Aker : fin du programme, de nouvelles variétés dès 2022
Après huit ans de travaux, le programme d'investissements d'avenir Aker a été clôturé le 18 septembre : une réelle avancée pour la filière betteraves, et de nouvelles variétés disponibles en 2025, annoncent les partenaires.
En 2012, tout est parti d'une volonté d'améliorer la production de betteraves. «Aujourd'hui, le contexte a fortement changé : fin des quotas sucriers en 2017, évolutions climatiques, qui engendrent une recrudescence de bioagressseurs, demandes sociétales sur la diminution des intrants... Aker a toute sa pertinence, puisqu'il répond à ce besoin d'évolution très rapide», introduit Vincent Laudinat, directeur général de l'ITB, président du Comité interprofessionnel du programme Aker. Ce 18 septembre, après huit années de travaux, l'heure était au bilan final du Programme d'investissements d'avenir Aker - Betterave 2020, nommé «l'innovation compétitive», lors d'un colloque scientifique international.
Concrètement, les partenaires* d'Aker assurent avoir accompli la mission qui leur a été assignée au départ, à savoir, doubler le rythme de croissance annuelle du rendement de la betterave en sucre par hectare. «Pour cela, nous avons pris le problème par l'autre bout, en faisant de la prédiction, soit du génotypage avant le phénotypage. Nous sommes allés chercher de la diversité dans les ressources génétiques exotiques disponibles dans le monde entier, pour sélectionner le meilleur en un temps raccourci», ajoute Christian Huyghe, directeur scientifique agriculture à l'Inrae, et chef de projet Aker.
Le programme s'est déroulé en deux volets. Seize variétés sauvages ont été choisies. Il a fallu identifier leur diversité génétique, puis les croiser avec du matériel élite pour obtenir de nouvelles variétés à haut potentiel.
3 200 hybrides sont finalement issus du programme de sélection. «Le deuxième volet a consisté à valoriser, contrôler et évaluer la diversité acquise par de nouvelles méthodes de phénotypage et de génotypage», ajoute Christian Huyghe.
Nouvelles variétés en 2025
Les hybrides obtenus aboutissent à des résultats probants. «Certains montrent un potentiel de 3 à 4 % de sucre supplémentaire, avec une résistance à la montée à graine est aux maladies intéressante», note Bruno Desprez, président de Florimond Desprez et président du comité de coordination Aker. Ce groupe d'hybrides offre une réponse à court terme : «les variétés pourraient être déposées à l'inscription au CTPS (Comité technique permanent de la sélection) en 2022». Il faudra encore compter à partir de là deux ans d'inscription et une année de recommandation, soit une commercialisation en 2025.
Les meilleurs hybrides, eux, apportent une réponse à moyen terme. «On parvient à un résultat exceptionnel de 12 % de sucre en plus, se réjouit Bruno Desprez. Néanmoins, la sensibilité à la montée à graine et la résistance aux maladies sont encore trop fortes et doivent être améliorées.» Aker doit permettre de produire des variétés ultra-performantes en introduisant des fragments intéressants du génome des plantes de référence dans des variétés existantes et ce, dans un pas de temps de sept ans au lieu de douze ans auparavant.
Un plan R&D sur la jaunisse
Et maintenant ? «Aker, c'est fini. Mais les personnes investies dans le programme poursuivent leurs recherches. Ce que nous avons construit ensemble nous sera toujours d'une grande utilité.» Aker va d'ailleurs servir de tremplin à un plan R&D sur le triptyque betterave/puceron/virus, qui était présenté ce 22 septembre au ministre de l'Agriculture.
* Onze partenaires se sont investis dans le programme Aker : Inrae (5 unités), Geves, Université d'Angers, Université de Lille, Agrocampus Ouest, Institut technique de la betterave, Florimond Desprez
Aker en chiffres
16 plantes de référence
40 millions de données moléculaires
8 km de cages d'hybridation
3 200 hybrides sélectionnés
63 000 parcelles de phénotypage au champ
18,5 MEUR de budget (dont 5 MEUR d'aides de l'État)
Jaunisse : pas de réponse miracle
C'est LA question que tous les planteurs se posent : une variété de betterave résistance à la jaunisse virale sera-t-elle disponible prochainement ? «Il n'y a pas dans Aker la variété avec un grand V permettant de produire des betteraves saines sans néonicotinoïdes, prévient Christian Huyghe, directeur scientifique Agriculture à l'Inrae. La génétique va apporter plus de po-tentiel pour répondre au problème de la jaunisse, plus rapidement et de manière plus fiable. Mais elle n'est pas la seule réponse : il s'agira en réalité un package de modes de production.» Entendez par là que les progrès génétiques devront être combinés à des techniques culturales adaptées, avec des rotations réfléchies... D'autant que la jaunisse est complexe : «il s'agit en fait de quatre virus différents, avec plusieurs vecteurs, dont les pucerons verts, précise Bruno Desprez, président de Florimond Desprez. La jaunisse de cette année n'est pas celle de l'année prochaine.»