Commerce international
Après l’élection de Trump, des turbulences à venir
La volonté du nouveau président américain de protéger son industrie par une hausse des taxes à l’importation risque de provoquer des réactions en chaine. Le think-tank Farm Europe s’est penché sur les différents scénarios possibles.
La volonté du nouveau président américain de protéger son industrie par une hausse des taxes à l’importation risque de provoquer des réactions en chaine. Le think-tank Farm Europe s’est penché sur les différents scénarios possibles.
Au lendemain de la large victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine, les supputations allaient bon train sur la direction que prendrait la politique américaine en matière d’échanges avec le reste du monde. Une incertitude sur l’avenir des relations commerciales internationales entretenues par les intentions affichées par les équipes du candidat républicain de mettre en place des mesures protectionnistes pour favoriser la production américaine, en augmentant les droits de douane sur l’ensemble des produits importés et en les accroissant massivement pour les importations chinoises. Une orientation lourde de conséquence pour les exportations agricoles et alimentaires européennes et notamment les 16,2 milliards d’€ d’exportations françaises de vins et spiritueux dont 3,6 Mds pour les seuls États-Unis (lire encadré). Dans une note publiée le 7 novembre, le «think-tank» Farm Europe évoque «un risque accru de frictions commerciales, voire de guerres commerciales, qui pourraient, d'une manière ou d'une autre, avoir des répercussions sur l'agriculture de l'UE». L’analyse, rédigée par Joao Pacheco, ex-directeur général adjoint de la DG Agri, évoque deux scénarios possibles. D’abord celui d’une augmentation des droits de douane de manière générale, «ce qui porterait les droits de douane moyens pondérés de 2 % à 10 ou 20 %» et «une augmentation spécifique pour la Chine» de 60 %. Ce scénario aurait un impact sur tous les pays du monde, y compris les États-Unis, «déclencherait très probablement des mesures de rétorsion de la part des pays concernés et ne laisserait que très peu de marge de négociation». Les exportations agricoles vers les États-Unis en seraient réduites, avec un bilan final négatif pour l’UE qui bénéficie actuellement d'un important excédent commercial avec les États-Unis. L’option apparait cependant «peu probable» à l’auteur, une hausse générale des droits de douane étant probablement difficile à faire adopter par le Congrès.
Des hausses ciblées par pays et produits ?
L’autre hypothèse évoquée par Farm Europe est celle d’une augmentation des droits de douane principalement à l'encontre de la Chine et de quelques autres produits et pays, «en ciblant les domaines où des droits de douane plus élevés seraient plus efficaces pour ramener l'industrie aux États-Unis et protéger les secteurs sensibles». L'UE pourrait être touchée sur les voitures, l'acier et d'autres produits industriels, mais aussi sur l'agriculture, Donald Trump s’étant montré virulent à l'égard de l'UE pour avoir restreint les exportations de produits alimentaires américains. À partir de là, trois solutions sont possibles, estime Joao Pacheco : soit les deux parties s'en tiennent à des droits de douane plus élevés et ciblés mutuellement ; soit les représailles déclenchent des contre-rétorsions et une guerre commerciale ; soit une forme quelconque de règlement négocié est trouvée. Le think-tank privilégie le scénario des hausses de taxes ciblées qui permettrait à l’administration Trump «d'exercer des pressions et d'obtenir un accord mieux négocié». Quelle que soit l’option prise, «la conséquence de l’imposition de droits de douane très élevés sur les exportations chinoises vers les États-Unis se fera sentir dans l'UE». La Chine se retrouverait en effet avec davantage de marchandises à exporter à des prix encore plus bas vers l'UE et le reste du monde. L'UE se sentirait probablement obligée de se protéger, «et pourrait même le faire dans le cadre d'un accord avec les États-Unis», selon la note. La Chine, quant à elle, pourrait alors s’en prendre à son tour aux exportations agricoles de l'UE. Un scénario là non plus peu rassurant.
La FEVS entend «poursuivre le dialogue»
En première ligne dans les conflits commerciaux UE-Chine et UE-États-Unis, la fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS) a encouragé dans un communiqué la nouvelle administration américaine et la nouvelle Commission européenne, soutenue par les États membres dont la France «à engager rapidement un dialogue transatlantique constructif et fructueux». Les secteurs américains et européens des vins et spiritueux nourrissent historiquement des relations fortes. «Nos entreprises ont, mutuellement et depuis longtemps, des liens puissants. Nos relations commerciales historiques et établies et nos investissements de part et d’autre de l’Atlantique témoignent de nos intérêts économiques communs», écrit Gabriel Picard, le président de la FEVS.