Une agricultrice signe une tribune adressée à Yann Arthus Bertrand
Sur le site lagri.fr, Claire juillet, agricultrice en Saône et Loire, adresse un message “nécessaire” au photographe. Elle estime que le discours à charge contre une certaine agriculture est devenu inacceptable.
Sur le site lagri.fr, Claire juillet, agricultrice en Saône et Loire, adresse un message “nécessaire” au photographe. Elle estime que le discours à charge contre une certaine agriculture est devenu inacceptable.
Le déclic aura été la diffusion du film Legacy sur M6 mardi 26 janvier. Claire juillet, agricultrice en Saône et Loire (élevage bovins allaitants, porcs plein air, maraîchage, agriculture biologique), n'a pas d'animosité particulière envers son auteur, Yann Arthus Bertrand. Elle précise même qu'elle conserve précieusement dans sa bibliothèque "votre magnifique livre Bestiaux, acquis dès sa parution et que je feuillette régulièrement avec le plus grand plaisir, tant les portraits qu’il contient montrent toute l’humanité des éleveurs et le lien particulier qui les unit à “leurs bêtes”."
Seulement voilà, à la bande annonce du film, Claire juillet a été "prise de colère, puis d’indignation". Elle signe donc une tribune sur lagri.fr pour faire part de son sentiment. "Depuis quand vous sentez-vous pousser des ailes de procureur ? Qui vous permet, apôtre de la décroissance sur le tard, familier des milliardaires, utilisateur compulsif des moyens de locomotion les plus polluants, de donner des leçons au reste de l’humanité ?", s'insurge-t-elle. Et d'ajouter que "votre commentaire en voix off dans ce petit teaser est un ramassis d’approximations qui viendra, une fois de plus, alimenter l’infime minorité agissante de ceux qui veulent la peau des agriculteurs en général et celle des éleveurs en particulier."
D'après l'éleveuse, les images terrifiantes des concentrations de bovins n'ont sûrement pas été filmées en France, mais le film ne le dit pas. "Vous laissez croire que tous les bovins seraient soumis à un régime d’injections chimiques de toutes sortes. Ignorez-vous que c’est interdit chez nous ?" Elle avance également des chiffres précis pour argumenter ces propos. "Vous semblez trouver scandaleux que la consommation mondiale de viande ait été multipliée par 3 en 40 ans. Avez-vous bien réalisé que, dans le même temps, la population mondiale a doublé et qu’elle se répartit comme suit : 59,5 % en Asie et 17,2 % en Afrique, loin devant l’Europe qui représente moins de 10 % ?"
Autre exemple : "Vous prétendez qu’un hectare cultivé peut nourrir deux carnivores ! De quels carnivores parlez-vous ? Je crois comprendre que vous faites allusion à l’être humain dans une pirouette sémantique destinée à flatter vos amis animalistes. Car vous ne pouvez pas ignorer que, d’une part, Homo Sapiens est omnivore (sinon il ne pourrait pas choisir de devenir végétarien) et, d’autre part, qu’on ne verra pas de si tôt vos chers lions brouter la savane. Au passage, vos deux carnivores ont un solide appétit car un hectare, c’est à peu près ce qu’il faut sous nos climats pour élever un bovin. Dans mon entourage, je ne connais personne d’assez affamé pour avaler la moitié d’un bœuf (soit 200 kg) par an."
Pour l'agricultrice, enfin, les images de Yann Arthus Bertrand sont plus éloquentes que lui-même. "Vous feriez bien de vous en contenter ou d’employer vos talents et votre influence à mettre un terme à la dérégulation sauvage des échanges commerciaux qui est la véritable responsable du saccage de notre belle planète", conclut-elle.
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