Environnement
Zones de non-traitement : retour à la case départ ?
Considérant que la consultation du public n’a pas été suffisante sur les chartes de riverains qui permettent sous conditions de réduire les distances de sécurité pour l’utilisation de certains produits phytosanitaires, le Conseil constitutionnel les remet en cause. Quant aux
conséquences de cette décision, elles sont encore floues.
Considérant que la consultation du public n’a pas été suffisante sur les chartes de riverains qui permettent sous conditions de réduire les distances de sécurité pour l’utilisation de certains produits phytosanitaires, le Conseil constitutionnel les remet en cause. Quant aux
conséquences de cette décision, elles sont encore floues.
Douche froide. Alors que les agriculteurs s’étaient jusqu’à présent plus ou moins fait à l’idée de devoir sanctuariser une partie de leurs parcelles lorsque celles-ci jouxtent des zones urbanisées et qu’ils s’interrogent encore sur la manière de les valoriser autrement, le Conseil constitutionnel est venu mettre à plat plusieurs mois de travail sur les chartes de riverains. Ces chartes, faut-il le rappeler, avaient pour objectif d’encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires dans certains territoires et de réduire sous conditions les zones de non-traitement encore appelées zones de sécurité. Autrement dit, elles visent à favoriser le dialogue entre les habitants, les élus locaux et les agriculteurs et à répondre aux enjeux de santé publique.
Saisi par un collectif d’ONG, dont Génération futures et France nature environnement (FNE), le Conseil constitutionnel a toutefois considéré, le 19 mars dernier, que les «modalités d’élaboration des chartes départementales sur les ZNT méconnaissent les exigences constitutionnelles». En déclarant «inconstitutionnelle» une partie de l’article de la loi Égalim qui précisait les modalités de concertation pour ces chartes, c’est donc la validité de l’ensemble des chartes actuellement approuvées par les Préfets qui est remise en cause.
Dans le département de la Somme, la concertation pour établir une charte de riverains s’était organisée entre la Chambre départementale d’agriculture, la FDSEA, les Jeunes agriculteurs, le Conseil départemental, l’Association des maires de la Somme 80 et l’association Familles rurales. L’État, par le biais de la préfecture, avait été associé à ce travail collaboratif avant de lui apporter son soutien. Le 26 novembre 2019, une vingtaine de partenaires signaient la «charte de bon voisinage dans l’espace rural» s’inscrivant, dixit ces organisations, «dans une démarche collaborative et volontaire».
Pour la FNSEA, qui souligne sa volonté de «prôner le dialogue» et qui expliquait encore, le 19 mars dernier, «avoir conduit une consultation du public de qualité dans chacun des départements», la décision du Conseil constitutionnel est «incompréhensible». Toujours du côté du syndicat majoritaire, on expliquait en début de semaine étudier les «conséquences précises de cette décision sur les conditions d’utilisation des produits phytopharmaceutiques».
Du côté des associations ayant porté l’affaire devant le Conseil constitutionnel, la nouvelle de l’invalidation des chartes a, en revanche, été accueillie comme «une victoire». Et ces dernières d’appeler «les juges administratifs et le législateur à en tirer les conséquences».
La position ambiguë du ministère
Le ministère de l’Agriculture a indiqué, pour sa part, en ce début de semaine, «prendre acte» de la décision, et être en train d’examiner «ses conséquences en droit et les suites à y donner». Quant à la suite de ses explications, elles apparaissent pour le moins surprenantes. En effet, selon la Rue de Varenne, cette décision ne remet en cause «l’existence (des chartes) par principe».
Pour le ministère, les mesures d’adaptation des distances minimales de sécurité, telles que «déterminées conformément aux recommandations de l’Anses (...) conservent d’un point de vue pratique leur efficacité en dépit de l’invalidation des chartes et leur mise en œuvre doit pouvoir continuer de permettre l’adaptation des distances minimales de sécurité».
En attendant des précisions nécessaires, et face à ces divergences d’interprétation, il revient aux agriculteurs de faire preuve de prudence et de retenue.