Video L214 à Framicourt : les élevages de poules en cage visés
Pour la troisième fois, l’association de lutte contre l'exploitation animale L214 épingle Matines, leader français du marché des œufs. Il s’agit d’un poulailler de Framicourt, à l’est de la Somme, qui serait un exemple pour dénoncer l’ensemble des élevages de poules en cage.
C’était la première des trois vidéos rendues publiques cette semaine. On y voit des corps déplumés, des plaies à vif, des animaux agonisants, des cadavres… Avec ces images tournées à Framicourt, lieu-dit de Fontaine-sous-Montdidier, mises en ligne lundi matin, l’association de lutte contre l’exploitation animale L214 veut témoigner des mauvaises conditions dans lesquelles vivent les poules pondeuses élevées en batterie.
Jean-Lou Sterin, l’éleveur, est l’un des 370 fournisseurs de la marque française Matines, leader des œufs coquille avec 3 milliards d’œufs produits chaque année. Lui a appris l’existence de cette vidéo par les médias, qui l’ont contacté vendredi 11 mai matin, pour le faire réagir à propos d’images dont il ignorait l’existence. En effet, ces images auraient été tournées début avril, «à l’insu de l’éleveur», explique Sébastien Arsac, cofondateur de L214. «J’ai été envahi par un sentiment de frustration, car on s’attaque directement à ma façon de travailler, et de violation, car on est entré chez moi en pleine nuit, sans que je ne m’en rende compte», confie-t-il. Une plainte a d’ailleurs été déposée pour violation de domicile.
Dans ce bâtiment de 61 900 poules, aucun manquement aux normes sanitaires et d’élevage n’a été détecté. Cinq audits ont été réalisés depuis les deux ans et demi de gérance de Jean-Lou Sterin, et les conclusions ont été positives : l’élevage respecte les normes de bien-être animal. La DDPP (Direction départementale de la protection des populations) est venue réaliser un nouveau contrôle suite à ces vidéos, et, là-encore, aucun problème.
Qu’en est-il alors des deux poules mortes au sol et des autres déplumées qui apparaissent dans la vidéo ? «Je ne reconnais pas ces pratiques chez moi. Un intérimaire de l’époque en a peut-être oublié une, mais ce n’est pas dans nos pratiques habituelles. Les images ont été tournées pendant que nous vidions le bâtiment. Il restait 12 000 poules. Ce n’est pas la période la plus propice.»
Jean-Lou Sterin en est bien conscient, plus que son propre élevage, L214 veut en réalité dénoncer l’élevage de poules en cage en général. Matines est épinglée ici pour la troisième fois par l’association : en mai 2016, dans un Gaec de l’Ain, et en décembre 2017, chez un exploitant des Côtes-d’Armor. «Les attentes sociétales ont changé, on en est conscient est on y répondra. Nos élevages vont évoluer progressivement, mais il nous faut du temps et des moyens pour mettre cela en place», relate l’éleveur.
Le contexte : projet de loi sur l’alimentation
En France, 69 % des poules pondeuses vivent encore en cage. Et L214 compte bien accélérer les choses pour faire évoluer la situation : ce jeudi 17, l’association diffusait des images provenant d’un élevage situé en Normandie. Dimanche 20, une troisième vidéo tournée en Bretagne sera présentée. Cette mobilisation répond à un timing précis. «La semaine prochaine, dans le cadre de l’examen du projet de loi sur l’alimentation, les députés seront appelés à voter pour ou contre l’interdiction des élevages de poules en cage, explique Brigitte Gothière, cofondatrice de L214. Cette filière est très en retard par rapport à la demande sociétale, puisque 90 % des Français se déclarent opposés à cette forme d’élevage.»