Des ZNT toujours difficiles à accepter
La dernière session de la Chambre départementale d’agriculture a été l’occasion pour ses élus de réaffirmer un certain nombre de positions, notamment contre les zones de non-traitement (ZNT), pour le maintien d’une activité d’élevage dynamique dans le département ou, encore, le fonctionnement des chambres d’agriculture à l’échelon régional.
En ce mardi 11 mars, une fois le bilan financier de la Chambre d’agriculture de la Somme et celui d’un an de mandature présenté (à retrouver dans notre prochaine édition), les élus consulaires se sont à nouveau penchés sur l’épineux dossier des zones de non-traitement. Au travers de deux motions, ils ont eu l’occasion d’exprimer leurs craintes vis-à-vis de la mise en place de cette réglementation supplémentaire sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, et de soulever certaines interrogations.
Quelle compensation ?
Pour la présidente de la Chambre d’agriculture de la Somme, Françoise Crété, inutile de se voiler la face et d’espérer passer au travers : «Les zones de non-traitement ont été instaurées par arrêté le 29 décembre, pour une application au 1er janvier 2020 et il faut faire avec. La loi doit être respectée, même si nous regrettons que certains aspects soient encore flous.» «Depuis que nous connaissons cette réglementation, nous nous attachons à demander des éclaircissements sur l’application de ces ZNT, mais les réponses tardent à venir.» Pour Françoise Crété, la principale question en suspens reste la compensation de la perte de productivité qui découle de la mise en œuvre de zones ne pouvant plus exploiter dans les mêmes conditions que le reste d’une parcelle. Autre question en suspens : est-ce aux agriculteurs de prendre en charge l’éloignement des riverains des surfaces agricoles cultivées dans le cadre de futurs travaux d’urbanisation ? La présidente de la Chambre d’agriculture de la Somme est ferme : «bien sûr que non !»
Le danger d’un retour en arrière
Une fois ce constat effectué, vient le moment pour les élus départementaux de s’exprimer. Sur les deux motions présentées, seule une passera l’épreuve du vote. La première présentée par la Coordination rurale, - elle a été écartée -, demandait à ce que la Chambre d’agriculture apporte son soutien au recours en annulation de l’arrêté ministériel instaurant les ZNT porté par le syndicat minoritaire et la Chambre d’agriculture de la Vienne. Avant que l’on apprenne le mercredi 11 mars que ces recours en annulation ont été rejetés par le Conseil d’État, une majorité d’élus de la Chambre d’agriculture de la Somme considéraient qu’une telle demande s’apparentait à «un jeu dangereux». Ancien président des Jeunes agriculteurs de la Somme, et actuel vice-président, Édouard Brunet est d’abord revenu sur «le travail de longue haleine qui a été fait pour ne pas se voir imposer des distances de 150 mètres». Aussi, pour le représentant des JA, «le fait de remettre en cause l’arrêté qui a été pris le 29 décembre, c’est prendre le risque de tout remettre à plat et de se voir imposer les distances qui étaient annoncées au départ». Président de la FDSEA 80, Denis Bully s’est également montré inquiet des conséquences qu’auraient pu avoir une remise en cause de la réglementation actuelle.
Une nouvelle charte à écrire
La seconde motion, présentée par la FDSEA 80, s’est attachée, quant à elle, à demander des réponses sur des aspects de la réglementation qui restent, aux yeux de la profession, «flous». Celle-ci demande ainsi à l’État d’étudier «les autres dispositifs de protection des riverains», de «réévaluer l’ensemble des mesures de protection possibles», de trouver des solutions de compensation financière, d’utiliser la charte de bon voisinage signée dans le département le 26 novembre dernier comme texte d’application et, enfin, de reconnaître qu’une charte uniquement dédiée à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques soit reconnue. Sans surprise, c’est le texte de cette motion qui a été retenu avec un vote unanime de l’assemblée, moins trois absentions. Le travail de chaque partie prenante pour tenter de réduire autant que possible les distances imposées par la réglementation grâce, notamment, à une nouvelle charte dont la motion fait référence, reste quant à lui ouvert.
La régionalisation, une question toujours en suspens
Les 13 et 14 février derniers ont marqué un nouveau point dans l’état de crispation des relations entre les Chambres départementales d’agriculture des Hauts-de-France. Une situation que Françoise Crété a décrypté lors de la session de Chambre d’agriculture de la Somme, mardi : «Les 13 et 14 février, un séminaire qualifié de régional s’est tenu entre les bureaux des Chambres d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais, de l’Aisne et de l’Oise pour évoquer la régionalisation. Etant donné que la Somme n’y a pas été invitée, on ne peut pas le considérer comme un séminaire régional, mais plutôt comme un séminaire inter-départemental.» Depuis une précédente session de la Chambre d’agriculture de la Somme, puis une session de la Chambre régionale des Hauts-de-France le 15 novembre 2019, les relations entre les élus des cinq départements ne semblent pas s’être améliorées et les positions sont restées les mêmes. Dans la Somme, pas question d’accepter le projet de fusion des chambres d’agriculture pour constituer une Chambre d’agriculture de région Hauts-de-France au 1er janvier 2021, «sans qu’un projet politique clair ait été défini», défend Françoise Crété. Un propos auquel apporte son soutien Laurent Degenne : «Il faut d’abord qu’il y ait un projet politique avant qu’on y mette les moyens. Pour le moment, on a plutôt l’impression que c’est l’inverse qui est proposé.» Dans l’hypothèse où c’est le schéma d’une chambre de région qui viendrait à être retenu et à s’appliquer, la présidente de la Chambre d’agriculture de la Somme continuerait de regretter une «perte de souveraineté et d’autonomie budgétaire départementale». Toujours selon Françoise Crété, ce n’est pas tant la volonté de régionaliser le fonctionnement des chambres d’agriculture qui pose problème, mais «la manière d’y arriver (…) Le niveau régional est important, mais les choses doivent se faire sans pression». Président du Conseil départemental de la Somme, Laurent Somon a réaffirmé, de son côté, l’importance d’un échelon départemental fort et la mutualisation des moyens, en opposition à un principe de fusion : «Les fusions, a-t-il dit, c’est toujours quelque chose de compliqué. Il faut d’abord porter un projet avant de décider des moyens qu’on lui accordera (…) Et si l’on veut que ce soit efficace, il faut que ce soit choisi plutôt que forcé.»