La petite cuisine de Sana Terra pour garantir la qualité à ses acheteurs
C’est une activité qu’on lui connait moins que la collecte de céréales, l’activité d’approvisionnement ou de semences, mais qui fait pourtant l’une des particularités de la coopérative Sana Terra, et pas des moindres : la pomme de terre. Ses clients ? Des industriels spécialisés dans la fabrication de frites et de chips.
C’est une activité qu’on lui connait moins que la collecte de céréales, l’activité d’approvisionnement ou de semences, mais qui fait pourtant l’une des particularités de la coopérative Sana Terra, et pas des moindres : la pomme de terre. Ses clients ? Des industriels spécialisés dans la fabrication de frites et de chips.
Parmi les 800 adhérents de la coopérative Sana Terra, 120 font de la pomme de terre. Répartis sur deux bassins de production – l’Amiénois et le Santerre -, leur nombre est aujourd’hui «stable», selon Romaric Ruin, en charge de l’activité pommes de terre. «Nous sommes toujours preneurs d’hectares, mais nous cherchons une certaine stabilité. Faire de la pomme de terre, ce n’est pas simple. En nous appuyant sur des producteurs que nous connaissons bien, nous pouvons leur proposer un accompagnement spécifique qui permet à chacun de s’y retrouver, agriculteur comme coopérative», expliquait-il en milieu de semaine dernière. Alors que les plantations sont bel et bien terminées, les mois d’avril, mai et juin restent pourtant «cruciaux» pour la coopérative et ses adhérents producteurs de pommes de terre : c’est en effet pendant ce trimestre que les industriels spécialisés dans la fabrication de chips sont pleinement mobilisés à la fabrication. «On livre des pommes de terre toute l’année, mais il est vrai que ces trois mois sont particulièrement intenses», décrit Romaric Ruin.
Un rôle d’entremetteur
Comme en matière de céréales, la coopérative joue le rôle d’entremetteur entre les producteurs de pommes de terre et les industriels spécialisés dans la transformation. Cette mécanique repose sur une double contractualisation : entre la coopérative et un producteur, d’une part ; entre la coopérative et son acheteur industriel, d’autre part. «On retrouve en pommes de terre comme en céréales le principe fondateur d’une coopérative, rappelle Jean-François Florin, son directeur. C’est de proposer des débouchés de manière à apporter la meilleure valorisation des productions aux adhérents».
«Au moment où le contrat est signé avec le producteur, il y a un engagement sur la variété, sur le volume à livrer, mais pas sur la destination puisque celle-ci peut changer en fonction de la qualité, ajoute Romaric Ruin. On a évidemment des grandes lignes, mais les choses s’affinent pendant la campagne.» «Cela peut s’apparenter à un jeu de chaises musicales entre les lots, mais c’est le rôle du metteur en marché», reprend M. Florin.
80 % des volumes produits pour Sana Terra par ses agriculteurs-coopérateurs prennent la direction de la Belgique. Ces clients ont des noms bien connus des amateurs de produits à base de pommes de terre et de snacking : Mydibel pour la frite ; Lays, Brets ou encore Croky – pour ne citer qu’eux – pour la chips qui se présente comme le débouché le plus important. Les 20 % restants se répartissent entre l’Espagne, la France, l’Italie, le Portugal ou encore la Grèce. Entre juillet 2019 et juin 2020, Sana Terra a commercialisé quelque
90 098 tonnes de pommes de terre. Pour la campagne en cours, elle vise sans sourciller «les 100 000 tonnes», selon Romaric Ruin, «malgré des conditions d’arrachage difficiles à l’automne 2020 et des problèmes de qualité dus à la sécheresse».
Une qualité suivie du champ à l’entrée de l’usine
Pour répondre à la demande de clients industriels spécialisés dans la transformation de pommes de terre en frites et en chips, Sana Terra affiche un niveau d’exigence élevé qui ne surprend pas les initiés du métier. «La fabrication de chips est celle qui demande le plus haut niveau de qualité de pommes de terre, devant la frite et le flocon» détaille ainsi Jean-François Florin. La coopérative dispose de son propre laboratoire dédié au contrôle qualité ; une «cuisine» en réalité, installée dans une annexe du siège de la coopérative, à Rosières-en-Santerre où l’on y effectue une batterie de tests : matière sèche, calibrage, traces d’endommagement, taux de sucre, cuisson. Avant récolte, un suivi est également assuré, et il débute dès les premiers arrachages : calibre, matière sèche sont ainsi consignés. Puis vient l’étape délicate du stockage : «Les premiers prélèvements en bâtiments ont lieu quinze jours après récolte, explique Aurélie Pernel, responsable qualité. On regarde l’état sanitaire général du tas, la germination, la température… Si un lot est conservé à une température trop basse, les tubercules vont se détériorer et ne cuiront pas.»
L’interdiction du CIPC est venue depuis s’ajouter aux contraintes : «On a des produits de substitution, mais tous n’ont pas encore fait leurs preuves. L’efficacité est variable d’un bâtiment à l’autre et, pour certains produits, il y a aussi des soucis de disponibilité. Au moment d’ouvrir un bâtiment, on n’est pas à l’abri d’une mauvaise surprise», constate M. Ruin. L’ensemble des tests réalisés par la coopérative, à l’attention de ses clients, permet aux pommes de terre cultivées dans la Somme d’être «100 % traçables, du champ jusqu’à la porte de l’usine», se félicite-t-on chez Sana Terra.
Satisfaction et fidélité
Côté agriculteurs, parmi les arguments en faveur du contrat «pommes de terre» que la coopérative propose, Jean-François Florin, cite en premier lieu le prix : «Quand on regarde bien, il n’y a pas de différence entre le prix que nous proposons et celui qu’un industriel proposerait à un agriculteur en direct». Sana Terra, c’est ensuite «un service de proximité avec une équipe dédiée», «un accompagnement technique», des «solutions pour tous les lots, un paiement à l’heure…» égrène M. Florin. Sans oublier la fourniture des plants et l’accompagnement de la coopérative pour l’obtention des certifications imposées par ses clients, VVA et Global Gap en tête.
Si le directeur de la coopérative est aussi précis et loquace, c’est parce qu’on a conscience chez Sana Terra d’évoluer sur un marché très concurrentiel avec des transformateurs qui n’hésitent pas à acheter directement chez les producteurs, ou d’autres entreprises qui font le même métier. «Notre responsabilité est d’amener la qualité attendue au bon moment à un acheteur. Si nous n’y arrivons pas, nous perdons notre raison d’être», décrit le directeur de Sana Terra, plutôt confiant dans l’avenir de ce segment de marché : «Un client satisfait est un client fidèle. Ce que nous aimons par-dessus tout, c’est quand on est appelé par de nouveaux clients…»