Sports mécaniques
Avant d’être sur les routes, l’éthanol a marqué les pistes du Dakar
Bien avant que le bioéthanol ne fasse la Une de nombreux médias, un agriculteur pionnier du Pas-de-Calais a apporté sa contribution au développement de ce carburant vert en participant à plusieurs courses d’endurance et rallyes-raid, dont le Dakar, au guidon d’une moto. C’était il y 33 ans.
Bien avant que le bioéthanol ne fasse la Une de nombreux médias, un agriculteur pionnier du Pas-de-Calais a apporté sa contribution au développement de ce carburant vert en participant à plusieurs courses d’endurance et rallyes-raid, dont le Dakar, au guidon d’une moto. C’était il y 33 ans.
A 70 ans, Christian Dequidt est « rangé des bécanes » depuis plusieurs années. Il faut dire que sa dernière participation à un rallye-raid – le Paris-Dakar en 2007 – lui a coûté cher… physiquement. Avant cela, il s’est aligné au départ de plusieurs éditions de l’Enduro du Touquet sur les plages de la Côte d’Opale – l’épreuve a depuis été rebaptisée L’Enduropale - et emprunté quatre fois les pistes d’Afrique du Nord dans le cadre du Paris-Dakar. Sa particularité ? Rouler au volant d’une moto carburant à l’éthanol.
Sa première participation à une course de moto, c’était en 1988. Sans budget – les sports mécaniques coûtent cher -, il prend son bâton de pèlerin et aidé par un ami, se lance dans la recherche de soutiens. Sa machine, préparée par un concessionnaire installé dans le Ternois, est une Honda 250 CR dans le réservoir de laquelle il incorpore de l’éthanol. Sur son casque, une betterave en polystyrène le rend identifiable parmi les autres concurrents.
Pour sa première participation à l’Enduro du Touquet, où 1200 pilotes s’affrontent, il termine la course à la 530èmeplace. C’est déjà un succès. Et les participations s’enchaînent. Il prendra le départ de 18 Enduros. Son parcours, visiblement, plait : « Avant ma première participation à l’Enduro, je n’avais jamais fait de cross, assure-t-il. Mon résultat a suscité un enthousiasme qui s’est confirmé au fil des courses ». Se présentant comme « anxieux, stressé », l’agriculteur veut aller au bout de chacune de ses aventures, avec l’idée de montrer que la betterave est une plante capable de répondre à un certain nombre d’enjeux, dont celui de la transition énergétique : « J’ai été présenté partout comme l’agriculteur roulant au jus de betterave. Je voulais à tout prix réussir pour ne pas avoir l’image de celui qui a signé l’échec de l’éthanol », explique-t-il.
Des débuts difficiles
Bien que le succès sportif ne soit pas à chaque fois au rendez-vous, avant et pendant chacune de ses courses, les médias lui courent après. Les débuts ne sont pourtant pas faciles. A l’écouter, on peut même dire que les soutiens étaient frileux, mais il remercie encore aujourd’hui ceux qui ont cru en lui. Christian Dequidt tient bon, fidèle à lui-même et à ses convictions : « J’ai toujours eu un discours vrai et sincère ».
En 2001, changement de dimension et de décor. Le paysan motard veut s’attaquer à une course mythique, le Paris-Dakar, pour donner une autre dimension à son engagement en faveur du carburant vert. La coopérative Unéal et son président Louis Ringô lui apportent un soutien majeur pour sa deuxième participation en 2002. « Louis Ringô avait eu un discours qui m’a touché à l’époque, se souvient M. Dequidt. Il m’a assuré que je ne partirai pas sans le soutien de la coopérative ». En 2003, il signe sa troisième participation à la course mythique, au guidon de la même moto et toujours avec son « jus de betteraves » dans le réservoir.
Quatre participations au Paris-Dakar
En 2006-2007, alors que certains politiques et syndicalistes agricoles – la ministre de l’écologie Dominique Voynet et le leader de la Confédération paysanne, José Bové en tête -, « tirent à boulets rouges sur l’éthanol », Christian Dequidt remet le couvert avec une quatrième participation au Dakar. Un grave accident le condamnera à abandonner la course. Polytraumatisé, il ne regrette pas pour autant l’expérience. Avec le recul, il dit ne « rien regretter », même si le succès de son engagement a pu le dépasser : « Honnêtement, je ne pensais pas qu’on en parlerait autant… »
A-t-il le sentiment de surcroît d’avoir « fait bouger les lignes » ? « Je n’en sais rien. Ce qui est sûr, c’est que d’autres gens plus brillants que moi se sont saisis du sujet. Je suis admiratif de ceux qui ont investi pour le développement de ce carburant. J’ai réussi à faire toucher du doigt au grand public ce qu’est l’éthanol, mais mon mérite s’arrête là. Ma cible, c’était les gens des villes et en ce sens, je crois que j’ai réussi ».