Dernières semaines cruciales pour le plan pollinisateurs
Plusieurs rencontres ont relancé les négociations autour du plan pollinisateurs, et éclairci son pilotage. Les détails de l’arrêté «abeilles» révisé seront envoyés aux parties prenantes d’ici le début du mois de mars.
Plusieurs rencontres ont relancé les négociations autour du plan pollinisateurs, et éclairci son pilotage. Les détails de l’arrêté «abeilles» révisé seront envoyés aux parties prenantes d’ici le début du mois de mars.
«Il n’y a pas grand-chose de nouveau», soupire Jean-Marie Sirvins, vice-président de l’Unaf. Comme près de quatre-vingt autres représentants des associations, des syndicats, et des chambres, il a assisté vendredi 12 février à cette nouvelle grand-messe à distance autour du plan pollinisateur. Les deux ministères y ont rappelé les axes détaillés du plan à venir avec leurs pilotes administratifs, en ajoutant des précisions sur le pilotage.
À partir du mois de mars, indique le document envoyé aux participants à la réunion, le plan sera animé par un comité de suivi plus resserré rassemblant trente représentants de l’ensemble des acteurs. Parmi ceux-ci, deux personnes seront issues des syndicats agricoles, trois de la filière apicole, et trois des organisations professionnelles. Trois représentants d’ONG, trois élus, et neuf représentants des administrations centrales et déconcentrées siégeront également à leurs côtés. «Ce qui nous inquiète beaucoup, c’est la place donnée dans ce comité au Muséum d’histoire naturelle, qui préfère les abeilles sauvages aux domestiques», souligne Jean-Marie Sirvins.
Seule annonce qui a pu surprendre : le plan pollinisateurs aura une déclinaison régionale, «sous le pilotage Dreal/Draaf en vue de sa territorialisation», précise le support de présentation de la réunion. Une mesure cohérente avec la volonté de la secrétaire d’État à la Biodiversité, Bérangère Abba, qui souhaite faire du plan pollinisateurs l’une des «briques» de sa stratégie nationale biodiversité, pour laquelle elle lance actuellement des concertations locales dans l’ensemble des régions.
Au-delà des pesticides
«Les ministères proposent bien un plan global, avec une volonté de travailler sur l’ensemble des sujets en parallèle», salue-t-on à la FNSEA. Le syndicat majoritaire, comme il l’avait déjà expliqué mi-décembre, souhaite élargir le débat au-delà des pesticides, en misant également sur le renforcement de la lutte contre le varroa, ou encore le développement de partenariats entre agriculteurs et apiculteurs. «Il est aussi important de réfléchir à la valorisation des ZNT par des couverts mellifères, qui a montré des résultats sur les pollinisateurs, notamment en Hauts-de-France», détaille-t-on rue de la Baume.
Du côté associations, on déplore que les discussions s’attardent autant sur les inventaires naturalistes, les impasses techniques, au risque d’éroder les ambitions. «Les études naturalistes sont importantes, mais on en sait au fond bien assez pour changer notre fusil d’épaule, défend Claudine Joly, en charge des pesticides chez FNE. Il faut diminuer globalement l’usage des produits phytosanitaires de manière drastique, et nous n’avons pas besoin de milliers d’études pour faire ça.» Elle regrette aussi que le plan oublie d’évoquer les trames vertes, ou les paiements pour services environnementaux qui encourageraient les agriculteurs à les mettre en place sur des surfaces productives.
Elle demande donc avant tout à lire le volet réglementaire du plan avant de tirer ses conclusions. Mais une autre réunion organisée par le ministère de la Transition écologique, la même semaine, la laisse penser que le gouvernement ne suivra pas l’avis de l’Anses à la lettre. «Nous le voyons venir : au lieu de trois heures après le coucher du soleil, les traitements pourront se faire deux heures avant», soupire Claudine Joly. «Après l’histoire des néonicotinoïdes, on ne s’attendait pas à des miracles.»
Suspens jusqu’à la fin février
Sur cette question des horaires de traitement, la FNSEA n’a pas non plus reçu de confirmation officielle quant aux arbitrages en cours, mais elle rappelle que la balance penchait déjà vers sa position en décembre. «On nous avait annoncé plus d’ouverture sur ce point lors des réunions en fin d’année, même si elle reste encore trop limitée, indique le syndicat. Il importe également de prendre en compte les particularités comme les serres fermées ou les traitements à faire en urgence.» Rue de Varenne, si on ne se risque pas encore à annoncer une nouvelle victoire face à l’hôtel de Roquelaure, on sourit : «Julien Denormandie en avait fait une ligne rouge.»
Le contenu détaillé du volet technique du plan est attendu dans les prochains jours, et les représentants des différentes organisations auront jusqu’à la fin février pour faire leurs commentaires et l’amender. La version révisée de l’arrêté de 2003 établissant les règles d’épandages sur les cultures mellifères en fleur ne devrait, en revanche, pas être dévoilée avant la fin du mois de février. Le comité de suivi national, réuni dans sa nouvelle géométrie, se prononcera ensuite sur le texte réglementaire mi-mars, pour une mise en consultation publique d’ici la fin du mois.