Les Français satisfaits des communes rurales
Une enquête de l’Observatoire de la démocratie de proximité AMF-Cevipof/Sciences Po, commandée par l’Association des maires de France, montre que les communes rurales apportent satisfaction à leurs habitants. 45 % des répondants préfèrent ainsi vivre à la campagne.
Il existe en France une forte demande de ruralité. Une récente enquête(1), commandée par l’Association des maires de France, montre que le rural est bien plus demandé par les Français que l’urbain et qu’en milieu urbain les villes moyennes sont bien plus attractives que les villes de 200 000 habitants et plus.
45 % des enquêtés répondent préférer vivre «à la campagne», 41 % «dans une ville moyenne» et 13 % seulement «dans une métropole». Autre enseignement, la sédentarité est plus forte dans les grandes villes que dans les petites communes rurales. 10 % des enquêtés vivant dans des communes de moins de 500 habitants disent y avoir toujours vécu alors que la proportion d’habitants des villes d’au moins 200 000 habitants qui déclarent y avoir toujours vécu est de 28 %. C’est bien le rural et non l’urbain qui est un territoire de mobilité. «On est ici au cœur de la nouvelle dynamique du rural, attirant autant pour son cadre de vie que pour son coût immobilier plus bas, des populations dont les demandes et les attentes ne sont plus celles des habitants habituels des campagnes : agriculteurs, artisans ou commerçants. Le renouvellement démographique du rural est alimenté autant par la recherche d’un meilleur cadre de vie que pour des raisons pratiques tenant à la qualité des écoles ou à la modération des prix», explique Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS et au Cevipof/Sciences Po.
Les Français sont, par ailleurs, très attachés à leur commune, quelle que soit la taille. La commune arrive toujours en seconde position (entre 68 à 70 % d’attachement) derrière la France qui obtient une moyenne de 76 % d’attachement, mais bien avant les intercommunalités auxquelles seuls 33 % des enquêtés se disent attachés. Ainsi, l’idée de créer de grandes communes ou de transférer de nouvelles compétences aux intercommunalités est assez vivement rejetée dans les communes rurales. Malgré l’absence de certains services de proximité, il n’y a pas de demande de fusion ou de renforcement des intercommunalités puisque 43 % des habitants en milieu rural estiment que leur commune devrait rester comme elle est, en gardant ses compétences actuelles de proximité et que 25 % demandent même qu’elle retrouve plus de compétences par rapport à l’intercommunalité.
Une proximité génératrice de confiance
L’atout de la commune, c’est la proximité. On retrouve ce paramètre dans la confiance envers le personnel politique. Plus l’élu est proche, plus la confiance est élevée. Les Français disent avoir tout à fait ou assez confiance en leur maire à proportion de 71 % (79 % pour les communes de moins de 500 habitants) contre 55 % en leur conseiller départemental, 49 % en leur conseiller régional, 40 % en leur député et 36 % en leur sénateur. Le maire est réputé compétent (il connaît ses dossiers), et proche de ses concitoyens. Cette proximité en milieu rural se traduit également par le fait que 46 % des enquêtés des communes de moins de 500 habitants ont souvent eu l’occasion de contacter leurs élus municipaux (contre 16 % des enquêtés dans les villes de 30 000 habitants et plus) et que 42 % ont eu également souvent l’occasion de contacter les services municipaux (contre 24 %).
Enfin, dernier enseignement de l’enquête, une grande majorité des habitants des communes de moins de 500 habitants se disent satisfaits de leur maire. Le bilan de la municipalité est jugé bon à 60 % (contre 44 % dans les villes de plus de 30 000 habitants et à 39 % dans les villes de 200 000 habitants). Un résultat qui contraste avec le fait que la moitié des maires des communes de moins de 500 habitants ont l’intention de ne pas se représenter aux élections municipales de 2020.
(1) Enquête de l’Observatoire de la démocratie de proximité AMF-Cevipof/Sciences Po
Le numérique, une chance pour les zones rurales ?
Les campagnes pourraient retrouver leur attrait grâce au numérique. Des exemples concrets montrent que le développement des réseaux numériques dans les zones rurales favorise une demande sociétale davantage en phase avec la vie à la campagne que dans les grands centres urbains comme le télétravail. De la même façon que la révolution industrielle au XIXe siècle, la révolution numérique que nous vivons aujourd’hui change les rapports sociaux, a estimé Valérie Jousseaume, géographe et chercheuse au CNRS, au colloque organisée par Sol et Civilisation et Agridées, sur le thème «Numérique et ruralité, nouveaux liens et mutations dans les territoires», le 7 novembre, à Paris. D’une société paysanne, nous sommes ainsi passé à une société urbaine à partir du XIXe siècle. En effet, la population s’est concentrée dans les zones industrielles, alors qu’elle était disséminée dans les campagnes auparavant. La nouvelle ère dans laquelle nous sommes entrés, à l’aube des années 1990 que Valérie Jousseaume appèle «la noosphère», c’est-à-dire l’ère de la pensée humaine connectée, porte en germe une nouvelle société dont on peut déjà observer les prémices. Désormais, la population augmente en dehors des grands centres urbains. Et la révolution numérique n’y est pas pour rien dans cette évolution, grâce à l’apport de nouveaux services dans des zones rurales qui en étaient jusqu’alors dépourvues.
Nouveaux services
Dans le Cantal par exemple, la mobilisation du Conseil départemental dans le numérique via le plan CyberCantal a favorisé le développement de la télémédecine, la mise en place de classes partagées virtuelles dans les établissements scolaires, la diffusion du télétravail avec même la création de lieux d’accueil pour les télétravailleurs dans les zones rurales. Dans l’Aveyron, la petite commune d’Arvieu (840 habitants) s’est mise à l’heure du numérique. Initié par des jeunes et des élus, le développement du réseau numérique a attiré trente nouvelles familles et a permis de revitaliser le territoire et de créer de nouveaux liens sociaux. La Poste n’est pas en reste : elle offre de nouveaux services aux ruraux pour pallier l’effondrement du courrier. En effet, le nombre d’envois de lettres a été réduit de moitié en dix ans, passant de 18 milliards de plis en 2018, l’année record, à 9 milliards en 2018. Ainsi a-t-elle mis en place des formations au numérique sanctionnées par des certifications, développé des services aux équipements en numérique des personnes agées, associé professionnels de santé pour héberger les données médicales des patients... Il est même possible de passer son Code de la route sur internet grâce à la Poste. Il n’en reste pas moins que la diffusion de toutes ces données numériques n’est pas sans risque pour la liberté individuelle et notre souveraineté. Aussi convient-il d’être vigilant sur la gouvernance. Jean-Luc Sallaberry, chef du département numérique à la Fédération des collectivités concédantes et régies, plaide pour la mise en place d’un service public des données numériques pour d’échapper à la tutelle des géants du numérique, les fameux GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon).