Colza d’hiver : pourquoi tester des conduites en rupture ?
Réussir l’implantation et favoriser la croissance à l’automne sont les piliers d’un colza robuste. Pas toujours suffisants néanmoins pour produire du colza d’hiver dans un contexte de très forte pression des ravageurs d’automne et lorsque les facteurs limitants se cumulent. D’autres voix sont à l’étude.
Réussir l’implantation et favoriser la croissance à l’automne sont les piliers d’un colza robuste. Pas toujours suffisants néanmoins pour produire du colza d’hiver dans un contexte de très forte pression des ravageurs d’automne et lorsque les facteurs limitants se cumulent. D’autres voix sont à l’étude.
La stratégie d’adaptation doit intégrer de nombreux leviers, quitte à repenser les paradigmes de culture. Choix variétal, produits de protection des plantes, leviers agronomiques doivent être pensés dans un ensemble cohérent pour éviter ou réduire l’exposition des cultures aux stress abiotiques, limiter ou tolérer la présence de bio-agresseurs ou adventices, favoriser le fonctionnement de la plante en optimisant l’interception du rayonnement et l’efficience de la photosynthèse. Des scénarios de rupture sont à imaginer et à tester dans une approche globale. La modélisation dans le domaine agronomique est une aide précieuse pour évaluer a priori. Toutefois, l’expérience du terrain reste nécessaire car les interactions biotiques, avec les ravageurs notamment, et les accidents climatiques sont mal simulés et peuvent remettre en cause une stratégie théorique séduisante.
Décalages de cycles culturaux
Être prêt à semer tôt le colza est un levier qui est déjà mis en œuvre et éprouvé pour réussir la levée (opportunité des pluies), favoriser la croissance de la culture (en complément de l’alimentation et de la maitrise de la densité) et ainsi esquiver ou limiter les menaces de ravageurs.
Retarder la date de semis peut être une stratégie d’esquive des grosses altises qui est mise à l’épreuve dans les régions ou les hivers sont doux. Cette technique «à contre-courant» est relativement efficace pour réduire les infestations larvaires (dans la mesure où d’autres continuent de semer plus précocement ?). Mais elle reste néanmoins réservée à des contextes particuliers (bordures maritime, parcelles riches en azote) qui peuvent se satisfaire de faibles niveaux de croissance en entrée hiver.
À l’extrême, Terres Inovia teste le semis de colza de printemps à l’automne. Les deux premières années d’expérience n’ont pas été concluantes et ont révélé bon nombre de difficultés en lien avec l’implantation en conditions pluvieuses, les attaques de limaces ou d’altises adulte et, bien-sûr, les dégâts de gel hivernaux. Néanmoins, l’étude va se poursuivre avec des adaptations de la période de semis et des zones géographiques d’étude (bordure de la Manche, Sud-Ouest de la France, par exemple). Un essai dans le Gers a conclu la campagne 2021 avec un potentiel proche de 30 qx/ha pour un tel colza qui n’a pas connu les agressions de larves d’altises ni d’insectes du printemps. Nous attendons désormais des retours de rendement dans les régions Bretagne et Normandie.
Trouver des solutions en dehors de la parcelle
Pour limiter les infestations d’altises, une partie de la solution se trouve certainement à l’échelle des systèmes de culture et des paysages. Le projet R2D2 en Bourgogne travaille notamment sur la régulation naturelle des ravageurs du colza et sur le principe de crucifères piège en interculture.
La technique des crucifères piège en interculture va être mise à l’épreuve à plus grande échelle cette année grâce à la participation des partenaires de Terres Inovia en Bourgogne-Franche-Comté et Grand-Est. L’objectif est d’attirer les altises dans les intercultures avec des espèces de crucifères plus attractives que le colza (espèces identifiées dans des essais spécifiques en 2021). Les couverts seront ensuite détruits à un stade précis pour ne pas constituer de réservoirs d’insectes. Cette notion d’attractivité pour les larves de coléoptères est également testée par le biais de variétés de colza attractives, à l’instar du concept de plantes pièges pour les méligèthes. De nombreux essais verront le jour en 2022 à ce titre.