage.
Mis en place au sortir de la Seconde Guerre mondiale pour conforter la productivité de la Ferme France, le statut du fermage fixe les grandes règles visant à pérenniser et sécuriser les exploitants fermiers dans leurs investissements.
Soyons clairs. Une seule grande règle est amendée dans le projet de réforme sur lequel se sont entendues au printemps les sections des fermiers (SNFM) et des propriétaires (SNPR) de la FNSEA. Toutefois, l’accord est à leurs yeux «historique», et ils demandent désormais au ministère de l’Agriculture d’inscrire ce sujet à l’agenda parlementaire, en vue d’une loi foncière que de nombreux observateurs attendent pour le prochain quinquennat.
Cession du bail, nouveau bail
La principale réforme proposée porte sur le moment où le fermier cède son exploitation. Comme au moment du renouvellement d’un bail (tous les neuf ans), le propriétaire peut reprendre l’exploitation du bien, ou laisser le fermier céder tel quel son bail à l’un de ses descendants.
L’accord SNFM-SNPR propose que dans le cas où le propriétaire ne reprendrait pas les terres, il soit proposé un nouveau bail au repreneur. Actuellement, les descendants de fermiers reprennent le plus souvent des baux déjà engagés, avec des échéances parfois très courtes.
Cette pratique «peut entraîner des difficultés pour le repreneur, notamment s’il ne dispose pas du bien sur une durée suffisante pour amortir ses frais d’installation et les investissements qu’il envisage de réaliser», souligne le texte commun. L’idée est donc de leur donner de la visibilité.
Nouvelle règle pour les «hors-cadre»
Un autre changement au moment de la cession de l’exploitation du fermier vise cette fois à faciliter la cession à des jeunes hors cadre familial (HCF). Actuellement, aucune obligation n’est faite au propriétaire d’accepter le dossier d’un hors cadre, et un fermier ne peut céder son bail qu’à ses descendants. L’accord propose que si un fermier présente un jeune hors cadre pour la reprise d’un bail, le propriétaire doive lui accorder une promesse de bail. Sauf si lui-même est en mesure de proposer un autre jeune hors cadre.
Extension du droit de préemption
Le deuxième objet de l’accord SNFM/SNPR porte sur le droit de préemption du fermier lorsque son propriétaire veut vendre la terre. Le syndicalisme souhaite étendre la possibilité offerte aux fermiers de subroger ce droit de préemption, c’est-à-dire d’en faire bénéficier à un tiers. Actuellement, seuls les descendants ou le conjoint du fermier peuvent en bénéficier.
La SNFM et la SNPR proposent que le droit de préemption du fermier puisse être exercé également par «toute personne physique ou GFA», à condition qu’ils signent un bail à long terme, et qu’ils s’engagent à ne pas exploiter les terres pendant toute la durée de ce bail. L’intérêt de cette disposition est de «permettre au preneur qui n’a pas pu acheter la terre de conserver l’exploitation du bien.»
Inciter davantage à l’état des lieux
Troisième objet de l’accord : l’état des lieux qui doit normalement être établi avant la signature d’un bail. La SNPR et la SNFM constatent que malgré l’obligation faite par la loi (L.411-4 CRPM) d’établir cet état des lieux, la réalité du terrain est toute autre, car le défaut d’établissement de ce document est sans influence sur la validité du contrat.
Trop souvent les rapports bailleurs-preneurs finissent en contentieux. Pour inciter davantage, la SNFM et la SNPR proposent de supprimer le bénéfice de l’indemnité de sortie pour les baux effectués sans état de lieux.
Parcelle de subsistance et propriété
La quatrième évolution a trait au droit des fermiers de conserver une parcelle de subsistance au moment de leur départ à la retraite. Un propriétaire ne peut congédier, sans son aval, un fermier ayant atteint l’âge de la retraite si cela conduit à ce qu’il ne puisse plus mettre en valeur une parcelle d’une surface inférieure à 2/5e de la surface minimale d’assujettissement (SMA).
Problème, explique-t-on à la SNPR : dans les zones à forte tension foncière, les parcelles de subsistance peuvent faire l’objet de contentieux lorsque le fermier par ailleurs lui-même propriétaire, insiste pour faire en sorte que les terres louées soient considérées comme sa parcelle de subsistance. SNPR et SNFM souhaitent qu’au regard des juges, cette parcelle, de moins en moins utilisée, soit «obligatoirement prise en priorité sur les terres détenues en propriété» par le retraité. Sauf «cas exceptionnels», comme une parcelle «très éloignée du preneur sortant».
Indemnisation des travaux assouplie
Le cinquième point d’accord porte sur l’indemnisation des travaux du fermier, que le syndicalisme majoritaire souhaite assouplir. Aujourd’hui, le statut du fermage renvoie à des règles d’indemnisation des travaux automatiquement fixées par la loi. Parmi ces travaux : suppression des haies, talus et arbres, retournement de parcelles en herbe, mise en œuvre de moyens culturaux non prévus au bail, travaux d’amélioration de la maison d’habitation... Le syndicalisme majoritaire propose que les deux parties puissent «permettre la rédaction d’un accord amiable préalable [...] qui fixera les modalités de l’autorisation de faire et de leur indemnisation».
Attendre avant d’attaquer
Enfin, les deux sections proposent d’allonger le délai minimal avant qu’un fermier puisse contester un fermage trop élevé. Selon elles, il arrive que le fermier accepte, voire demande un niveau de fermage élevé pour emporter le bail face à un fermier concurrent, et qu’il attaque le fermier pour fermage anormal. Il s’agirait d’introduire l’action au cours de la sixième année et non plus au cours de la troisième année.