Comment confirmer la hausse du lait de 2019 ?
Chacun de leur côté, coopératives laitières et producteurs ont appelé la filière à préparer une seconde hausse des prix du lait à l’occasion des négociations commerciales 2020, après des avancées l’an passé.
À l’occasion de leur conseil national le 27 novembre, les producteurs de lait de la FNPL ont demandé aux industriels de se préparer à faire «un second pas» pour le revenu des éleveurs, à l’occasion des négociations commerciales 2020 avec les distributeurs, après un «premier pas» observé en 2019. «L’an passé, les industriels nous avaient dit qu’ils feraient la hausse en deux fois, ce que nous comprenons vis-à-vis du consommateur. Mais, aujourd’hui, certains industriels disent qu’ils ne veulent pas aller plus loin car certains sont restés en retrait l’an passé, regrette André Bonnard, secrétaire général de la FNPL. On ne peut pas s’arrêter au milieu du gué.»
Au-delà des importantes disparités de prix constatées selon les entreprises, les producteurs observent une augmentation moyenne du prix du lait sur les douze derniers mois glissants de 10,27 €/1 000 litres (septembre 2019). La valorisation du marché intérieur permettrait de rémunérer entre 18,70 € et 33,50 € selon la méthode de calcul de la FNPL. «Il faut faire un bilan des EGA entreprise par entreprise», plaide André Bonnard. Mais «en moyenne en 2019, les augmentations pour les industriels ont été à peu près équivalentes à ce qu’ont obtenu les producteurs. Toutefois, les prix restent à des niveaux en deçà des coûts de production». Le président de la FNPL a également invité les coopératives à affirmer plus clairement «qu’elles partent du revenu des producteurs».
Effort demandé en MDD
Justement, la veille, les coopératives laitières (Coop de France Métier du lait) demandaient que les «signaux encourageants envoyés l’année dernière se concrétisent et s’amplifient pour atteindre l’objectif de ruissellement de la valeur créée vers les producteurs».
Au-delà des négociations commerciales, les coopératives rappellent qu’elles souhaitent également des revalorisations sur les marques de distributeurs (MDD), qui représentent deux tiers de leur chiffre d’affaires avec la grande distribution ; ces produits ont été identifiés comme ayant subi une pression accrue des distributeurs, depuis l’entrée en vigueur de la loi Egalim en 2018.
Enfin, les coopératives souhaitent un développement des contrats tripartites (producteur, industriels, distributeur) ; ces contrats portent généralement sur de trop petits volumes et des revalorisations insuffisantes pour les coopératives, qui ont la particularité, par rapport aux privés, de devoir rémunérer équitablement leurs membres, explique-t-on chez Coop de France.
Sodiaal s’appuie sur les marchés à terme pour gérer la volatilité
Afin de «gérer la volatilité des prix» et «sécuriser le prix B», Sodiaal lance un programme pour permettre aux éleveurs d’utiliser le marché à terme européen EEX, a expliqué le 25 novembre, Béranger Guyonnet, chargé de mission à la direction des affaires publiques de la coopérative. Un éleveur individuel n’a aujourd’hui pas la possibilité d’accéder seul, en direct, aux marchés à terme. Les volumes minimums d’entrée sont trop importants, d’où l’intérêt pour les coopérateurs de massifier leur offre via leur coopérative. En France, ce dispositif est inédit, rapporte Sodiaal. Mais en Irlande et en Allemagne, cet outil est déjà utilisé par les éleveurs. Cette nouvelle solution est en cours de présentation aux éleveurs de la coopérative dans le cadre des réunions d’hiver. Le programme pilote concernera 50 millions de litres de lait par an soit entre 300 à 500 producteurs qui choisiront d’y intégrer tout ou partie de leur volume payé par la coopérative au prix B. Actuellement, ce prix B est basé sur la valorisation beurre-poudre du mois précédent. L’objectif ici est de «fixer, sur les marchés à terme, le prix de ces volumes B à l’avance, à six mois et même potentiellement à douze mois», explique Béranger Guyonnet qui pilote le projet. Question prix, la coopérative admet qu’une meilleure valorisation du lait n’est pas l’objectif du programme. «Ce n’est pas une question de différence de prix mais une question de visibilité», tempère le chargé de mission. Les marchés à terme laitiers et la valorisation beurre-poudre étant corrélés, cette solution n’apportera pas nécessairement un meilleur prix mais «cela va permettre de lisser les variations de prix», justifie la coopérative. Cette nouvelle stratégie s’inscrit dans la politique historique de gestion des volumes non contraignante de Sodiaal. «Ceux qui veulent se développer, se développent mais sans le faire peser sur l’ensemble des producteurs car le lait supplémentaire est valorisé en produits basiques», résume Béranger Guyonnet.
Lactalis finalise son accord avec l’Unell
Un peu plus d’un mois et demi après s’être mis d’accord devant le médiateur des relations commerciales, le groupe Lactalis et l’AOP Unell ont annoncé le 26 novembre qu’ils viennent de signer leur accord-cadre portant notamment sur la fixation du prix du lait. La formule de prix se divise, selon le mix produit du groupe, en trois parties : produits de grande consommation (PGC) sur le marché intérieur ; PGC à l’export ; produits industriels. Seule la partie «PGC marché intérieur» intègre le coût de production des éleveurs, explique Claude Bonnet, président de l’Unell. Sur ce segment, le coût de production – il est fixé à «355 euros les 1 000 litres» - pèse pour moitié dans la fixation du prix, s’y ajoutent les indicateurs de marché. Les deux parties se sont donné six mois pour évaluer les effets de cet accord sur le prix payé aux producteurs.