Deux stratégies pour récolter vite fait, bien fait
Pour faire face à l’augmentation des surfaces et à la météo capricieuse de ces dernières années, certains agriculteurs n’ont pas eu d’autres choix que de revoir leur stratégie de récolte, afin de faire progresser leur débit de chantier.
Une moisson rapide et efficace, c’est le souhait de tous les agriculteurs lorsqu’arrive l’été. Avec l’augmentation de la taille des exploitations, ils ne peuvent pas se permettre une moisson étalée dans le temps, au risque de compromettre la qualité de la récolte.
Deux stratégies dominent pour augmenter le débit de chantier : l’une consiste à opter pour deux «petites» moissonneuses-batteuses conventionnelles et l’autre pour une «grosse» non conventionnelle épaulée d’un transbordeur.
Aujourd’hui, suivant les marques et les modèles, le prix de deux machines conventionnelles est sensiblement équivalent à celui d’une grosse non conventionnelle, avec même un léger avantage pour cette dernière. Pour ce qui est du coût d’entretien, les avis sont partagés, même s’il faut compter tout en double ! Toujours est-il que chaque jour, il est nécessaire de souffler et de graisser deux machines. Mais là où cette solution se complique, selon Jacques Manet de chez Case IH, c’est pour la gestion du personnel. «Difficile de respecter 35 heures par semaine pendant la moisson. Même s’il est possible d’aménager le temps de travail du salarié, la contrainte administrative n’est pas négligeable. Après, il faut aussi trouver des gens compétents. Et depuis vingt ans, on constate que peu à peu, l’agriculture s’est défaite de ses salariés». Toutefois, lorsque la main-d’œuvre n’est pas un obstacle, certains opteront pour cette solution à deux machines, afin de minimiser les risques en cas de panne et, suivant les régions, de préserver la qualité de la paille. D’autres apprécieront l’échelonnement de l’investissement.
La seconde solution consiste à s’équiper d’une moissonneuse-batteuse non conventionnelle aux capacités accrues, et d’un transbordeur pour acheminer le grain hors de la parcelle. Cette stratégie de récolte en flux continu a toutefois du mal à se démocratiser. Indispensable aux États-Unis, le transbordeur peine à trouver sa place dans les exploitations françaises déjà bien équipées en bennes, malgré sa polyvalence (semence, engrais...).
Le transbordeur améliore le débit de chantier
Le transbordeur a pourtant tout son intérêt avec ce type de moissonneuse-batteuse équipée d’une coupe de 10 mètres qui, dans du blé, débite en moyenne 600 à 700 quintaux par heure sans marquer d’arrêt. Le transbordeur permet de vider en roulant, en limitant la compaction des sols du fait de ses pneumatiques largement dimensionnés (voire même l’emploi de trains de chenille). Avec une benne, même équipée de pneus basse pression, le tassement est inévitable.
D’après les différents constructeurs, un transbordeur permet un gain de débit de chantier de l’ordre de 15 à 25 % en moyenne, voire plus en fonction du parcellaire.
Outre l’investissement (de 25 000 à 80 000 euros, prix catalogue pour un modèle de base, suivant la capacité, le débit de la vis de déchargement et les équipements), le transbordeur impose une bonne organisation de la logistique.
En bout de champ, plusieurs solutions s’offrent à l’agriculteur : «des bennes agricoles, ou des semi-remorques, appartenant à l’agriculteur ou à la coopérative», précise Marc Bernard, de Bouchard.Toujours est-il que la moissonneuse-batteuse impose la cadence à tout le chantier.
Suppression des temps morts
«En théorie, selon Julien Levasseur, de John Deere, une machine de 9-10 mètres débite près de 6-7 hectares à l’heure, alors qu’une machine à cinq secoueurs avoisinera les 2,5 hectares à l’heure. Même à deux machines, le débit par parcelle ne dépasse pas les 5 hectares à l’heure».
«On fait aussi moins de demi-tours en bout de champ», surenchérit Guillaume Feys, de Claas.
Il est difficile d’affirmer qu’une machine non conventionnelle ira plus vite que deux petites conventionnelles. «Cela dépend encore une fois du parcellaire, explique Jacques Manet : Ce n’est pas aussi arithmétique que ça ; la dextérité des chauffeurs compte pour beaucoup».
Difficile donc, d’avoir un avis tranché sur la question, même si la tendance actuelle penche vers l’utilisation d’une seule machine. Ce n’est qu’avec un transbordeur que l’on fait la différence en supprimant de nombreux temps morts.