La paille, un vrai fourrage
Dans une région où de nombreuses ressources fourragères sont disponibles, la place de la paille dans le rationnement des bovins viande est souvent négligée. Sa place en tant que fourrage ne doit pas être négligée même si, cette année, elle risque de manquer.
Dans une région où de nombreuses ressources fourragères sont disponibles, la place de la paille dans le rationnement des bovins viande est souvent négligée. Sa place en tant que fourrage ne doit pas être négligée même si, cette année, elle risque de manquer.
Les efforts génétiques réalisés ces trente dernières années ont modifié la corpulence des animaux. Nous gagnons environ 3 kg de carcasse par an à l’abattage des vaches allaitantes. En 2004, le tableau de bord envoyé chaque fin d’année a donné en race charolaise 388 kg par carcasse pour 438 kg
aujourd’hui, et en race blonde 421 kg pour 489 kg. Mais les troupeaux à 500 kg de carcasse sont maintenant nombreux, et les vaches d’une tonne lors de leur départ à l’abattoir ne sont plus des exceptions. Tout est donc proportionnel et le volume de la panse de ces animaux oscille entre 100 et 300 litres selon la littérature sur le sujet, le stade physiologique et le type d’alimentation.
Une panse à combler
Boire de la bière fait gonfler dit-on…à condition d’en abuser… Pour le bovin, c’est pareil ! Le volume stomacal s’adapte au type de rationnement. Tous les cavaliers le savent : un cheval mis au pâturage attrape de la panse. Quand j’entends dire que la blonde (d’Aquitaine) est «faite» pour des rations à faible volume (ration sèche), je ne suis pas d’accord. C’est un argument commercial puisque des taurillons blonds nourris au maïs et à la pulpe n’ont pas besoin de plus de concentrés que leurs homologues charolais. Ils s’adaptent en faisant plus de panse, mais cela se fait au détriment du rendement carcasse.
1,3 kg de paille remplace 1 kg de maïs ensilage (UF)
Cette panse, qui est de plus en plus volumineuse, doit être remplie. Le foin est, pour cela, un bon moyen. Mais il est de plus en plus rare chez nous. La pulpe surpressée et le maïs ensilage sont riches et il faut donc les rationner pour éviter de suralimenter des vaches allaitantes qui ont de faibles besoins pour produire leurs dix à quinze litres de lait. C’est là que la paille rentre donc en scène pour remplir l’estomac et permettre un état de satiété. De quoi faire une bonne sieste après le repas, au lieu d’aller «embêter» les copines. Une fois que le rumen est bien rempli, c’est le principe du vase communiquant : plus la vache mange de la paille, plus on fait d’économie sur la distribution des autres fourrages plus coûteux. L’équivalent de
10 UF (unités fourragère) peut être apporté par 21 kg de maïs à 35 % de matière sèche ou par 27 kg de paille à 85 % de MS.
Le vase communiquant a toutefois ses limites, car la paille est pauvre en protéines et encombrante. Son coefficient d’encombrement est de 1,8 alors que le maïs ensilage et la pulpe sont à 1,1 et la betterave fourragère à 0,7. Mais des vaches de gros gabarit, en ration pulpe maïs, consomment jusqu’à 7 kg de paille par jour. Des génisses d’un an consomment jusqu’à 5 kg, lorsqu’elles y sont bien habituées. Si on peut constater que les animaux «ne mangent rien», c’est d’abord parce que la paille couvre déjà 50 % des besoins énergétiques.
Le problème
de la distribution
Vient ensuite la question de la distribution de la paille… Des râteliers suspendus peuvent-ils faire l’affaire ? Pas complètement, puisqu’il faut avoir en tête que ce sont les vaches dominantes qui seront les premières à se servir. D’autre part, plus on se rapprochera du centre de la boule et plus cela sera compliqué. Tout cela ne favorise pas la consommation avec, en plus, une hauteur variable du fumier. L’une des solutions est de «cracher» avec la pailleuse dans le râtelier pour offrir de la paille en vrac, cela demande pas mal de temps et il est dommage de voir qu’une bonne partie finira dans le fumier…
On peut donc opter pour un râtelier au sol. Sa limite est toutefois de faire prendre à la paille l’odeur du fumier, ce qui en diminue la consommation. Reste enfin la mélangeuse – et son coût de 45 000 € et le fuel pour son fonctionnement –, pour déchiqueter et mélanger. Mais vu le volume occasionné par la paille importante à mélanger, on met moins de paille qu’il ne faudrait.
La distribution à l’auge de la paille, comme on le fait pour le foin, pose néanmoins la question de l’enlèvement des refus, mais elle reste toutefois le meilleur moyen d’une consommation abondante. Autre problème, et il est de taille, la conception des nouveaux bâtiments ne prend pas souvent en compte la paille alimentaire. Cette question est pourtant à soulever et à solutionner dans chaque élevage. Sur un projet neuf, cela occasionne parfois un peu de dépenses supplémentaires et l’économique reprend le dessus. À tort.