Accord UE/Mercosur : les filières se font entendre
Inaporc appelle à une négociation internationale sur les standards de production
A l'occasion d'une table ronde au Sénat le 17 juillet sur l'accord UE/Mercosur, le président de l'interprofession porcine (Inaporc) a élargi le débat aux règles internationales du commerce, pour demander qu'elles incluent des standards sanitaires de production. «Il faut revenir aux fondamentaux en incluant dans des débats mondiaux les accords SPS», a plaidé le président de l'interprofession, Guillaume Roué, qui a rappelé qu'il était par ailleurs favorable au libre-échange. «Nous sommes (la France et l'UE, ndlr) aujourd'hui les seuls à mettre en avant les aspects sanitaires et phytosanitaires, bien-être animal... Nous ne pourrons pas continuer de faire la course en tête sans se faire rattraper.» Entré en vigueur en 1995 à la création de l'OMC, l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires (Accord SPS) a notamment pour objectif de «limiter l'utilisation de mesures sanitaires et phytosanitaires injustifiées à des fins de protection du commerce». Au niveau international, la France plaide pour que le Codex Alimentarius (normes de référence en matière de sécurité alimentaire), géré par la FAO et l'OMS, intègre des données environnementales et soit rendu obligatoire.
La viande et le sucre plaident pour une étude d'impact par segment
Filets de poulet, aloyaux de bovins, jambons de porc, sucres bio. Dans le cadre du l'accord UE/Mercosur, les exportateurs sud-américains de viande et de sucre pourraient déstabiliser certains segments de marché bien valorisés en Europe, ont mis en avant les représentants de ces secteurs, auditionnés par le Sénat le 17 juillet. «Au Canada, le produit le moins valorisé est le jambon, c'est le plus valorisé en France», a par exemple expliqué le président de l'interprofession porcine (Inaporc), Guillaume Roué.
Les professionnels de ces secteurs, viande et sucre, ont plaidé pour que l'estimation des effets de l'accord se fasse segment par segment. «Il ne faut pas ramener le contingent d'importation à l'ensemble du marché européen», demande le président de la FNB (viande bovine), Bruno Dufayet. Autre exemple : dans le contingent de 180 000 tonnes de sucre à droit nul, 10 000 tonnes seraient réservées au Paraguay, qui les utiliserait essentiellement pour le marché bio, affirme l'AIBS (interprofession sucre), qui met ce chiffre en regard de la production européenne de sucre bio, évaluée à 30 000 tonnes.
L'accord ferait «baisser les prix» (Interapi)
Dans la filière apicole, l'accord UE/Mercosur «ne changera probablement pas la donne des importations sur le marché français, mais fera baisser les prix», a expliqué le président d'Interapi, Eric Lelong. «Le prix du marché français se calque sur le prix bas d'importation, qui était la Chine jusqu'à présent, et risque de se déplacer vers le Mercosur», en raison de l’abaissement des droits de douane, a-t-il ajouté. «On achètera peut-être du miel d'Argentine, car il est de meilleure qualité.» L'interprofession n'a pas pu formuler d'avis consensuel sur cet accord, a expliqué le président.
D'un côté, les conditionneurs et importateurs de miel «y voient une aubaine et relativisent ces importations» ; le contingent à droit nul accordé (45 000 t) serait inférieur aux importations déjà observées (200 000 t). De l'autre, les apiculteurs s'inquiètent de la baisse des prix. Et Eric Lelong met en garde sur le risque qu'il soit à l'avenir «difficile de trouver des apiculteurs en France pour polliniser les cultures». Selon les années, la production française de miel représente entre 35 et 65 % de la consommation française.
Les maïsiculteurs pointent les «incohérences» de l’accord
L’AGPM (producteurs de maïs) a dénoncé les «incohérences politiques» de l’UE sur l’accord commercial avec le Mercosur. Elle souligne de «lourdes concessions» pour le secteur : un contingent à droit zéro d’1 Mt de maïs grain et sorgho, un contingent de 1 000 t net de maïs doux en conserve, une libéralisation du marché du maïs doux surgelé, des contingents éthanol de 650 000 t au total, un contingent à droit zéro de 180 000 t de volaille.
Cela a «de quoi déstabiliser des secteurs importants pour le marché du maïs européen et français», affirme l’AGPM. De telles concessions lui paraissent «inéquitables» vu les distorsions en coût du travail, prix de l’énergie, parité monétaire, taille des exploitations, technologies interdites. Elles représentent «une tromperie pour les citoyens», vu que le maïs importé du Brésil et de l’Argentine est «potentiellement produit avec des technologies interdites ou en cours d’interdiction en Europe : OGM, atrazine, néonicotinoïdes, thirame…»