Coopération
Les jeunes agriculteurs prendront-ils les rênes des coopératives ?
Pour les coopératives, le renouvellement des exploitations et l’adaptation des modèles aux nouvelles générations sont des enjeux majeurs. Lors de leurs AG 2023, plusieurs d’entre elles proposaient un débat sur le sujet, dont Noriap.
Pour les coopératives, le renouvellement des exploitations et l’adaptation des modèles aux nouvelles générations sont des enjeux majeurs. Lors de leurs AG 2023, plusieurs d’entre elles proposaient un débat sur le sujet, dont Noriap.
«La coopérative, c’est la base de l’agriculture. Elle vit parce que des gens s’impliquent dedans. Je vois ça comme un devoir», témoigne Etienne Fourmont, éleveur laitier à Viré-en-Champagne (72), plus connu sous le pseudo Agri youtubeurre. Ce 15 décembre, il faisait partie des invités à une table ronde, lors de la réunion d’information de Noriap. En marge de son assemblée générale, la coopérative samarienne s’emparait, comme d’autres coopératives du secteur, du sujet du renouvellement des générations en agriculture et dans les rangs des OPA (Organisations professionnelles agricoles).
Il faut dire que le dossier est brûlant. D’après le recensement général de l’agriculture de 2020, 58 % des chefs d’exploitations et co-exploitants ont plus de cinquante ans. Le renouvellement des exploitations et l’adaptation des modèles aux nouvelles générations sont donc des enjeux majeurs. «Mais il y a un gros travail de fond à mener pour donner envie aux jeunes de s’impliquer», fait remarquer Etienne Fourmont.
Un sujet dont le monde de la coopération veut s’emparer. La Coopération agricole a d’ailleurs mené l’action «à la rencontre des Jeunes en 2023 : pour une nouvelle France alimentaire», qui a réuni huit-cents jeunes dans six villes autour d’un dispositif original : les jeunes discutaient entre eux de l’avenir de l’alimentation. «Il y a un décalage énorme entre ce que cette jeunesse perçoit de l’agriculture, et la réalité de nos productions. Pourtant, ce sont les citoyens de demain, les consommateurs de demain, nos collaborateurs de demain, les agriculteurs de demain», remarque Dominique Chargé, président, invité ce 15 décembre. Autre tendance relevée, «l’éco-anxiété» alimentée par les réseaux sociaux. D’où un «besoin de transparence sur les moyens de production, sur les produits qu’ils consomment».
Quentin Thibaut, jeune installé en polyculture et élevage porcin à Ailly-sur-Somme (cinq associés et quatre salariés) pointe pour la nouvelle génération d’agriculteurs le flou qui peut entourer la vision de la coopérative. «On peut avoir du mal à s’y retrouver parce qu’on n’a pas créé l’outil. Certaines sont de grosses structures que l’on n’a pas vu évoluer.» Lui assure pourtant que les jeunes ont toujours des attentes quant au travail en collectif. Lui a d’ailleurs mené à bien un projet de méthanisation à la ferme, grâce au fonctionnement en Gaec. «Il y a un gros travail à mener sur les filières, et leur développement à l’échelle territoriale. On a besoin d’expertise, pour adapter notre manière de produire au changement climatique, aux marchés… bref, pour apporter de la résilience à nos exploitations. La coopérative doit nous permettre de rester acteur du début à la fin, mais de ne pas avancer seul.»
Les jeunes agricultrices aussi
L’engagement d’une certaine partie des jeunes est un plus gros défi à relever encore : celle des jeunes agricultrices. Certaines coopératives prennent le sujet à bras le corps. C’est le cas à la coopérative vendéenne la Cavac, avec la création des Bottées, un groupe de «positives agricultrices, bien dans leurs bottes», comme elles se définissent. L’une d’elles, Delphine Chamard, installée depuis 2019 en polyculture-élevage en Charente-Maritime, témoignait ce 15 décembre. Pour elle, le monde agricole se féminise de plus en plus, mais cela ne se traduit pas dans la gouvernance des OPA. «Le souhait est de féminiser les instances de décision. On y entre avant tout parce qu’on a des compétences qu’on veut mettre au service de la coop.» Pour leur donner davantage l’envie et la possibilité d’y entrer, Delphine donne quelques pistes : «accompagner la prise de confiance, la légitimité, adapter les horaires des réunions pour pouvoir les concilier avec une vie de famille…» Des idées à développer.
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