Les mesures Ayrault pour soutenir la compétitivité des entreprises
Le Premier ministre a annoncé un plan d’allègement du coût du travail financé notamment par la fiscalité.
aux médias l’impact de la loi finances sur l’emploi saisonnier.
Une bonne et une mauvaise nouvelle : la bonne, l’agriculture devrait profiter pleinement du dispositif de crédit d’impôt pour la compétitivité des entreprises. C’est le ministre de l’Agriculture qui l’a affirmé le 6 novembre dans un communiqué, peu après les déclarations de Jean-Marc Ayrault présentant son plan inspiré du rapport Gallois. Les industriels de l’agroalimentaire en bénéficieront aussi, par évidence. La mauvaise nouvelle : il faudra attendre 2014 pour vraiment en profiter et donc alléger le coût du travail.
Le mécanisme
Quel est le mécanisme qui a été décidé ? En payant leurs impôts en 2014 (sur les résultats de l’exercice 2013), les entreprises bénéficieront d’une baisse d’impôt proportionnelle à la masse salariale concernant les employés payés entre 1 et 2,5 fois le Smic (C’est le CICE, Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi). Le système montera en charge sur trois ans, 10 milliards d’euros la première année, 15 milliards la deuxième, 20 milliards la troisième. Avec 20 milliards d’euros, en régime de croisière, la baisse de coût du travail est estimée à 6% de la masse imposable. Certaines petites entreprises pourront éventuellement se faire préfinancer ce crédit d’impôt auprès de la Banque publique d’investissement, en cours de création. Celle-ci se verra accorder un montant de 500 millions d’euros afin de venir en aide aux petites entreprises qui ont des difficultés de trésorerie. Toutefois, le sentiment général est que l’échéance de 2014 est trop éloignée. Par ailleurs, le mécanisme fera l’objet d’un contrôle à posteriori. «Les marges financières dont les entreprises pourront disposer pour investir ou embaucher au titre du crédit d'impôt doivent être utilisées à bon escient et dans la transparence», a prévenu Jean-Marc Ayrault.
Le financement
Un budget de 20 milliards d’euros sera dégagé par l’Etat pour financer cette mesure. Comment seront-ils financés ? D’une part grâce à des économies sur les dépenses publiques sur 2014. D’autre part, la fiscalité écologique (Tgap par exemple) sera modifiée pour rapporter 3 milliards d’euros supplémentaires. Reste à savoir si les produits agricoles seront touchés par ces changements. Enfin, les taux de TVA seront aménagés autour de trois taux, 20% (au lieu de 19,6%), 10% (au lieu de 7%) et 5% (au lieu de 5,5%). En particulier, la restauration verra son taux de TVA revenir au niveau normal, de 10%.
Les réactions
Pleinement concernées par le problème de la compétitivité, les organisations agricoles n’ont pas tardé à réagir à la mesure. Tandis que les producteurs de fruits protestaient contre le caractère tardif de son application (2014), la présidente des producteurs de légumes ne disait «ni oui ni non. Mais j’attends de voir quelle en sera l’efficacité». Angélique Delahaye craint surtout que cela ne soit l’occasion d’une nouvelle paperasserie «dont on a marre», dit-elle. Les producteurs de fruits et légumes restent sous le coup d’un changement de modalités de l’exonération de charges pour les emplois occasionnels. La réduction de l’assiette de cette exonération venait d’être confirmée à l’Assemblée nationale (voir ci-dessous). Elle sera limitée aux salaires compris entre 1 et 1,5 Smic. « Manque de cohérence » affirme la Fnsea dans un communiqué. Celle-ci rappelle que ce crédit d’impôt ressemble fort à la TVA emploi demandée depuis longtemps par la Fnsea. Mais elle s’étonne de la différence d’assiette : 1-1,5 Smic pour les salariés occasionnels, 1-2,5 Smic pour les salariés permanents. «Comment les agriculteurs peuvent-ils comprendre de telles complexités, de telles différences !» conclut la Fnsea.
ZOOM
Les employeurs agricoles manifestent devant l'Assemblée nationale
A quelques heures de l'ouverture du débat, à l'assemblée nationale, sur la réduction des exonérations de charges sur les emplois saisonniers -prévue dans le projet de loi de finances pour 2013-, près de 350 producteurs de fruits et de légumes, des horticulteurs et des viticulteurs, de toute la France, proches de la Fnsea et des JA, sont venus manifester le 5 novembre leur colère devant le palais Bourbon.
A coup de chrysanthèmes et de paniers de fruits et de légumes, remis aux groupes politiques notamment, ces producteurs spécialisés, qui emploient à eux seuls deux tiers des travailleurs saisonniers agricoles, ont rappelé les conséquences «très lourdes» d'une telle mesure. «J'emploie une quarantaine de saisonniers. Cette réduction va entraîner pour moi une augmentation de 50 à 250 euros par mois et par salarié», a indiqué la présidente des producteurs de Légumes de France, Angélique Delahaye. «La France perd 3000 ha de verger par an, tout ça parce que nous ne sommes pas compétitifs par rapport à nos voisins européens », a poursuivi Luc Barbier de la Fédération nationale des producteurs de fruit (Fnpf).
En fin d'après-midi, une délégation de onze représentants a été reçue pendant plus d'une heure par le directeur de cabinet du ministre de l'Agriculture : «l'échange a été très tendu, a rapporté à la sortie Charlie Gautier de la Fnpf. Le ministère nous a indiqué qu'un groupe de travail réunissant Fnsea et services techniques du ministère serait constitué pour recalculer, ensemble, l'impact sur les producteurs d'une telle mesure. Ce n'est évidemment pas suffisant».
Au terme d’un débat houleux à l’Assemblée nationale le 6 novembre, les agriculteurs n’ont pas obtenu ce qu’ils voulaient. La réduction des exonérations des charges pour les travailleurs occasionnels (article 60) a été votée.