Céréales
Le marché des orges brassicoles chamboulé par les tensions
Après les tensions diplomatiques entre Chine et Australie, la guerre en Ukraine chamboule encore plus le marché des orges brassicoles, a souligné un colloque le 5 avril de l’institut technique Arvalis.
Après les tensions diplomatiques entre Chine et Australie, la guerre en Ukraine chamboule encore plus le marché des orges brassicoles, a souligné un colloque le 5 avril de l’institut technique Arvalis.
L’accident climatique n’est pas permis concernant la récolte 2022. Cette alerte du directeur général de Granit Négoce, Julien Darley, pointe un «équilibre fragile entre l’offre et la demande» mondiale d’orges de brasserie. Petit retour en arrière sur la récolte 2021. Une terrible sécheresse a frappé le Canada, dont la production fourragère et brassicole est descendue à 6,95 Mt d’orges (contre 10,7 Mt l’année précédente). De belles récoltes ailleurs l’ont compensé, notamment en Ukraine (9,9 Mt contre 7,9 Mt) et surtout dans l’hémisphère Sud avec l’Argentine (5,2 Mt contre 3,8 Mt) et Australie à un niveau record (13,7 Mt contre 13,1 Mt). Mais la campagne 2021-2022 s’achève sur «un bilan mondial tendu», le stock de report s’établissant à 21 Mt d’orges, soit moins de 15 % de la consommation.
Des flux inédits
Sur le marché brassicole, des flux inhabituels ont vu le jour. La carte des échanges montre habituellement la Chine qui importe d’Europe, du Canada, d’Australie. «Là, c’est parti dans tous les sens», décrit Julien Darley. En cause, des tensions diplomatiques entre Pékin et Canberra. L’Australie a réorienté en 2020-2021 ses exportations d’orges brassicoles (650 000 t) vers l’Amérique du Sud, l’Amérique du Nord, l’Europe, un fait «exceptionnel».
La récolte 2022 est aujourd’hui incertaine. D’autant plus avec la guerre en Ukraine. Et il est encore tôt pour juger de la production dans l’hémisphère Sud, où la moisson intervient tardivement. Dans l’hémisphère Nord, le Canada est attendu à 10,4 Mt d’orges fourragères et brassicoles. Une prévision susceptible d’être changée : si le Manitoba profite d’importantes chutes de neige, d’autres bassins importants, les États du Saskatchewan, et de l’Alberta, connaissent un temps sec. Dans l’hémisphère Sud, l’Australie est prévue à 11 Mt. Mais l’orge y subit la concurrence du canola, qui se vend très cher, note Julien Darley. En Argentine, la récolte est annoncée à 5,2 Mt, avec des surfaces d’orges en hausse de plus de 10 %. Cette culture a la cote dans le pays : elle est souvent en double culture avec le soja, dont la demande est soutenue. L’orge est aussi moins touchée que le blé par l’interventionnisme de l’État, souligne-t-il, les agriculteurs contestant des taxes à l’export. Reste la principale inconnue de 2022-2023 : l’Ukraine pourra-t-elle exporter des orges fourragères ? Si la réponse est non, le bilan mondial sera largement déficitaire : il manquera 2,5 Mt. Ce qui fait dire à Julien Darley que «la demande fourragère sera le premier concurrent de l’orge de brasserie». Et de souligner l’importance d’avoir des primes brassicoles élevées pour soutenir ce marché.