Elevage : les maladies néonatales : comment les prévenir et les guérir ?
Gros nombril, cryptosporidiose, diarrhées, troubles respiratoires... Ces termes sont les bêtes noires des éleveurs allaitants. La chambre d'agriculture et le GDS avaient choisi le thème sensible des maladies néonatales lors de la journée viande, le 17 janvier.
l'équilibre immunitaire du veau».
2 650 veaux allaitants sont morts en 2018 dans la Somme. Le chiffre fait frémir. «Il représente 10,7 % de taux de mortalité en moyenne, dans les exploitations dotées d'un atelier viande», annonce Daniel Platel, conseiller à la Chambre d'agriculture de la Somme, lors de la journée viande organisée le 17 janvier, en partenariat avec le GDS (groupement de défense sanitaire) de la Somme. Parmi ces veaux morts, 4,5 % l'ont été le premier jour, 5,8 % l'ont été lors des trois premiers jours - «on explique en général cela par un vêlage difficile» - et 4,9 % le sont entre quatre jours et trois mois, «et souvent, un problème sanitaire était la cause».
Cette mortalité n'est pas sans conséquence financière pour l'éleveur. Comptez 200 EUR par veau mort, auxquels s'ajoutent 120 EUR d'entretien de chaque mère. Le coût de mortalité s'élèverait au total à 831 000 EUR pour l'ensemble des éleveurs allaitants du département. «On considère que 1 % de mortalité coûte 320 EUR à l'éleveur. L'objectif fixé est de ne pas dépasser les 5 %», commente Daniel Platel. Le préventif a cependant un coût lui aussi. Au Gaec du Bois Roland, à Fontaine-sur-Somme et à Laleu, il s'élève en moyenne à 47 EUR par vache (vermifugation, vaccination...). Ajoutez à cela un contexte peu favorable à la production de viande bovine... «La filière a donc l'obligation de maximiser ses performances», assure Nicolas Lucas, vétérinaire à Crèvecoeur-le-Grand (60).
Prise de colostrum : la première clé
Pour lui, le bon développement de l'animal se joue avant l'âge de six mois. «Si un charolais ne pèse pas 180 kg à cent vingt jours, il ne sera pas rentable.» Et de préciser que l'essentiel se passe en fait quarante-cinq jours avant le vêlage, et six heures après le vêlage, grâce à la prise en quantité suffisante du colostrum, ce lait de la première tétée riche en anticorps, qui protège le veau contre les maladies néonatales jusqu'à ce que son propre système immunitaire devienne fonctionnel.
«L'administration d'un colostrum de qualité, en quantité voulue et tôt après la naissance, constitue le plus important facteur de santé et de survie des veaux. Un bon colostrum fait au moins 75g/lgG/l, et un veau doit boire au moins 180 g d'IgG dans les six premières heures.» Si un veau ne tète pas, l'éleveur doit intervenir. «Quand on voit que le veau est mou, on traite la vache et on le fait boire au biberon. Au moins, on peut contrôler la quantité de lait ingéré», témoigne Olivier Parcy, associé du Gaec du Bois Roland.
Et ensuite, de quoi le veau peut-il souffrir ? «Il existe des tas de maladies, explique Nicolas Lucas. Un bon examen clinique, avec prise de température, palpation abdominale, observation des selles, de la respiration et de l'état d'hydratation, est primordial. Car une maladie est toujours multi-factorielle.»
Le gros nombril
Un veau triste, qui ne boit pas, avec de la fièvre, une douleur à la palpation, et la présence d'une masse à l'extérieur ou à l'intérieur du ventre ? Le veau a assurément un gros nombril. «Et c'est une porte ouverte sur le système sanguin des animaux, car il est le lien initial avec le placenta», prévient le vétérinaire. Selon lui, la génétique a un rôle dans cette tare. Mais l'environnement encore plus : «Ce problème est beaucoup moins fréquent lors d'un vêlage en pâture, car il y a moins de bactéries.»
Le traitement à administrer est une antibiothérapie de dix jours, des anti-inflammatoires et, si échec, le recours à la chirurgie. En prévention, «soignez l'hygiène du parc de vêlage et surveillez sa température. Procédez à la palpation à cinq et à dix jours et désinfectez les nombrils. Enfin, ne négligez pas la couverture minérale des mères, car si elles sont en carence, elles vont avoir tendance à trop lécher leur veau».
