Fourrage : quelle fauche pour quels besoins ?
Quand faucher ? Quelle technique privilégier en fonction de tel ou tel besoin ? Claire Leroy, ingénieur-conseil à la Chambre d’agriculture de la Somme, qui fait partie du groupe Herbe régional, donne des clés pour optimiser sa récolte de fourrage.
Quand peut-on faucher une prairie permanente ?
Le cumul des températures (somme des températures quotidiennes, comprises entre 0 et 18°C depuis le 1er février) est un premier repère. S’il atteint entre 800 et 900 °C, une fauche précoce peut être envisagée. Dans la Somme, la station d’Abbeville affichait 879°C le 3 mai. Les premières fauches peuvent donc être prévues. Ensuite, tout dépend du choix que fait l’agriculteur. S’il veut privilégier la qualité nutritionnelle, il peut faucher du stade épi 10 cm dans la gaine jusqu’au stade début épiaison, pour un ensilage. Plus on attend, plus le taux de MAT (matière azotée totale) et la valeur UF (Unité fourragère) diminue, mais le rendement sera plus élevé. Le raisonnement est à faire en fonction des besoins de l’exploitation : certains vont privilégier la qualité pour des animaux à forts besoins, d’autres un fourrage plus fibreux pour les rations acidogènes ou miser sur plus de rendement pour faire des stocks. Au-delà de la théorie c’est le temps qui décide et il ne faut pas laisser passer une bonne fenêtre météo même si la récolte est un peu précoce.
Ensilage, enrubannage, foin… Quels sont les avantages et les inconvénients de chacun ?
Pour une récolte précoce, l’ensilage et l’enrubannage seront privilégiés car ils permettent une souplesse lors de la récolte. Le coût de récolte est à prendre en compte. Selon une étude menée par le site Perel (Pérenniser l’élevage par l’autonomie fourragère), pour 4 à 5 t de MS (matière sèche)/ha, comptez 45 €/t de MS pour un ensilage, 65 €/t de MS pour de l’enrubannage et environ 40 €/t de MS pour du foin, hors main-d’œuvre. L’enrubannage est plus coûteux puisqu’il faut filmer les ballots. D’un autre côté, il peut être stocké à l’extérieur et sa distribution est facile. Il est également intéressant pour les petits chantiers, car il évite de faire déplacer l’ensileuse. Sous-estimé, le chantier d’ensilage d’herbe est souvent associé à de l’entraide et du matériel.
Les valeurs nutritives sont aussi différentes. Selon les tables de l’Inra 2007, pour un ensilage pré fané, premier cycle, l’ensilage aura une valeur de 0,85 UF (unité fourragère), 87 g PDIN*, 72 g PDIE** et une unité encombrement (UEB) de 1,06. Pour le foin de premier cycle au 10/06, on peut compter 0,72 UF, 69 g PDIN,82 g PDIE et 1,11 d’UEB. Le foin est ainsi plus encombrant que l’ensilage, mais il maintient un bon équilibre protéine-énergie malgré une perte de valeur PDIN et UF.
Quelles sont les techniques pour une récolte optimale ?
Une hauteur de fauche de 6 à 7 cm est à respecter. En-dessous de 6 cm, il y a un risque de contamination en butyriques (pour les vaches laitières) et la pousse de la prairie pourra avoir du mal à redémarrer. Au-dessus de 7 cm, il y a une perte de rendement. Ensuite, pour un ensilage, mieux vaut faucher l’après-midi pour maximiser le taux de sucre dans la plante et permettre une bonne fermentation du silo.
Les conditions météos sont importantes : il faut plusieurs jours de temps sec selon la récolte qu’on prévoit de faire. Pour un ensilage, on fauche, on andaine pour regrouper plusieurs aindains et on récolte : la durée de chantier est de deux à trois jours selon la vitesse de séchage du fourrage. Une fois en silo, il est possible d’ajouter un conservateur à l’ensilage pour limiter les pertes et favoriser les fermentations. Mais c’est la cerise sur le gâteau : chaque étape du chantier doit être bien réalisée car cela représente un investissement. Le conservateur ne rattrapera pas un ensilage mal tassé ou trop sec. Cette pratique peut être intéressante également lorsque la vitesse d’avancement du front d’attaque n’est pas assez rapide ou pour les légumineuses, comme la luzerne. Pour l’enrubannage, comptez trois à quatre jours de chantier, pour faucher, faner, andainner, presser et enrubanner. Le foin prendra au moins quatre à cinq jours pour faucher, faner au moins deux fois pour un bon séchage, andainner et presser.
Comment sait-on que le fourrage est prêt à être pressé ?
Le taux de MS peut être mesuré grâce au test de la main. Pour une bonne conservation de l’ensilage, il faut viser 30 à 35 % de MS. À ce stade, lorsqu’on serre une poignée d’herbe dans la main, les doigts s’humidifient de quelques gouttes seulement, voire restent juste humides. Pour un enrubannage, on table 45 à 55 % de MS. Cette fois, il ne doit plus rester d’humidité dans la main malgré un fourrage encore vert. Le foin, lui, est à 80 voire 90 % de MS.
* Protéines digestibles dans l’intestin grêle permises par l’azote
** Protéines digestibles dans l’intestin grêle permises par l’énergie
Les contacts du groupe Herbe, dans vos départements
Aisne : Gaëtan Leborgne, 06 18 51 01 54
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