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Vers de nouvelles relations entre éleveurs laitiers et transformateurs

Gérard You de l’Institut de l’élevage est intervenu sur le devenir du secteur lait lors de l’assemblée d’Avenir Conseil Élevage à Cambrai.

Avec la fin des quotas, on observe l’émergence de deux logiques de collecte : l’encadrement des livraisons pour les sociétés privées et l’accompagnement de l’offre laitière pour les coopératives, a expliqué Gérard You.
Avec la fin des quotas, on observe l’émergence de deux logiques de collecte : l’encadrement des livraisons pour les sociétés privées et l’accompagnement de l’offre laitière pour les coopératives, a expliqué Gérard You.
© AAP

L’année 2015 va marquer la fin des quotas dans le secteur laitier. Ce changement majeur entraîne déjà un transfert progressif du pilotage de l’offre de l’autorité publique aux transformateurs. C’est ce que constate Gérard You, chef du service Économie des filières à l’Institut de l’élevage. Il est intervenu lors de l’assemblée générale d’Avenir Conseil Élevage, le 22 février à Cambrai.
Avec la suppression des quotas émerge une économie contractuelle qui vient se substituer à l’économie administrée. «On observe aussi le développement de coordinations verticales entre livreurs et transformateurs», précise Gérard You. La question des contrats est au cœur du paquet lait, qui a officialisé le droit pour les éleveurs de s’organiser et de négocier des contrats et reconnaît les interprofessions. Même si elles ont un pouvoir limité : la fixation des prix et le contrôle des volumes interdits restent interdits. Le paquet lait prévoit une régulation de l’offre collective limitée aux seuls fromages AOP/IGP et le maintien d’outils de gestion publics des marchés en cas de crise grave.

Fournisseur ou coopérateur
En France, après le lancement de la contractualisation en 2011, la loi autorise finalement les éleveurs à s’organiser en organisations de producteurs selon une logique verticale (entreprise) ou horizontale (territoire) en 2012. Cette nouvelle organisation a des conséquences sur les relations entre livreurs et collecteurs : «On tend vers un statut de fournisseurs avec des transformateurs privés, et vers un rétablissement du statut de coopérateur dans les coopératives», note Gérard You.
Dans ce contexte, on observe l’émergence de deux logiques de la collecte laitière : l’encadrement des livraisons dans le cadre des sociétés privées et l’accompagnement de l’offre laitière pour les coopératives.

Créer de la valeur ajoutée…
Concernant les sociétés privées, certaines optent pour un encadrement modéré des livraisons. «Ces industries appliquent en fait dans les contrats ce qui se vivait avec les quotas», estime Gérard You. C’est surtout le cas pour les transformateurs plutôt diversifiés, dans un bassin de collecte assez vaste, d’envergure nationale à européenne. Dans ce cas, l’objectif est de créer de la valeur ajoutée via des marques et de privilégier les produits de grande consommation (PGC). Ces entreprises ont une bonne aptitude à gérer la saisonnalité de la collecte. Elles proposent un encadrement annuel à leurs livreurs, avec des pénalités ou même un arrêt de collecte en cas de dépassement. L’ajustement se fait en fonction des débouchés et du potentiel laitier du livreur. Elles préfèrent les relations directes avec les livreurs et l’OP est plutôt vue comme un interlocuteur subi.

… ou réduire la saisonnalité
Dans le cas d’un encadrement serré des livraisons, les transformateurs sont plus spécialisés et le bassin de collecte est moins vaste, plus régional. Ici, l’objectif est de réduire la saisonnalité jugée trop prononcée. Le volume contractuel est mensuel ou trimestriel et là aussi il a des pénalités en cas de non respect, voire un arrêt de collecte. Mais elles reconnaissent plus volontiers l’OP comme interlocuteur privilégié.

Différentes options pour les coops
De leurs côtés, les coopératives sont dans une logique d’accompagnement de l’offre. Le coopérateur à une obligation d’apport total, tandis que la coopérative à une obligation de collecter tout le lait. Elles ont souvent la volonté d’accompagner la croissance des éleveurs/coopérateurs, sans pénaliser ceux qui ne veulent pas croître. Différentes options après 2015 se dessinent, selon la localisation et les fabrications :
- le maintien d’un prix unique pour tous les volumes mensuels ;
- la différenciation volume/prix selon les valorisations (PGC, produits industriels), sur la base de références annuelles ;
- la différenciation volume/prix selon une ventilation mensuelle du volume.

Trois leviers
D’une manière générale, les transformateurs disposent de trois leviers pour agir sur l’offre : le maintien d’une référence annuelle plus ou moins contraignante, l’encadrement plus ou moins strict de la saisonnalité, la gestion des références libérées par les cessations laitières. Les évolutions individuelles sont contrastées, selon que les éleveurs sont livreurs seuls, adhérents d’OP ou coopérateurs. L’évolution des volumes, quant à elle, est variable selon le transformateur et le bassin et l’évolution du prix sera fonction de la valorisation des produits et de la situation générale des marchés des ingrédients laitiers.

ZOOM

Les perspectives de marché pour le secteur lait

«Le lait est un marché prometteur en raison de la forte croissance de la population mondiale», explique Gérard You, de l’Institut de l’élevage. Par ailleurs, la hausse du pouvoir d’achat dans les pays en voie de développement (PED) entraîne en parallèle une augmentation de la consommation de lait. À l’horizon 2020, la FAO et l’Ocde prévoient un besoin supplémentaire en lait de 170 millions de tonnes (Mt). 70 % de l’augmentation de la consommation va concerner les PED et 30 % les pays de l’Ocde. La croissance en Europe va être de l’ordre de 5 %, mais de 20 à 25 % en Asie et en Afrique. La production de lait qui atteint aujourd’hui les 730 Mt, devrait atteindre 900 Mt en 2020. En parallèle, les échanges vont, eux aussi, continuer à se développer au même rythme que la croissance de la production «La production de lait des pays émergents ne suffira pas à satisfaire cette demande croissante, c’est un marché potentiel pour les producteurs français et européens», estime Gérard You.

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