La cryptosporidiose et autre diarrhées
La cryptosporidiose est une maladie parasitaire et protozoaire, qui atteint les veaux vers huit à quinze jours. Les signes : une forte atteinte de l'état général, une déshydratation modérée et un taux de mortalité élevé. Le diagnostic est réalisé grâce à des tests sur bandelettes et le traitement se résume à 100 mg/kg/j de sulfate de paromomycine, des sachets repas et des anti-inflammatoires. Les mesures sanitaires (seau, niche individuelle), et l'Halocur® sont les moyens de prévention. La maladie est tenace. «Il faut au moins vivre trois ans sans phase clinique pour estimer qu'il n'y a plus de gros risque de cryptosporidiose.»
Colibacilles, salmonelles, rotavirus - coronavirus, BVD, cryptosporidium, coccidies... Les diarrhées néonatales peuvent être de plusieurs types et apparaître à différents stades. Mais les conséquences sont toujours les mêmes : un animal qui se déshydrate et qui n'absorbe plus l'énergie nécessaire pour lutter contre la maladie. L'examen complémentaire est alors recommandé, car le traitement dépend de la cause. «Si elle est virale, on procédera à la réhydratation, de l'antalgique et un pansement gastro-intestinal. Si elle est d'origine bactérienne, il faudra alors une antibiothérapie spécifique.» La vaccination des mères est l'une des mesures de prévention. Certains éleveurs mettent aussi en libre service de l'argile verte à lécher, qui forme un plâtre dans le ventre. «C'est peu coûteux et ça fonctionne plutôt bien», commente l'un d'entre eux.
La cocciciose, elle, est une maladie infection très contagieuse, due à un parasite intestinal spécifique du genre Eimeria. Les cas cliniques apparaissent après trois semaines. «On ne voit pas de diarrhée, mais les veaux ont le cul sale.» Cette fois, le traitement est de deux types : soit l'administration d'un coccidiostatique, soit de coccidicide.
Troubles respiratoires
Les troubles respiratoires sont enfin une cause de mortalité fréquente. Et ils sont «multifactoriels par excellence». Ils démarreraient par une contamination virale (RS, BVD, Pi3...) et les bactéries empirent ensuite la situation. Le traitement consiste en l'administration d'antibiotiques et d'anti-inflammatoires.
Parmi les facteurs clés de la prévention, les conditions de logement jouent un rôle important. «Le bâtiment doit être ventilé, ce qui signifie de l'air, sans les courants d'air, précise Mireille Saingier, ingénieur-conseil en bâtiment d'élevage à la chambre d'agriculture. Chez nous, les bâtiments sont souvent d'un volume surdimensionné pour l'élevage, donc l'air chaud a du mal à monter. L'orientation est aussi importante. Il faut, par exemple, éviter de le positionner face au soleil levant.»
La vaccination fait aussi partie des solutions. Nicolas Lucas donne l'exemple de deux schémas : «Rispoval intranasal à partir de neuf jours, jusqu'à douze semaines ; relais Rispoval 3 à deux et trois mois.»
L'essentiel à retenir
- Choix génétique : éviter les gros veaux à la naissance
- Période de vêlage : favoriser les vêlages au printemps et à l'automne pour qu'ils se fassent dehors
- Hébergement : éviter de trop charger le bâtiment
- Etre à cheval sur l'hygiène : nettoyage, présence d'un parc à veaux, période de quarantaine pour les nouveaux.
- Bien équilibrer le rationnement (pas trop de maïs ou de pulpe pour les mères)
Le GDS en lutte contre le BVD
Fièvre, anorexie, léthargie, atteinte des systèmes immunitaire, respiratoire et digestif et de l'appareil reproducteur... Ces symptômes sont ceux de la diarrhée virale bovine (DVB), encore appelée maladie des muqueuses. Une infection due à un pestivirus, particulièrement répandue en France. «C'est pourquoi nous faisons de cette maladie notre priorité», affirme Pascal Bienaimé, président du GDS Somme. Un plan d'éradication de la maladie est mené à l'échelle régionale depuis juillet 2018, grâce à un outil adapté.
L'outil en question : une boucle de prélèvement de cartilage auriculaire, posée aux veaux dès leur naissance par l'éleveur, en même temps que les boucles d'identification. Le petit bout de cartilage prélevé est alors envoyé dans les deux jours au laboratoire pour une recherche du virus de la BVD. Le coût, pour les éleveurs : 6,70 EUR par veau analysé, que le GDS finance à hauteur de 2,70 EUR, soit 4 EUR à charge de l'éleveur. «Cela est à mettre en perpective avec la plus-value faite grâce à des élevages sains, commente Pascal Bienaimé. La déclaration en zone saisonnièrement indemne (ZSI) favorise notamment l'exportation des bêtes.»