Créer de la valeur avec l’agriculture régénératrice ?
Le think-tank Agridées organisait récemment un colloque sur le thème : « L’agriculture régénératrice : concept marketing ou changement de paradigme ? ». Avec comme questionnement une meilleure rémunération.
Le think-tank Agridées organisait récemment un colloque sur le thème : « L’agriculture régénératrice : concept marketing ou changement de paradigme ? ». Avec comme questionnement une meilleure rémunération.
Danone France veut atteindre 100 % d’agriculture régénératrice d’ici 2025. Mais il reste un acteur mineur de l’agriculture en France avec seulement 2 à 3 % de la collecte de lait et moins de 1 % d’achat des fruits et légumes. Son responsable agriculture régénératrice Pierre-Marie Brizou, décrit ses trois piliers de l’agriculture régénératrice : régénération des sols, bien-être animal, et accompagner les hommes et les femmes, autrement dit, mieux les rémunérer. Le groupe agroalimentaire a convaincu 80 exploitants pour contractualiser et expérimenter cet itinéraire cultural plus protecteur de l’environnement et qui ressemble à s’y méprendre à la démarche One Health. Certains agriculteurs se sont engagés avec Bledina et veulent « des panneaux Bledina à l’entrée de leurs champs », indique-t-il.
La démarche « régénératrice » séduit aussi des maraîchers. Bertrand Morant, responsable Filières et partenariats de Système U, cite l’exemple d’Agrognon qui vise à adapter les pratiques agricoles face aux aléas climatiques de plus en plus extrêmes et réduire l’utilisation de produits phytosanitaires, dans le souci de redynamiser la fertilisation des sols. Bien que l’engouement pour cette pratique culturale soit très mesuré, il reste à déterminer sa valeur ajoutée. Rachel Kolbe, directrice du développement durable d’In Vivo qui inscrit sa démarche dans « Pour une agriculture du vivant » (PADV) plaide pour « utiliser le digital afin de mieux tracer, accompagner et développer » les efforts des agriculteurs. Avec l’objectif de créer de nouvelles gammes de produits « qui parlent aux consommateurs » et qui, in fine, pourraient devenir rémunératrice. Il en est ainsi de leur gamme de bière bas carbone qui mobilise une quarantaine d’agriculteurs sur 900 hectares d’orge.
Le risque et le débouché
Là aussi est le nerf de la guerre : « Il faut avoir des débouchés, un marché, des consommateurs », remarque Bertrand Morant, responsable Filières et partenariats de Système U. « Le consommateur est-il prêt ? », interroge-t-il rappelant que le critère n°1 de l’acte d’achat est le prix, suivi par « consommer pour sa santé ».
La dimension écologique, environnementale n’arrive qu’en troisième position. « On ne sait d’ailleurs pas communiquer sur l’agriculture régénératrice ». Dans ce débat, se pose la légitime question du risque. Qui doit le prendre et le financer ? Le donneur d’ordre ? le consommateur ? La grande distribution ? Les industriels ? « Nous prenons le risque financier. Nous finançons les équipements des agriculteurs contre les aléas climatiques », assure Pierre-Marie Brizou. L’idéal serait « d’associer tout l’écosystème à la valorisation de ce changement capital de paradigme », plaide Thomas Rabant, PDG de ReGeneration, une société qui propose de préfinancer l’agriculture régénératrice.
Le mot de la fin revient à Bertrand Morand : « Attention aux promesses que l’on ne pourrait pas tenir. On est avec l’agriculture régénératrice dans un changement de culture. La prise de conscience doit être collective et il faut donner le temps à l’agriculture de s’adapter ».