Le lin bio face au défi du désherbage
La Chambre d’agriculture de la Somme et la coopérative linière Calira présentaient, en ce milieu de semaine, différentes méthodes de désherbage des linières cultivées en agriculture bio. Une synthèse de ces essais devrait être prochainement publiée.
La Chambre d’agriculture de la Somme et la coopérative linière Calira présentaient, en ce milieu de semaine, différentes méthodes de désherbage des linières cultivées en agriculture bio. Une synthèse de ces essais devrait être prochainement publiée.
Renouée liseron, mercuriale, fumeterre, chénopode ou encore morelle ne font pas forcément bon ménage avec le lin qui, à l’image d’autres cultures, n’aime pas la concurrence pour se développer. La présence de ces adventices est d’autant plus à proscrire qu’elle peut avoir des incidences sur la qualité du produit fini, comme sur le rendement de la linière. Mardi 28 juin, au milieu d’une parcelle de lin bio cultivée par Guillaume Roussel à Hiermont, Fabien Leroy (Calira) rappelait ainsi que la présence de renouée liseron dans un lot de fibres de lin va «entraîner son déclassement». Pour détecter sa présence au cours du processus de teillage, rien de plus simple : «C’est comme si l’on avait un fil rouge au milieu des fibres. Quand un acheteur voit cela, le prix auquel il va acheter la fibre baisse automatiquement.» La présence de morelle noire dans une balle de lin va, quant à elle, entraîner une perte de fibres à teiller au moment de l’opération. Pour éviter ce genre de désagrément, la solution consiste à lutter autant que possible au champ contre la présence d’adventices à la différence qu’en bio, l’utilisation de solutions chimiques est proscrite.
Huit modalités testées
Dans le cadre d’un Appel à initiatives pour le développement de l'agriculture biologique (AIDAB) financé par la Région Hauts-de-France et l’Agence de l’eau, la Chambre d’agriculture de la Somme et la coopérative linière ont mis en place, cette année, une parcelle d’essais destinées à mesurer l’efficacité de plusieurs modalités de désherbage mécanique. «L’idée est d’évaluer différentes méthodes et combinaisons en regardant l’efficacité sur les mauvaises herbes», résume Alain Lecat, conseiller Bio du service «productions végétales» de la chambre d’agriculture. Huit itinéraires de désherbage sont ainsi testés, avec ou sans faux semis préalable, avec ou sans utilisation d’une herse étrille à câble, avec ou sans l’utilisation d’une bineuse équipée d’une caméra… et, enfin, un témoin non désherbé «pour évaluer l’incidence de chaque modalité les unes par rapport aux autres», décrit Alain Lecat. D’après les premiers résultats, on constate que l’efficacité du désherbage est variable en fonction des modalités testées puisqu’elle oscille entre 35 % et 70 %. Les plus mauvais résultats sont obtenus par la solution «binage seul» (35 %) tandis que les modalités «herse étrille + binage» font apparaître la meilleure efficacité (70 %). Toutefois, les modalités les plus efficaces à l’œil nu sont aussi celles qui sont les plus agressives avec des pourcentages de pertes de pieds comprises entre 2,8 et 5 % lors du premier passage des outils mécaniques (herse + bineuse) et 14,8 et 28,5 % lors du second passage. La palme de la modalité la plus destructrice revient toutefois à l’utilisation de la bineuse seule, ce qu’Alain Lecat explique «par un défaut de réglage», sans vouloir remettre en cause l’efficacité de l’outil.
Impact mesuré au teillage
À l’heure de la récolte, des relevés seront également réalisés pour mesurer l’impact des adventices sur le rendement et la qualité du lin. Pour la chambre d’agriculture, comme pour la Calira, la gestion de l’enherbement reste bien «le principal sujet» en production de lin bio : «Les maladies sont plutôt bien gérées, constate ainsi Vincent Lesenne, conseiller technique de la Calira. Les liniculteurs bios font le pari de semis un peu plus tardifs pour éviter la pression des ravageurs. Les mauvaises herbes, c’est autre chose. Cela peut remettre en cause l’arrachage d’une linière.»
Utile aussi pour le lin conventionnel
Les essais désherbage conduits en agriculture bio n’intéressent pas seulement les agriculteurs convertis. «Cela fait déjà quelques années que l’on s’intéresse au désherbage mécanique y compris en conventionnel», rappelle en effet Vincent Lesenne. Ce que confirme Fabien Leroy : «On n’a plus vraiment le choix. Quand on voit que certains produits perdent leur efficacité contre les graminées malgré des passages répétés, il faut trouver d’autres solutions.» Et le recours au désherbage mécanique en fait partie.