10 à 30 % des élevages porcins en cession d’activité ?
La situation n’a jamais été aussi catastrophique pour les éleveurs porcins. Son interprofession l'Inaporc avance même que 10 % des 10 000 élevages français se dirigeraient vers une cessation d’activité. Et ce ne serait que le sommet de l’iceberg.
La situation n’a jamais été aussi catastrophique pour les éleveurs porcins. Son interprofession l'Inaporc avance même que 10 % des 10 000 élevages français se dirigeraient vers une cessation d’activité. Et ce ne serait que le sommet de l’iceberg.
«Les 10 000 élevages de porcs que compte la France sont dans une situation dramatique. 10 % d’entre eux se dirigent aujourd’hui vers une cessation d’activité dans les prochains mois et cette proportion pourrait grimper à 30 % selon certaines estimations», s’alarme l’Inaporc. En cause, la hausse des coûts de production que les éleveurs peinent à répercuter en bout de chaîne, auprès du consommateur. «Les éleveurs n’ont pas atteint leur seuil de rentabilité une seule fois sur les douze derniers mois : une situation historique», dénonce Inaporc.
Le plan d’urgence pour la filière porcine, annoncé au début de l’année par Julien Denormandie, alors ministre de l’Agriculture, n’a pas suffi à redresser la situation. «Ce soutien exceptionnel visait à compenser une partie des pertes subies au premier semestre de 2022, misant sur une reprise des cours dès ce printemps alors qu’aujourd’hui la situation ne cesse de s’assombrir», analyse l’interprofession.
Est-il trop tard pour sauver ces éleveurs ? Pour l’Inaporc, «seule une revalorisation rapide des prix payés aux éleveurs pourra limiter les conséquences dramatiques de [l']effet ciseaux sur la filière porcine française». Le prix de l’aliment pour porcs a augmenté de «25 % en un an», une flambée exacerbée par la guerre en Ukraine. Quant au prix payé aux producteurs, il stagne en moyenne autour de 1,85 €/kg, soit environ 0,15 € en dessous du coût de production, puisque celui-ci «devrait franchir la barre des 2 €/kg». Malgré l’aide d’urgence débloquée par le gouvernement, «la conjoncture continue de se dégrader.»
La grande distribution dans le viseur
Pour la FNP (producteurs de porcs, FNSEA), la solution viendrait de la grande distribution. «Il n’y a pas d’autre choix que l’aval et les GMS paient les hausses de prix», a lancé François Valy, son président, lors de l’assemblée générale du syndicat le 10 juin à Bourg-en-Bresse (Ain). Le contexte de flambée historique de l’alimentation animale, exacerbée par la guerre en Ukraine, rend ces revalorisations «légitimes et nécessaires» aux yeux de M. Valy.
Rappelant que le rayon charcuterie est l’un des plus rentables des grandes surfaces, l’éleveur morbihannais estime qu’elles sont en capacité d’«accorder les hausses nécessaires sans même modifier le prix au consommateur».
Un message appuyé par la présidente de la FNSEA Christiane Lambert : «pour l’instant, c’est la distribution qui nous fait souffrir». Selon M. Valy, «il devrait être supérieur à 2 €/kg pour rémunérer le capital et le travail». Actuellement, «les éleveurs perdent jusqu’à 40 € par porc», note Carole Joliff, secrétaire générale de la FNP. «On nous annonce encore 80 à 100 €/t de plus à venir sur l’aliment complet», a-t-elle ajouté, car la hausse des prix des céréales et oléoprotéagineux n’a pas encore été intégralement répercutée sur l’aliment.
L’interprofession Inaporc se dit aussi «très inquiète sur l’avenir de nombreuses entreprises de l’aval», dont les abattoirs et les entreprises de transformation, qui font aussi face à l’inflation de nombreuses charges. La France produit aujourd’hui l’équivalent de 106 % de sa consommation de viande porcine, mais «la souveraineté alimentaire du pays en la matière est en jeu, prévient l’interprofession. […] La situation est urgente, car il s’agit de continuer à proposer du porc français aux consommateurs». Même avec une revalorisation des prix, Inaporc considère que «le porc restera la viande la plus accessible du marché».