Avoir conscience des risques pesticides pour s’en protéger
Les sources d’exposition aux pesticides sont nombreuses en élevages. Il est donc important de bien connaître les risques pour mieux se protéger.
«Dans le cadre du RMT (réseau mixte technologique) travail en élevages, nous nous sommes penchés, lors d’échanges croisés, sur le rapport de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail) concernant les expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture», indique Gérard Servière, de l’Institut de l’élevage et animateur de ce RMT. Avant de poursuivre : «En élevages, les expositions sont nombreuses car, en plus des herbicides, fongicides et insecticides sur les cultures et prairies, sont manipulés des biocides pour la désinfection (bâtiments, véhicules de transport d’animaux, pédiluves) et des médicaments vétérinaires par voie externe contre les mycoses ou parasitoses. Ces produits doivent tous être utilisés avec précaution, certains étant classés à risques “CMR“ pour les êtres humains, à moyen ou long terme, c’est-à-dire qu’ils peuvent être cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction. La situation de l’élevage vis-à-vis des pesticides reste peu évoquée dans les revues scientifiques en France et dans l’actualité. De plus, la sensibilisation aux risques apportée par divers dispositifs est focalisée sur les seuls produits phytopharmaceutiques. Cela ne signifie pas pour autant que les problèmes n’existent pas. Il faut être plus vigilants qu’actuellement.»
Des risques non limités à l’éleveur
De nombreux intervenants sont concernés par l’utilisation des pesticides en élevages : l’éleveur, mais aussi sa famille qui donne un coup de main, le salarié permanent ou occasionnel, les stagiaires, l’apprenti, les techniciens, l’entrepreneur, les voisins. «Aussi, les risques résultant d’expositions à des produits dont le danger est avéré, doivent être envisagés pour l’ensemble des intervenants. Les informations données sur les produits sont complexes, peu précises, et parfois même trompeuses. Par exemple, des photographies présentant l’utilisation, en atmosphère confinée, d’un désinfectant dit de “choc“ à base de formaldéhyde, bactéricide, fongicide, virucide, montrent une jeune femme sans aucun moyen de protection respiratoire, mais équipée d’un casque antibruit… Même si les éleveurs ont connaissance des dangers, la majorité ne se protège pas suffisamment. Une étude conduite dans le cadre du RMT travail en élevages montre que, même s’ils ont conscience des risques sur leur santé, seule une minorité d’entre eux modifie ses pratiques pour tenir compte de la dangerosité des produits. Les pratiques sont à changer et une prévention primaire doit être mise en œuvre pour renforcer la durabilité sociale des élevages», poursuit Gérard Servière.
Une hiérarchie de la prévention
«La prévention peut être hiérarchisée en trois points. En supprimant en priorité la source de dangers, autrement dit, en évitant ou réduisant l’usage des pesticides. Ensuite, les moyens collectifs de protection sont à privilégier pour limiter les expositions, notamment en réorganisant les chantiers.» Enfin, il faut utiliser des équipements de protection individuelle.
Nombre de produits ne sont commercialisés que parce que la procédure d’autorisation considère que les équipements sont efficaces pour diminuer les expositions, et ce, dans une large proportion et toujours portés correctement. Sans cela, jugés trop dangereux, ils ne pourraient être mis sur le marché.
Mieux connaître et réduire les expositions
En France, plus d’un million de professionnels du secteur agricole sont potentiellement exposés aux pesticides. Outre l’impact sur l’environnement, la baisse du recours aux pesticides en agriculture revêt une importance particulière en raison des enjeux de santé, et notamment de santé au travail.
Dans ce contexte, l’Anses s’est autosaisie en 2011 afin de mener une expertise collective visant à identifier, évaluer et caractériser les expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture et de proposer des actions de limitation et de prévention. L’Anses recommande «la diminution des expositions par la réduction du recours aux pesticides, ainsi que différentes mesures de prévention et l’amélioration des connaissances sur les expositions en conditions réelles d’utilisation».
Pour en savoir plus : www.anses.fr