Coopération
Un résultat «honorable» pour Sana Terra malgré une campagne «exécrable»
Dans un contexte marqué par une forte volatilité, Sana Terra engage ses adhérents à opter pour le prix moyen de campagne, à la vente comme à l’achat, sans envisager de freiner ses investissements.
Dans un contexte marqué par une forte volatilité, Sana Terra engage ses adhérents à opter pour le prix moyen de campagne, à la vente comme à l’achat, sans envisager de freiner ses investissements.
À n’en pas douter, la campagne 2021-2022, dont le rapport a été présenté le 7 décembre dernier lors de l’assemblée générale de la coopérative Sana Terra, s’inscrira dans la liste de celles à «oublier», même si l’entreprise s’en sort «assez bien». Étalement dans la durée, hétérogénéité des qualités et des quantités ont en effet demandé pas mal de souplesse aux équipes d’une coopérative qui s’est adaptée, notamment par l’allotement et le travail du grain dans ses installations. La conséquence de cette adaptation, c’est une augmentation significative des coûts d’exploitation, comme l’a souligné le président de Sana Terra, Pierre Delignières. «Malgré tout, a-t-il déclaré devant les adhérents de la coopérative, nos récoltes ont été valorisées à des niveaux dont nous avons tout lieu d’être satisfaits et fiers.»
Récolte 2021 «décevante»
Sur l’exercice 2020-2021, le chiffre d’affaires de la coopérative est en progression de 30 % par rapport à l’exercice précédent. Son résultat net au 30 juin 2022 s’élève à 646 632 € – dont 612 657 € à répartir –, avec une rémunération des intérêts aux parts de 2,23 % et des ristournes aux adhérents (1 % du CA) pour la partie «approvisionnements», et l’affectation d’une partie de ce résultat aux réserves. Ce que l’on peut retenir par ailleurs, c’est que la collecte de céréales (185 000 t) continue de faire la part belle au blé (153 134 t) devant les orges (16 422 t), le colza (7 536 t), le maïs (6 618 t) et d’autres céréales ou protéagineux. En pommes de terre, les surfaces ont été en baisse (- 4 %), entraînant de fait une diminution des volumes commercialisés. Dans les autres activités, les performances sont au rendez-vous. En parallèle à l’activité «collecte», il a été constaté également une augmentation pour le moins spectaculaire de l’activité «approvisionnements» (+ 40 %) avec un chiffre d’affaires global de 33,4 millions d’euros. Pour expliquer ces chiffres, la direction de la coopérative y voit les premiers effets de la guerre en Ukraine et les sanctions visant la Russie et la Biélorussie, mais aussi une pression maladies «forte», que ce soit sur les pommes de terre (mildiou) ou les céréales (rouille jaune). En ce qui concerne la production de semences (3,2 millions de CA ; 35 000 quintaux), l’activité est en recul en 2021. La raison ? Une récolte 2021 «décevante», avec des rendements «en retrait», des taux de déchets importants, des PMG en retrait et des volumes moindres à proposer au circuit long. Qu’à cela ne tienne, l’ambition de Sana Terra en la matière reste toutefois de «maintenir une station de semences productive et réactive», et de poursuivre sa modernisation.
Plaidoyer pour le prix de campagne
Sur le plan économique, dans un contexte marqué par de fortes variations et la volatilité, le prix de campagne reste un outil pertinent, selon le président de Sana Terra. Grâce au prix de campagne, la tonne de blé a été payée en moyenne à 236 €/t, toutes qualités confondues quand le prix moyen de la ferme Somme est de 220 €/t. «Il faut souligner la pertinence du prix de campagne, a défendu M. Delignières. Celui-ci est supérieur à la moyenne des blés vendus en prix ferme pour la récolte 2021. C’était déjà le cas pour la récolte 2020, et ce sera probablement le cas pour 2022.» En 2021-2022, le prix de campagne concernait 52 % du tonnage collecté par Sana Terra. Le prix des autres céréales et protéagineux varie, quant à lui, entre 200 €/t (avoine) et 650 €/t (colza durable), compléments de prix compris. Le dispositif du prix moyen de campagne est à ce point pertinent que la coopératif l’utilise désormais également pour son activité «approvisionnements» en proposant à ses adhérents de s’engager dans des commandes d’engrais en prix moyen. L’objectif ? Faire face autant que possible aux hausses de prix «spectaculaires» rencontrées en 2022. Pour Pierre Delignières, il s’agit en effet de «bloquer les tonnages et ainsi sécuriser l’approvisionnement des volumes nécessaires à nos exploitations», mais aussi «lisser les prix».
Après une campagne 2021-2022 qualifiée «d’exécrable» par Jean-François Florin, le directeur de Sana Terra estime que la prochaine campagne (2022-2023) devrait être plus favorable ; ce qui devrait amener la coopérative à poursuivre ses investissements, son adaptation à l’évolution des charges et de l’évolution de l’utilisation des produits phytosanitaires, sans oublier de «préserver la sécurité financière de la coopérative», ont expliqué ses dirigeants. La première raison de cet optimisme, c’est bien entendu le déroulé de la collecte de l’été 2022 : «Nous avons fait une très belle collecte de céréales en quantité, comme en qualité, constate M. Florin. À peu de choses près, ce pourrait être la meilleure depuis longtemps…» Si seulement les céréales pouvaient être un peu plus riches en protéines.