Pac : les 28 avancent sur des orientations communes
Les orientations du Conseil devraient être adoptées par les ministres de l’Agriculture, le 19 mars, à Bruxelles.
La présidence bulgare du Conseil de l’Union européenne a élaboré un premier projet de conclusions sur l’avenir de la Pac après 2020, selon lequel les délégations nationales reconnaissent que, «malgré ses nombreux mérites, la Pac pourrait être encore améliorée et sa valeur ajoutée actuelle renforcée en rendant cette politique plus verte, plus simple et plus axée sur les résultats». Un projet qui a été globalement bien accueilli par les experts des Etats membres, réunis, le 5 mars, en Comité spécial agricole.
Ce document a été de nouveau discuté, et amendé, le 12 mars. Puis, une version finalisée devrait être adoptée, lundi 19 mars, à l’occasion de la réunion des ministres de l’Agriculture des Vingt-huit. La Commission européenne doit, quant à elle, adopter ses propositions législatives formelles fin mai-début juin, dans la foulée de celles sur le cadre financier post-2020.
Dans son projet, la présidence bulgare souligne que le modèle de mise en œuvre de la Pac suggéré par la Commission, qui octroie une plus grande marge de manœuvre aux administrations nationales, «doit apporter une réelle simplification et une réduction de la charge administrative», tant pour les agriculteurs que pour les administrations nationales ou régionales.
En outre, les indicateurs que mettra en place la Commission pour le suivi de cette mise en œuvre devront être «simples, réalistes, facilement quantifiables et contrôlables». Sur ce point, la France, la République tchèque, la Roumanie, la Suède et la Finlande ont demandé à la présidence de renforcer le passage sur la simplification dans l’intérêt des agriculteurs et des administrations nationales.
Discussions sur la réserve de crise
Le document bulgare exprime également l’inquiétude des Etats membres quant à «une fragmentation potentielle de la Pac» entre Etats membres. Les Vingt-huit demandent alors à la Commission d’élaborer une «politique agricole véritablement commune», d’assurer des conditions de concurrence équitables dans toute l’Union européenne et de maintenir l’intégrité du marché intérieur.
Le projet de conclusions se félicite de l’intention de la Commission d’explorer des instruments visant à rendre les paiements directs équitables et de les cibler sur les véritables agriculteurs, en mettant l’accent sur ceux qui pratiquent activement l’agriculture pour gagner leur vie, ainsi que sur les jeunes agriculteurs et les petites et moyennes exploitations agricoles.
L’Irlande, soutenue par la France, la Slovénie, l’Autriche et la Grèce, a suggéré que le texte soit plus explicite concernant les incitations pour que les agriculteurs aillent au-delà du socle de base du verdissement.
Concernant la réserve de crise introduite en 2013 pour faire face à des perturbations importantes du marché, mais qui n’a jamais pu être activée, le projet bulgare souligne qu’«une réflexion est nécessaire pour améliorer sa conception afin de faciliter son utilisation». La France, la Roumanie, la Grèce et l’Estonie ont demandé d’y insérer une référence à la gestion pluriannuelle de la réserve de crise.
Les Etats membres souhaiteraient également voir «des documents de programmation simples, permettant une certaine souplesse dans leur conception et des modifications ultérieures».
Enfin, est soulignée la nécessité de prévoir une période de transition «suffisamment longue pour permettre aux Etats membres de s’adapter aux règles de la Pac après 2020 et d’élaborer les documents de programmation correspondants». Un point sur lequel ont insisté la France, Slovénie, l’Italie et Chypre.
Points de discorde sur le budget
A l’instar de la communication de la Commission européenne, qui a volontairement laissé de côté tous les aspects budgétaires en attendant les propositions sur le cadre financier pluriannuel attendues pour le 2 mai, le projet de conclusions ne contient que très peu de références à des éléments de discussion controversés tels que le plafonnement et la dégressivité des paiements directs ou une plus grande convergence des niveaux de soutiens entre Etats membres. Ces aspects restent, à ce stade, du ressort des chefs d’Etat et de gouvernement.
Mais, pour le Danemark, la Suède et les Pays-Bas, le projet va encore trop loin. Ces délégations ont appelé à mettre davantage l’accent sur l’orientation de la Pac vers le marché, et se sont opposés à toute formulation qui préjugerait de l’issue des négociations à venir sur le budget. Au contraire, le Portugal, la Pologne, la Lituanie et la Lettonie ont longuement insisté sur la question de la convergence, demandant à la présidence d’insérer une référence sur la répartition plus équitable des paiements directs au sein des Etats membres et entre ceux-ci.
Les délégations française, portugaise, slovène, finlandaise, slovaque et lituanienne ont également souhaité qu’une formulation plus ferme soit choisie sur le soutien couplé. Une demande à laquelle se sont opposés les Pays-Bas, le Danemark et la Suède.
Les délégations avaient jusqu’au 6 mars pour faire parvenir leurs observations par écrit. Un nouveau texte amendé a été présenté le 12 mars.
Cinq «actions clés» pour une véritable adaptation de la Pac
«La Pac mérite mieux qu’une réformette à la sauvette !», s’est exclamé l’eurodéputé, Michel Dantin (groupe PPE), lors de la présentation, le 6 mars, au Parlement européen, à Bruxelles, des résultats et recommandations du Global Food Forum 2017 organisé les 20 et 21 octobre derniers à Sustana (Italie) par le think tank Farm Europe. Une manière de dénoncer la portée limitée sur le fond de la communication de la Commission de Bruxelles sur l’avenir de l’alimentation et l’agriculture, ainsi que le calendrier - «de la folie» - imposé pour un accord sur la prochaine réforme.
Cinq «actions clés» sont préconisées pour la future Pac par le rapport 2017 de Farm Europe : un plan d’action de six ans pour la performance économique et environnementale (agriculture de précision et outils numériques) ; le renforcement de la résilience des exploitations (boîte à outils de gestion des risques) ; un équilibre territorial garanti (stratégies sectorielles et investissements) ; la coopération au sein de la chaîne alimentaire (politique de concurrence) ; et, globalement, «une relation juste, simple et directe entre la Pac et les agriculteurs avec un cadre juridique européen clair associé».
L’édition 2018 du Global Food Forum aura lieu les 6 et 7 septembre, en Italie, avec pour thème, «Une vision commune pour l’avenir des systèmes alimentaires de l’Union européenne».