Agroalimentaire : stimuler la compétitivité des entreprises
Les rencontres régionales pour l’avenir des filières agroalimentaires et du bois ont été lancées.
Renforcer la compétitivité des entreprises françaises, c’est aujourd’hui un leitmotiv dans la bouche des décideurs. L’industrie agroalimentaire, l’un des piliers majeurs de l’économie nationale, est particulièrement concernée. Comme d’autres secteurs économiques, elle perd du terrain face à la concurrence internationale. De première exportatrice européenne de produits agroalimentaires en 2000, la France se retrouve aujourd’hui en troisième position derrière l’Allemagne et les Pays-Bas. En viandes, notre balance commerciale est même devenue déficitaire.
Que faire ? Les ministères concernés (Agriculture, Redressement productif et délégué à l’Agroalimentaire) et l’Association des régions de France ont décidé conjointement de mobiliser tous les acteurs concernés en organisant dans chaque région des rencontres où ils pourront exprimer leurs propositions.
Handicaps divers
Il s’agit «d’identifier les obstacles qui freinent le développement de cette industrie et réfléchir aux pistes d’amélioration», l’enjeu étant «d’adapter les filières agroalimentaires au contexte de globalisation et à un modèle de développement plus respectueux de l’environnement». C’est ce qu’a indiqué Jean-François Cordet, préfet de Région, lors du lancement officiel de ces rencontres pour la Picardie le 22 novembre dernier à Amiens en compagnie de Claude Gewerc, président du Conseil régional de Picardie, et en présence de Marcel Deneux, sénateur de la Somme.
Les handicaps des entreprises sont de tous ordres. «Nous avons des difficultés à recruter notamment pour des emplois qualifiés ; il est difficile d’investir, les banques sont frileuses, heureusement qu’Oseo existe ; notre trésorerie fond, coincés que nous sommes entre des prix de matières premières à la hausse et des prix à la clientèle qui n’évoluent pas ; l’administration avec ses multiples interlocuteurs ne nous facilite pas la tâche quand il faut être très réactif pour avoir les marchés ; les réglementations françaises vont souvent au-delà des exigences européennes et cela nous pénalise vis-à-vis de nos concurrents…». Autant d’obstacles dont est venu témoigner Philippe Cervi, directeur de la société Les Fruits rouges de l’Aisne, et vice-président de l’association de promotion de l’agroalimentaire picard Agro Sphères.
Le fossé PME grands groupes
Des propos confortés par ceux de Bruno Pierre, Pdg de la société ABCD Nutrition, à travers la description de la vie du chef d’une PME : le souci financier permanent, la confrontation avec la règlementation qui change tout le temps et dont l’appréciation par l’administration n’est pas forcément la même selon le département, la fixation des prix avec la grande distribution en octobre et pour un an alors que les prix des matières premières fluctuent, la nécessaire et vitale mise sur le marché de produits innovants mais qui sont vite copiés… «Il y a un fossé entre les grands groupes et les PME. Ils ont les moyens juridiques et financiers pour faire face. Ce n’est pas le cas pour nous qui devons le faire au détriment souvent de notre dynamisme commercial», a souligné Bruno Pierre, qui apprécie au passage l’appui financier apporté par la Région au travers de Picardie investissement.
Le constat est clair. Reste à présent à avancer. Les professionnels picards sont conviés à proposer des solutions lors de réunions par ateliers. Les réflexions seront centrées sur quatre thématiques : l’emploi, l’exportation, les relations commerciales et le financement. Les propositions qui en sortiront iront, avec celles des autres régions, nourrir les plans d’action nationaux qui seront présentés par le gouvernement au printemps prochain.
Cette démarche a été également lancée pour la filière bois. Comme pour l’agroalimentaire, les professionnels picards sont invités à participer à ces rencontres régionales.
DIAGNOSTIC NATIONAL
Albert Hayens, délégué interministériel adjoint à l’industrie agroalimentaire, a listé les forces et les faiblesses du secteur agroalimentaire français. D’un côté : son poids économique (147 milliards d’euros de chiffre d’affaires, un quart de la production exportée, premier employeur industriel avec 415 000 salariés), sa capacité de résistance aux chocs conjoncturels, la proximité de l’amont agricole limitant les délocalisations, la réputation de qualité, notamment sanitaire, des produits, l’image gastronomique…
De l’autre : l’éclatement du secteur entre de petites entreprises surtout tournées vers le marché intérieur, la rentabilité plutôt faible en particulier dans la viande et le lait, le peu de dialogue au niveau interprofessionnel, le climat étant davantage à la confrontation, la mauvaise image des produits industriels dans l’opinion, le manque d’attractivité des entreprises au regard de l’emploi du fait de la pénibilité des tâches et des salaires peu élevés.
L'AGROALIMENTAIRE en PICARDIE
La Picardie se situe dans la moyenne des régions françaises pour l’agroalimentaire. Ce secteur compte deux cents établissements répartis sur tout le territoire régional ; ils emploient 12 300 salariés. C’est un des principaux atouts de l’économie picarde : premier rang national pour le sucre, deuxième pour les métiers du grain.
L’agroalimentaire picard peut compter sur la richesse de l’agriculture régionale, des outils de production performants, la position géographique de la région, des centres techniques innovants dans le domaine des agro-ressources, un potentiel humain de qualité... Du côté de ses faiblesses, il faut noter : la dépendance de l’extérieur (56% des salariés – 22% en moyenne nationale - dépendent de sociétés dont les sièges sociaux ne sont pas dans la région), le peu de produits sous signe de qualité (seulement trois AOP : champagne, maroilles, pré salés de la Baie de Somme), un déficit d’entreprises de taille intermédiaire (le secteur est dominé par des grands groupes).