Agr’innov emploi veut répondre aux besoins du Vimeu
Voilà bientôt trois ans que le SRGEA (service de remplacement et groupement d’employeurs) de la Somme active son dispositif Agr’Innov emploi à l’est de la Somme, pour répondre au cruel besoin de main-d’œuvre dans les fermes. Celui-ci s’étend désormais à l’ouest. Ce 4 avril, les professionnels de l’insertion chaussaient les bottes pour mieux cerner les profils.
Voilà bientôt trois ans que le SRGEA (service de remplacement et groupement d’employeurs) de la Somme active son dispositif Agr’Innov emploi à l’est de la Somme, pour répondre au cruel besoin de main-d’œuvre dans les fermes. Celui-ci s’étend désormais à l’ouest. Ce 4 avril, les professionnels de l’insertion chaussaient les bottes pour mieux cerner les profils.
«Ce robot de traite, c’est vraiment incroyable. C’est une vraie découverte», s’extasie Karine Da Rocha, conseillère au Pôle emploi de Friville-Escarbotin. Ce 4 avril, avec une petite cinquantaine de professionnels de l’emploi, elle participait au troisième rallye professionnel – mais premier dans le secteur – qu’organise le SRGEA
(service de remplacement et groupement d’employeurs agricole) de la Somme, dans le cadre de son dispositif Agr’Innov emploi.
«L’objectif est vraiment de recruter les bras dont les agriculteurs ont besoin, aussi bien pour des postes qualifiés que pour des saisonniers. La main-d’œuvre est un enjeu majeur pour la pérennité des exploitations», présente Émile Foirest, président du SRGEA. Si la structure a bien avancé à l’est de la Somme (cf. encadré), tout le travail doit débuter dans le Vimeu. «Le Groupement d’employeurs du Vimeu a cessé son activité, et nous l’avons reprise en janvier. Une trentaine d’adhérents sont restés fidèles à la structure, mais il n’y avait plus de salarié. Nous avons une grosse responsabilité, car les agriculteurs ont besoin de nous», ajoute le président. «Ici, il y a une forte demande en postes qualifiés dans les élevages, mais aussi de saisonniers, avec des activités de maraîchage par exemple», précise Justine Hermant, chargée de développement.
La première étape, pour trouver les fameux «bras», est d’établir un lien avec ceux qui les accompagnent dans leur recherche d’emploi. D’où l’intérêt de ce rallye professionnel. Après avoir participé à la traite du matin, Karine Da Costa et son groupe avaient rendez-vous dans la ferme d’élevage laitier, robotisée cette fois, de Joseph Petit, à Ochencourt. «Pour orienter les bonnes personnes, il faut savoir de quoi on parle. Rien de mieux que d’aller sur le terrain et de discuter avec les employeurs pour cerner les compétences requises», acquiesce la professionnelle.
À la SCEA Petit, deux salariés à temps plein et un troisième à mi-temps épaulent le gérant pour les 180 vaches, leurs élèves, et les 150 ha de plaine (céréales, lin et surfaces fourragères). Joseph avoue «ne pas avoir eu de mal à recruter», mais tous les agriculteurs ne sont pas dans son cas. Ici, les salariés bénéficient d’avantages. «Je travaille un dimanche sur deux en moyenne, et eux, un dimanche sur quatre. On s’arrange pour que chacun soit libre le week-end où il a quelque chose prévu.» Le profil qu’il recherche est différent de celui dont ses grands-parents avaient besoin il y a soixante ans. «Avec la mécanique et la robotisation, le travail est beaucoup moins physique. Mais il faut avoir l’œil d’éleveur, car c’est beaucoup de surveillance», confie-t-il. Christelle Cavillon, de la mission locale de Picardie Maritime, avoue qu’elle imaginait un métier plus pénible. «Et en même temps, je n’avais pas cerné ce tel besoin d’attention envers les animaux.» La polyvalence dans les tâches était aussi pointée. «Nous sommes vétérinaires, conducteurs d’engins, maçons…», en rit Joseph Petit.
Lever les freins
Pour le groupe, une telle immersion ne peut être que favorable. «Voilà deux ou trois ans que nous travaillons de temps en temps avec des agriculteurs. On s’est rendu compte que les personnes en recherche d’emploi et le monde agricole ne se rencontrent pas. Après cette journée, je me sens plus en capacité d’expliquer le métier», commente Emma Stalin, de l’association abbevilloise Harmonessence. Pour elle, beaucoup de personnes ont des a priori à l’évocation des métiers agricoles. «Je vais pouvoir lever les freins qu’ils se créent plus facilement.» Les professionnels de l’emploi disposent d’ailleurs d’outils pour cela, dont le PMSMP (périodes de mise en situation en milieu professionnel). «Cela peut débloquer un financement pour une formation.»
Une formation à la clé
La formation, le SRGEA peut aussi s’en charger. «Aujourd’hui, nous cherchons des compétences transversales dans un premier temps. Les compétences techniques peuvent toujours s’acquérir», assure Eugénie Casari, sa directrice. La motivation est primordiale, puis selon les postes, la capacité de travail en équipe, la minutie, l’appétence pour la robotique, etc. Pour que les professionnels de l’emploi les repèrent, un jeu de cartes créé avec Pro Sapiens (solution digitale pour des actions de formation en situation de travail) leur était remis. Chacune représente une compétence transversale. Pour chaque exploitation visitée, les cartes correspondantes au profil recherché doivent être avancées. «Nous voulons les inciter à repérer ces compétences transversales, plutôt que de se concentrer sur le CV.» Le lien est créé entre le monde agricole et de l’emploi. Il ne reste plus qu’à concrétiser.
Agr’Innov emploi fait ses preuves
172 demandeurs d’emploi décrochaient un CDI ou un CDD saisonnier en agriculture, en 2022, dans le Santerre. 70 % d’entre eux étaient même bénéficiaires du RSA. «Avec son action Agr'Innov emploi (soutenue par le Département de la Somme), le Groupement d'employeurs agricole a permis de lever des freins vers l’emploi et de pallier le manque de main-d'œuvre dans les exploitations du Santerre», se félicite l’équipe. Il faut dire que le SRGEA met le paquet pour y parvenir. Après les rallyes professionnels, qui permettent aux professionnels de l’emploi de mieux cerner les besoins des agriculteurs, le SRGEA organise des sessions de recrutement avec entretiens individuels, mises en situation dans les exploitations, contrats saisonniers, puis Pass Vert l’emploi (une formation de six semaines en moyenne), qui débouche sur un contrat professionnel. En prenant en charge la formation, ainsi que le salarié, le SRGEA hôte une belle épine du pied aux agriculteurs. «Il n’y a pas de contrainte administrative. L’’agriculteur reçoit une facture avec un taux horaire, et c’est tout. Si le salarié ne correspond pas, nous tâchons de lui proposer quelqu’un d’autre», assure Eugénie Casari, la directrice.