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Campagne pommes et poires : la récolte s'annonce gustative

Point sur la filière et ses questions d’actualité avec Daniel Sauvaitre, président de l’Association nationale pommes poires (ANPP) à l’origine du label «Vergers écoresponsables».

Daniel Sauvaitre : «La récolte française restera une petite récolte, ne dépassant pas, sans doute, 1,5 million de tonnes.»
Daniel Sauvaitre : «La récolte française restera une petite récolte, ne dépassant pas, sans doute, 1,5 million de tonnes.»
© ANPP



Pouvez-vous dresser un bilan de la campagne précédente ?

Cette campagne s’est caractérisée par une faible récolte, autour de 1,4 million de tonnes de pommes  et de poires, mais avec toutefois des situations contrastées suivant les territoires. Ainsi, dans certaines régions où les vergers ont été confrontés à de fortes gelées, sans être protégés, ces derniers ont souffert alors que ceux qui étaient bien protégés ont produit une belle récolte. Si le gel a frappé notre territoire, ses dégâts ont été toutefois limités par rapport à nos voisins européens. La baisse de production est autour de 30 % en France. Pour l’Europe, la production est passée à 9 millions de tonnes contre 12 millions de tonnes l’année précédente. Le dernier épisode de gel provoquant autant de pertes remonte à 1991. Conséquence : faute d’offre suffisante, la situation sur les marchés s’est avérée plus favorable pour écouler la production.

Comment s’annonce la campagne 2018-2019 ?
La récolte française restera une petite récolte, ne dépassant pas, sans doute, 1,5 million de tonnes, en baisse donc de 3 % par rapport à la moyenne des récoltes 2014, 2015 et 2016, mais en légère progression par rapport à 2017, année atypique en raison du gel, comme je le disais précédemment. Le fort ensoleillement à l’œuvre depuis le début de l’été 2018 a bénéficié à la qualité gustative des fruits et a permis de combler le retard de précocité lié au printemps froid et pluvieux.
On aborde donc la campagne avec une récolte plutôt faible dans un contexte européen de récolte en progression. Une fois cela dit, la production européenne se compose de variétés majoritairement destinées à la transformation, et qui, donc, concernent peu nos marchés davantage tournés vers la pomme à couteau. Cette nouvelle récolte arrive, par ailleurs, sur un marché vide de stock, que ce soit pour les pommes destinées au marché frais ou celles destinées à la transformation.
Autre particularité de la récolte à venir : elle s’annonce gustative, avec un bon équilibre entre notre production et nos marchés. Le fort ensoleillement a, en effet, augmenté la saveur et le taux de sucre des fruits. Sans compter qu’ils auront de très belles couleurs. C’est donc une très bonne nouvelle, car nous allons pouvoir satisfaire à la fois la demande des marchés et celle des consommateurs les plus exigeants. Même si les marchés se mettent en place lentement, on est assez confiant. Autre facteur favorable : producteur majeur de pommes sur le marché mondial, la Chine a fortement souffert du gel cette année. La chute envisagée de sa production atteint 12 millions de tonnes, soit près de 30 % de moins, autrement dit un déficit équivalent à la récolte européenne.

Reste que la diminution de la consommation de fruits se poursuit en France, comme en Europe. Les fruits seraient-ils trop chers ?
C’est une tendance lente en France, comme en Europe, mais qui s’installe en effet et qui concerne autant les fruits que les légumes. En dix ans, les achats de pommes ont baissé de 13,3 % (de 7,83 kg par personne et par an en 2008 à 6,29 kg par personne et par an en 2017, ndlr) et de 9,3 pour les poires sur la même période. Le paradoxe, c’est que la consommation de pommes à croquer diminue alors que celle des compotes augmente. Cela ne compense pas la chute de consommation des pommes à croquer, mais on se tient mieux. Je ne pense pas que cette baisse soit corrélée au niveau des prix car, dès lors que l’offre est de bonne qualité, le prix élevé ne dissuade pas. On l’a constaté l’an dernier.

Quels sont les atouts dont dispose la filière pour inverser la tendance et gagner des parts de marché ?
L’export est une donnée importante de la stratégie française. C’est un marché très haut de gamme, où la production française a une très bonne réputation. On gagne des parts de marché grâce à cette confiance. Du fait, par ailleurs, que l’offre variétale française est une des plus riches au monde, cela devrait favoriser les ventes. Quoi qu’il en soit, le combat est aujourd’hui sur la qualité. C’est l’obsession que l’on doit tous avoir. La qualité est et sera le gage de la réussite.

Ce combat de la qualité, c’est aussi celui que porte l’ANPP, au travers notamment de son label «Vergers écoresponsables». Pouvez-vous nous en dire plus sur celui-ci ?
C’est un des atouts de notre filière. Le label «Vergers écoresponsables» recouvre un système de production durable et agro-écologique, avant même que ces termes ne deviennent à la mode. Il est en fait le prolongement du PFI, production fruitière intégrée, mise en place en 2007-2008, et calquée sur le système. L’idée était de produire des fruits à l’origine contrôlée, d’intégrer la biodiversité dans les vergers, un conseil indépendant de contrôle et d’utiliser le moins possible d’intrants, pour ne citer que quelques exemples du cahier des charges. Nous allons franchir une nouvelle étape avec le passage des exploitations et des stations écoresponsables à la norme HVE (haute valeur environnementale). L’objectif est que 50 % des vergers écoresponsables soit certifiés HVE en 2022.

Combien de producteurs réunit l’association aujourd’hui ?
Notre filière rassemble 1 318 arboriculteurs, soit les deux tiers de la production française de pommes et la moitié de celle de poires. En termes de surfaces, cela représente 23 000 hectares environ, toutes productions confondues.

Autre sujet, mais qui pourrait apporter du changement ou pas, le projet de loi sur l’agriculture et l’alimentation. Qu’en pensez-vous ?
Nous sommes inquiets aujourd’hui du contenu de la loi, qui ne semble pas adapté au marché des fruits et légumes frais. Les débats ont repris. Peut-être sera-t-on surpris. Dans tous les cas, on espère que cette loi ne sera pas que des grains de sable dans des rouages qui nécessitent de l’huile, ce qui semble être le cas, pour l’heure. La preuve en est avec la contractualisation dans les filières alors que, dans la nôtre, il n’y a pas de corrélation entre le prix et le coût de production. Et aucun indice ne pourra entraver cette marche du monde. On a besoin d’un marché vivant et dynamique. En cherchant à normer les choses au travers de la contractualisation, on va aboutir à un appauvrissement des étals. C’est absurde. L’autre obsession, tout aussi irrationnelle, porte sur le glyphosate alors que le vrai sujet est : quelle confiance pouvons-nous accorder à l’Europe et aux agences de santé ?

Autre question d’actualité, la suppression du TO/DE peut-elle remettre en cause les embauches de travailleurs saisonniers ?
Il existe un régime de charges sociales allégées pour les demandeurs d’emploi. Ce dispositif a évolué au fil des ans, mais les entreprises maraîchères et arboricoles ont trouvé leur rythme de croisière. A présent, on nous annonce la suppression des exonérations de charges sociales dont on bénéficiait quand on employait des saisonniers. Ce qui va représenter un impact considérable sur un grand nombre d’exploitations. On demande donc au gouvernement de faire, en urgence, une véritable étude d’impact, et le maintien du régime actuel. On veut bien accepter de se passer du glyphosate, mais on ne pourra pas se passer de main-d’œuvre.

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