Mercosur : l’inquiétude du monde agricole
Malgré l’annonce du gouvernement «de ne pas signer en l’état» l’accord du Mercosur, les inquiétudes restent grandes dans le monde agricole. Point de
situation sur cet accord de libéralisation commerciale dont l’avenir pourrait dépendre de la COP 26 de Glasgow.
Malgré l’annonce du gouvernement «de ne pas signer en l’état» l’accord du Mercosur, les inquiétudes restent grandes dans le monde agricole. Point de
situation sur cet accord de libéralisation commerciale dont l’avenir pourrait dépendre de la COP 26 de Glasgow.
Le ministre délégué au Commerce extérieur et à l’Attractivité, Franck Riester, l’a clairement indiqué le 4 février au soir, à l’issue d’une réunion du comité de suivi de la politique commerciale, rassemblant élus, fonctionnaires, ONG, syndicats et patrons ou responsables de filières économiques : «La France ne signera pas l’accord du Mercosur en l’état». La raison principale est connue : «nous ne voulons pas que ces accords, permettant notamment plus d’exportations vers l’UE de viandes et produits agricoles du Mercosur, entraînent plus de déforestation», a en substance indiqué le ministre.
Double langage
Cependant, cette annonce ne réjouit pas la Fédération nationale bovine (FNB) qui a une lecture assez différente de cet accord : «Le gouvernement ferme la porte à toute renégociation du contenu de l’accord pour imposer aux pays du Mercosur les exigences environnementales et sanitaires qu’il affiche dans sa communication, en France», a indiqué l’association spécialisée de la FNSEA, le 5 février. Son président, Bruno Dufayet, l’accord du Mercosur «est une catastrophe car il accepte l’importation en Europe de 99 000 tonnes de viande bovine du Mercosur à 7,5% de droit de douane, avec des normes sanitaires de production interdites en Europe». Plus prosaïquement, la FNB et l’interprofession (Interbev) dénoncent le double langage du gouvernement qui pose des conditions sur le plan environnement mais refuse d’ouvrir des négociations pour exiger la prise en compte de ces conditions. Les éleveurs de bovins craignent aussi que la France ne perdre son «droit de veto» lors du vote sur l’accord du Mercosur quand il passera au Conseil européen. Or, il n’y a «aucune réaction de la part du gouvernement», s’étrangle la FNB. Elle rappelle la nature juridique «mixte» de l’accord d’association avec le Mercosur en mai 2018, qui garantit un pouvoir de blocage à chaque État membre.
99 000 tonnes de viande bovine
L’Europe, elle-même divisée sur cet accord, reconnaît du bout des lèvres que «certaines difficultés sont attendues» notamment sur le sucre, la viande bovine et les volailles. Mais les positions de chaque pays semblent varier au fil des mois. À titre d’exemple, en septembre 2020, la ministre allemande de l’Agriculture, Julia Klöckner s’était déclarée «très très sceptiques [sur la ratification de l’accord]. Et je peux véritablement parler pour pratiquement chacun des ministres présents ici», avait-elle indiqué alors que l’Allemagne présidait l’Union européenne. La Chancelière Angela Merkel avait aussi déclaré s’y opposer. Aujourd’hui, le ton semble plus apaisé. Il faut dire que le pays qui entre en campagne électorale a tout à gagner à valider puisque l’accord prévoit de réduire les droits de douane sur les voitures afin d’accroître les exportations européennes d’automobiles vers la région du Mercosur. Or, les Sud-Américains sont très friands des berlines allemandes. En contrepartie, l’Europe accepte, notamment un quota annuel d’importation de 99 000 tonnes de viande bovine sud-américaine.
Ratification
Aujourd’hui le Portugal qui préside l’Union européenne, l’Espagne, l’Italie, l’Estonie et la Suède sont favorables à la ratification de l’accord. Parmi les opposants qui pourraient éventuellement revoir leur position, on compte la Belgique, les Pays-Bas, l’Irlande, la Pologne, la Roumanie, l’Irlande, le Luxembourg, groupe auquel la France pourrait être intégrée. Seule l’Autriche qui compte des Verts dans la coalition gouvernementale est farouchement opposée à l’accord.
«Si le Brésil change ses positions lors de la COP26 [prévue en novembre en Ecosse], cela irait dans le bon sens, mais il faudrait en plus des éléments tangibles de vérification», a temporisé Franck Riester. Reste que cet accord, s’il devait être signé par l’Union européenne, ne pourra entrer en vigueur que s’il est ratifié par les 27 parlements de l’UE.
Le Copa-Cogeca réitère aussi son opposition