Négociations commerciales
Pourquoi les agriculteurs ont encore manifesté hier
A l’issue de la matinée de mobilisation pour une meilleure application de la loi Egalim, mercredi 4 mars, FDSEA et JA ont détaillé leur feuille de route des prochaines semaines sur le sujet.
A l’issue de la matinée de mobilisation pour une meilleure application de la loi Egalim, mercredi 4 mars, FDSEA et JA ont détaillé leur feuille de route des prochaines semaines sur le sujet.
Les négociations commerciales terminées depuis la fin du mois de février ? Oui, en ce qui concerne les marques nationales, « mais celles concernant les marques de distributeurs se poursuivent et ce n’est pas négligeable », expliquait Denis Bully, le président de la FDSEA 80, il y a quelques jours.
Après avoir conduit une délégation d’agriculteurs pour protester dans une enseigne de grande distribution à Abbeville et supervisé deux autres opérations à Amiens sud et Péronne, l’agriculteur d’Heucourt-Croquoison assurait « vouloir ne pas relâcher la pression ».
Trois points de mobilisation
A Intermarché Abbeville, une trentaine d’agriculteurs affiliés à la FDSEA et aux JA ont ainsi symboliquement recouvert d’un film plastique les rayons de produits frais, mercredi matin. Des bâches qui ont ensuite servi d’écriteaux à des slogans traduisant leur désarroi et leurs questionnements : « Faire plus de 65 heures par semaine, pour gagner moins d’un SMIC, vous iriez travailler ? » « Où va l’argent ? » en référence à la répartition des marges, pouvait-on ainsi lire.
A Péronne, dans un autre magasin Intermarché, ou encore à Auchan Dury, ils étaient autour d’une vingtaine, avec la même détermination et les mêmes banderoles.
"Il faut que les actes dépassent les paroles", Denis Bully, président de la FDSEA 80
Toutes les filières sont touchées
Fin de matinée, c’est chez un éleveur laitier de l’ouest du département, à Huchenneville que l’opération de sensibilisation devait se poursuivre au travers d’une conférence de presse. « Nous vendons notre lait au même prix qu’il y a 30 ou 40 ans. Ce n’est pas normal », exprimait pour sa part, Dominique Dangreville, éleveur à Saint-Riquier.
Aux sceptiques, Valentin Crimet, président de l’Union des producteurs de lait de Picardie (UPLP), tend sa dernière paie : « En janvier 2021, le prix de base de mon lait est de 320 euros les 1000 litres. En 2001, il était de 310 euros les 1000 litres. Cela veut dire qu’en 20 ans, il n’a augmenté que d’un centime par litre… » Les charges, elles, ont considérablement augmenté.
C’est cela aussi qu’ont voulu dénoncer les agriculteurs. Car dans ces conditions, difficile d’envisager le renouvellement des générations, un sujet pourtant majeur et plus que jamais d’actualité : « Quand on est jeune installé ou qu’on a le projet de le faire, les prix du lait comme celui des céréales n’encouragent pas vraiment », témoigne Elie Vermersch, secrétaire général adjoint des Jeunes Agriculteurs de la Somme. Si la morosité touche en premier lieu les productions animales, Denis Bully rappelle cependant que « toutes les filières sont concernées ».
Appel au médiateur des négociations commerciales
Pour chacun d’entre eux, s’il n’existe pas de solution-miracle, l’une des moyens d’obtenir une meilleure rémunération de leurs productions est l’application réelle de la Loi Egalim : « Cette loi a été faite pour cela, mais on constate malheureusement qu’elle n’est pas respectée », regrette Denis Bully. Et ce dernier de regretter « le manque de transparence des négociations commerciales. Ce n’est pas normal de ne pas y être associé. Nous en sommes toujours au même point et nous continuons à assister à un duel entre distributeurs et transformateurs sans avoir notre mot à dire ».
Les agriculteurs du département ne comptent donc pas en rester là. D’ici quelques jours, ils prévoient en effet d’adresser, sous forme d’une lettre ouverte, leurs revendications aux pouvoirs publics. Chef de l’État, ministre de l’Agriculture, rapporteur de la Loi Egalim devraient en être les destinataires.
Enfin, Denis Bully insiste sur sa volonté de rencontrer le médiateur des relations commerciales et ancien président de Système U, Serge Papin : « S’il a été nommé, c’est pour cela. Il faut que les actes dépassent les paroles ».