Gérer les adventices grâce au faux-semis… sous conditions
Avec des résistances de plus en plus fréquentes et des réductions de solutions chimiques, la lutte contre les adventices est un vrai casse-tête. La technique agronomique du faux-semis est donc séduisante. À condition de bien la maîtriser.
Avec des résistances de plus en plus fréquentes et des réductions de solutions chimiques, la lutte contre les adventices est un vrai casse-tête. La technique agronomique du faux-semis est donc séduisante. À condition de bien la maîtriser.
«Plus on pratique les faux-semis, plus il y a de mauvaises herbes dans la parcelle.» Voilà quelques années qu’Hervé Georges, conseiller en productions végétales à la Chambre d’agriculture de la Somme, entend cette rumeur circuler en plaine. «Si la technique échoue parfois, c’est qu’elle est mal contrôlée. Cette solution agronomique présente pourtant un gros intérêt, alors que le problème adventices se tend un peu partout. Les cas de résistance sont de plus en plus nombreux, et les molécules chimiques de moins en moins à être autorisées.»
Vous avez dit faux-semis ? Entendez par là un travail superficiel du sol qui a pour objectif de stimuler la levée des adventices en interculture, puis de les détruire avant l’implantation de la culture. «Dans la Somme, des agriculteurs engagés en mesures agro-environnementales (MAE) de réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires les pratiquent de plus en plus», note le spécialiste. Lui-même est engagé dans le projet Adventurh que pilote Agro-transfert ressources et territoire, pour une meilleure maîtrise des adventices (cf. encadré). Le faux-semis y a toute sa place.
Clés de réussite
Des critères de réussite sont à suivre à la lettre. Premièrement : anticiper le passage mécanique. «Il faut s’y prendre suffisamment tôt, au moins trois semaines avant la date prévue pour les semis.» Il s’agit souvent de faux-semis réalisé à l’automne, mais il peut aussi être envisagé au printemps. Celui-ci demande une préparation du sol fine et superficielle, pour établir un bon contact terre-graine favorisant la levée des adventices. Le rappuyage est ensuite primordial. «Peu importe le matériel utilisé, du moment que le résultat est là», assure Hervé Georges. Lui conseille généralement un passage de déchaumeur assez rapide, pour une terre bien affinée, puis un passage de rouleau plombeur, plus lentement, pour bien rappuyer. «Cela implique deux passages, donc plus de consommation de gasoil et plus de temps, mais le résultat est meilleur.» Une bonne pluie sera aussi un facteur favorable à la levée. Si plusieurs outils de travail du sol sont utilisés, Hervé Georges recommande de commencer par celui qui offre un travail plus profond et de terminer par celui qui sera le plus superficiel. «Les agriculteurs ont tendance à faire l’inverse.»
Une fois les adventices bien levées, tout n’est pas gagné. «Un bon faux-semis doit être bien détruit. En cas de repiquage, ça peut être catastrophique. Pour cela, le glyphosate reste le produit le plus efficace.» Si les conditions sont bien sèches, une destruction mécanique peut également être envisagée, «à l’aide d’outils à dents de type vibrodéchaumeurs et cultivateurs à trois ou quatre rangées de dents», donne pour exemples Arvalis.
Encore des questions
Hervé Georges pointe néanmoins un point faible de la technique : «Une forte pluie après un faux-semis peut compromettre les semis, car la terre n’aura plus assez de portance pour y entrer.» Des questions restent aussi en suspens. «La physiologie des mauvaises herbes n’est plus la même aujourd’hui qu’il y a dix ans. Nous observons par exemple de plus en plus de vulpins au printemps. Les problèmes de chénopodes dans les colza sont aussi récents.» Des interrogations sur la levée de la dormance des graines, propre à chaque espèce, planent aussi. Or, si la dormance n’est pas levée, la technique du faux-semis est inefficace. Mieux connaître ces plantes offrira une meilleure efficacité des mesures agronomiques. C’est tout l’objet du projet Adventurh.