Alimentation animale : autour d’une même table pour contrer les hausses
Fabricants d’aliments, organismes de conseil en élevage et syndicalisme se mettent autour de la table pour imaginer des solutions d’accompagnement des éleveurs face à l’augmentation des prix et/ou la raréfaction de certains produits d’alimentation.
Fabricants d’aliments, organismes de conseil en élevage et syndicalisme se mettent autour de la table pour imaginer des solutions d’accompagnement des éleveurs face à l’augmentation des prix et/ou la raréfaction de certains produits d’alimentation.
La situation n’est ni «catastrophique», ni «désespérée», mais elle pourrait le devenir si un certain nombre de virages ne sont pas engagés. Face à la montée du cours des matières premières, de l’énergie et des transports, la fabrication d’aliments pour les animaux devient un casse-tête, y compris pour les élevages laitiers. Directeur général de Novial et président de l’association NutriArche - elle regroupe une trentaine de fabricants d’aliments pour animaux implantés dans un croissant allant de la Haute-Normandie à l’Alsace -,
Gaël Peslerbe tirait la sonnette d’alarme en ce début de semaine à l’occasion d’une réunion informelle réunissant Avenir conseil élevage (ACE), le service «élevage» de la Chambre d’agriculture de la Somme et la FDSEA. L’objectif ? Sensibiliser d’abord à un contexte particulier, puis s’accorder sur des messages à transmettre aux éleveurs. «Les tensions que l’on connait actuellement sur le marché des engrais ont un équivalent sur le marché de l’alimentation animale, a ainsi décrit en préambule M. Peslerbe. La reprise brutale de l’économie mondiale a des conséquences sur les matières premières, l’énergie, le fonctionnement des entreprises, des coûts de production en hausse, un coût du transport qui explose…»
Rien qu’en ce qui concerne ce dernier volet, la situation est inédite : «Dans une région comme la notre (les Hauts-de-France, ndlr), où l’on a l’habitude de commander aujourd’hui pour être livré dans les jours qui suivent, cela devient compliqué. Les transporteurs sont réticents et cherchent à optimiser autant que possible leurs déplacements. Nous avons des difficultés à trouver des transporteurs pour aller chercher les matières premières pour faire tourner nos usines», constate le directeur général de Novial. L’augmentation du coût du carburant entraîne un surcoût pour l’entreprise Novial de 10 € pour 100 km. La solution passe, selon M. Peslerbe, par un changement d’habitude : «Nos clients vont devoir apprendre à anticiper leurs besoins. Si on ne fait pas cela, les coûts vont devenir difficiles à supporter».
Tensions chez les fabricants
Chez les fabricants, la question du stock est elle aussi prégnante. «Avec un colza à 600 €/t, les fabricants d’huile ne sont pas pressés de triturer des graines pour faire de l’huile et de constituer des stocks. Ils fabriquent au fur et à mesure, et cela a une incidence sur la disponibilité des tourteaux», poursuit le directeur de Novial et président de NutriArche. Enfin, le secteur est aussi confronté à une augmentation de l’ammonitrate et de l’urée. «Chaque fabricant d’aliments attend des livraisons plus ou moins importantes, dans les prochains jours, mais on ne sait pas exactement quels seront les volumes livrés.» Pour répondre à cette situation, on explique chez Novial avoir modifié la composition des formules en y intégrant moins d’urée. Autant dire que le redémarrage d’usines fabriquant de l’urée en Europe est attendu.
Et chez les éleveurs ?
Pour tenter d’atténuer les effets de ce contexte si particulier, les éleveurs auraient eux-mêmes quelques leviers à activer, à commencer par une analyse de leurs choix en matière de reproduction (vêlage plus précoce) ou d’alimentation. À l’occasion de futures rencontres entre les protagonistes, d’autres pistes pourraient encore être développées. «Il y a un peu de temps à passer chez les éleveurs», alerte ainsi Gaël Peslerbe à l’attention de représentants d’ACE et de la chambre d’agriculture qui approuvent. Quitte à ce que certaines préconisations entraînent une baisse de la consommation d’aliments. Mais ce n’est pas ce qui inquiète Gaël Peslerbe pour la pérennité de son activité de fabricant : «L’idée est de permettre aux éleveurs de s’en sortir. Si nous n’avons plus d’éleveurs, nous n’aurons plus de clients et nous devrons fermer des usines…»