L’espoir de jours meilleurs avec la certification HVE
Lors de l’étape amiénoise de sa tournée des régions, l’AGPB est revenue sur les raisons qui doivent inciter les producteurs de céréales français à s’engager dans une démarche de certification environnementale de type HVE.
En matière de lutte contre le réchauffement climatique, l’AGPB et son président Éric Thirouin n’ont de cesse de le souligner depuis plusieurs mois, y compris auprès d’un public de convaincus, que «l’agriculture est la solution, pas le problème». Dans le projet stratégique que l’organisation qui représente les producteurs de grandes cultures a présenté le 3 mars aux élus de la FRSEA Hauts-de-France et représentants d’OPA, l’ambition de l’AGPB de «reprendre en main la communication pour expliquer nos métiers» figure noir sur blanc. Pour réaliser cette ambition, la certification Haute valeur environnementale (HVE) est le moyen privilégié par l’AGPB. «Nous sommes convaincus que la certification HVE est une opportunité», défend Éric Thirouin. Secrétaire général de l’organisation, Philippe Heusele partage l’analyse : «La HVE doit être un moyen de montrer que les agriculteurs français s’engagent dans la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires. Cela nous donne un indicateur et c’est en même temps un bon outil de communication.»
Maintenir un certain montant d’aides
Seulement, à bien y regarder, il ne s’agit pas seulement d’une question de communication. S’engager dans une démarche HVE permettrait aux céréaliers de ne pas laisser trop de plumes avec l’entrée en vigueur de la nouvelle Pac. L’AGPB entend, en effet, profiter du dispositif Ecoscheme de la future Pac pour espérer maintenir les aides versées aux céréaliers à un niveau proche de celui qu’ils touchent actuellement, et «comparable aux autres céréaliers européens», explique Philippe Heusele. Le rôle de la certification HVE dans ce schéma serait alors de justifier auprès des autorités européennes de l’engagement environnemental des agriculteurs français. Pour une exploitation de 200 hectares, sans la certification HVE et sans dispositif Ecoscheme, l’AGPB estime que le montant des aides Pac perdu par un agriculteur entre 2019 et 2027 serait de 85 € par hectare. Avec la certification HVE reconnue comme pouvant faire partie du dispositif Ecoscheme, le montant des aides Pac perçu serait de 190 € par hectare, soit une perte de «seulement» 10 € par hectare.
Uniformisation des démarches qualité
Président de Coop de France Hauts-de-France, Bertrand Magnien juge l’engagement dans la certification HVE quasiment incontournable : «Si nous ne nous engageons pas dans la HVE 2, ce sont nos clients qui vont nous l’imposer...» Et si l’engagement dans ce type de démarche peut faire peur, Rémi Haquin (AGPB) se montre rassurant :«Il s’agit d’abord d’une obligation de moyens et une manière de faire connaître nos savoir-faire.»
Président de la FRSEA Hauts-de-France, Laurent Degenne partage l’objectif : «Nous sommes toujours en train de jouer en défense, mais cela est en train de changer. Nous avons des compétences qu’il faut montrer face à une minorité qui nous en veut et qui n’y connaît rien à notre métier.»
Le 10 mars, lors de la dernière session de la Chambre d’agriculture de la Somme - le sujet s’est invité au travers d’une motion -, c’est le président de la coopérative Noriap, Jean-François Gaffet qui est revenu sur les bénéfices de la démarche : «La certification HVE a vocation à uniformiser tout un tas d’autres démarches qualité, et concerne plusieurs filières (…) Chez Noriap, c’est quelque chose que nous travaillons déjà et qui nous a déjà permis de survaloriser des céréales, notamment à l’export.» Concernant la mise en place de la certification HVE dans les exploitations, l’AGPB se montre, quant à elle, «optimiste» : «La mayonnaise commence à prendre dans les différentes régions», s’est réjouit Philippe Heusele, le 3 mars. Un sentiment confirmé par les chiffres dévoilés récemment par le ministère de l’Agriculture (lire encadré).
Avec les ZNT, des surfaces vouées à la jachère ?
À l’heure des semis de printemps, les agriculteurs mettent en place les zones de non-traitement (ZNT) instaurées par un arrêté et un décret parus le 29 décembre au Journal officiel. Elles peuvent être cultivées, mais ne doivent pas être traitées, souligne-t-on à Arvalis. Dans les faits, leur mise en jachère semble «probable» en grandes cultures, d’après l’institut. La coopération agricole est plus catégorique. Ces ZNT sont «impropres à la production», explique Antoine Hacard, président du pôle Métiers du grain et aussi à la tête du conseil d’administration de la coopérative marnaise Cérèsia. Ne disposant d’aucun produit désherbant, fongicide ou insecticide, le céréalier ne va pas cultiver de telles bandes de 3 mètres, selon lui. Il risque de voir les adventices salir le reste de la parcelle et contaminer la récolte. Depuis le 1er janvier, une distance de 5 mètres est instaurée entre les zones d’épandage de phytos et les «zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties à usage d’agrément contiguës». La mesure s’applique à compter du 1er juillet pour les cultures ensemencées cet hiver. Dans le cadre de chartes d’engagement, et à l’exception des produits les plus préoccupants, la limite peut être réduite à 3 mètres «à condition d’avoir recours à des matériels de pulvérisation les plus performants». Une condition «assez facile» à remplir, selon Antoine Hacard : «Ce n’est qu’un jeu de buses à changer» et une part significative des agriculteurs en sont déjà équipés.