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Des agriculteurs de la Somme s’unissent pour des sols vivants

L’association Sols vivants Somme regroupe quatre GIEE (Groupements d’intérêt économique et environnemental)
du département, et bientôt sept, qui travaillent sur la vie du sol, sa fertilité ou encore sa résilience. Elle tenait son assemblée générale ce 21 septembre. 

Le GIEE sols vivants du Ponthieu - Phytosez travaille, par exemple, sur la gestion des sols et des produits phytosanitaires. Il a notamment réalisé des essais  d’alternatives aux NNI sur betteraves chez Serge Ducrocq, à Gorenflos.
Le GIEE sols vivants du Ponthieu - Phytosez travaille, par exemple, sur la gestion des sols et des produits phytosanitaires. Il a notamment réalisé des essais d’alternatives aux NNI sur betteraves chez Serge Ducrocq, à Gorenflos.
© Alix Penichou

«Nous vivons avec la menace climatique. Les GIEE (Groupements d’intérêt économique et environnemental) que nous avons constitué doivent nous donner des clés pour pouvoir continuer notre métier», résume Thierry Fernandez, exploitant à Oneux et président de l’association Sols vivants Somme. Celle-ci regroupe quatre GIEE constitués dans des territoires distincts de la Somme (Ponthieu, Vimeu, Plateau picard et Santerre-Vermandois), et trois devraient voir le jour prochainement. Tous travaillent sur des thèmes différents, mais dans un esprit commun : «profiter du collectif pour avancer. Nous partageons nos réussites et nos échecs». Ils bénéficient des conseils des ingénieurs de la Chambre d’agriculture de la Somme, qui les pilote.

 

Le semis direct à fond

Le GIEE du plateau picard qui rassemble treize agriculteurs, par exemple, travaille sur la pratique du semis direct dans une rotation avec cultures industrielles dans des terres argileuses, voire de craie. «L’objectif est d’améliorer la vie du sol, pour des cultures plus saines», précise Mathilde Lheureux, animatrice du GIEE. Formations sur la nutrition des plantes et sur la phytothérapie appliquée, test d’alternatives aux traitements fongicides, essais de semis de betteraves en strip till ou de lin en semis direct ont, par exemple, été réalisés. «Nous avons testé une multitude de semoirs en semis direct. Aujourd’hui, nous en disposons de cinq différents dans le GIEE, donc on a de quoi travailler.» 

Les agriculteurs du groupe manquent encore de références quant à l’implantation des cultures industrielles en semis direct, mais ils comptent bien poursuivre leurs travaux. «Nous avons relever plusieurs problématiques, comme la gestion des chardons», livre Mathilde Lheureux. Le semis direct du lin est encore à travailler aussi. «La technique est encore délicate, car le lin a besoin d’une levée rapide, et en semis direct, la minéralisation se fait plus lentement.»

Chacun relève ses problématiques. Hervé Mesnard, agriculteur à Querrieu, compte notamment se pencher sur la réduction des apports d’azote organique. «Son prix a flambé, et c’est le seul levier dont je dispose pour diminuer davantage mon bilan carbone. J’aimerais notamment tester l’apport d’azotobacter (bactérie rhizosphérique capable de fixer l’azote atmosphérique et de le restituer aux céréales), pour lesquels nous avons très peu de connaissances.»

 

Les couverts à la loupe 

Le GIEE du Vermandois, lui, a axé davantage ses travaux sur la fertilité des sols apportée par les couverts, et la valorisation de ces couverts. «Parmi les dix-sept exploitations investies, toutes avec cultures d’industrie, neuf sont engagées dans un projet de méthanisation», présente Matthieu Preudhomme, animateur. Après un travail sur l’implantation, cet hiver, le groupe devrait réaliser une estimation de leur biomasse grâce à l’outil sentinelle, qui réalise des images par satellite. 

Des exploitants testent aussi de nouvelles cultures, dans un but d’alimentation du méthaniseur. «Nous avons implanté de la Silphie en plein champ et dans les zones de non-traitement en 2020 et 2021.» Cette plante pérenne, qui supporterait bien les aléas climatiques, qui peut dépasser 3 m de haut, sera récoltée deux ans après l’implantation. La récolte s’effectue de la mi-août à la fin septembre avec une productivité dépassant les 12 t/ha de matière sèche. Elle peut se monter à 20 t/ha, d’après Silphie France, qui évalue la production de gaz entre 300 et 350 l/kg de matière sèche. La plante est également utilisable comme fourrage.

Mais, comme tout pionnier, le premier producteur de Silphie de la Somme a essuyé les plâtres. «Silphie France nous a conseillé de semer à 75 cm d’écart, en alternance avec du maïs, pour éviter de perdre un an de récolte. Or, en 2020, il a fait très sec. Les conditions d’implantation n’étaient pas optimales et la plante a eu du mal a démarrer, si bien que les mauvaises herbes ont pris le dessus.» Difficile de s’en débarrasser aujourd’hui. Les essais suivants de plantation à 45 cm se sont révélés bien plus intéressants. D’où l’intérêt d’un travail de groupe. 

«Nos GIEE sont complémentaires. L’intérêt, en plus de l’échange au sein d’un GIEE, sera de partager nos conclusions entre GIEE pour nous permettre d’avancer plus vite», analyse Thierry Fernandez. 

 

«L'évolution est moins risquée en groupe»

Eléonore Lelong, polycultrice à Arrest, a intégré le GIEE du Vimeu il y a quelques mois, poussée par son envie de faire évoluer ses pratiques. «J’ai rejoint l’exploitation il y a cinq ans, et je ressens le besoin de développer mes connaissances pour être plus autonome dans mes décisions, témoigne-t-elle. Je rejoins un groupe dans lequel les agriculteurs sont bien plus avancés que moi, car la plupart pratiquent l’agriculture de conservation depuis plusieurs années. Je vais pourvoir bénéficier de leur expérience et apporter ma contribution. En groupe, l’évolution est moins risquée.»

 

Plus de vingt GIEE en Hauts-de-France 

Les Groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) constituent une reconnaissance officielle par l’État de démarches collectives portées par des agriculteurs «qui visent, à travers l’innovation technique et organisationnelle, à améliorer conjointement la performance économique, environnementale et sociale de leurs exploitations». Ces GIEE constituent l’un des maillons essentiels du projet agro-écologique pour la France.
Les Hauts-de-France n’ont pas à rougir quant à leur participation active à la transition agro-écologique, puisque la région compte plus d’une vingtaine de GIEE reconnus. Les objectifs sont variés. H3EAU+, dans l’Oise, travaille par exemple à la réduction des pollutions diffuses sur un bassin d’alimentation de captage. Près de Calais, le Syndicat pour une production agro-écologique de pommes de terre œuvre sur une démarche de filière responsable. Ou encore, Agriculture et enjeux de territoire, près d’Arras, a pour objectif de développer des filières non alimentaires innovantes pour contribuer à la reconversion du bassin minier. Dans la Somme, au moins trois nouveaux GIEE doivent voir le jour prochainement, dont un sur les semences fourragères durables.
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