À quand une prise en compte du coût de production ?
Les divergences sont encore nombreuses et importantes entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs pour parvenir à un accord avant
le 1er mars. Le point de blocage : la détermination du coût de production.
Les divergences sont encore nombreuses et importantes entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs pour parvenir à un accord avant
le 1er mars. Le point de blocage : la détermination du coût de production.
À la veille de la rencontre entre les différents acteurs pour un nouveau tour de table sur les négociations commerciales, les ministères de l’Agriculture et de l’Industrie n’étaient pas très confiants sur l’issue des pourparlers. La réunion qui s’est tenue le 29 janvier a confirmé leurs craintes. C’est sur un quasi-constat d’échec que les acteurs se sont quittés. Les deux ministères le reconnaissent : le comité de suivi des relations commerciales «a fait émerger d’importantes divergences entre l’analyse de la situation par les transformateurs d’une part et les distributeurs d’autre part». Mais également par les agriculteurs qui, par l’intermédiaire de la FNSEA, dénoncent «l’attitude irresponsable de la grande distribution». Toute la question tourne autour de la définition du coût de production. D’ailleurs, la loi Egalim votée en octobre 2018 prévoit “la construction du prix en marche avant”, c’est-à-dire à partir des coûts de production et des coûts de revient des fournisseurs. Or, la grande distribution qui constate une baisse du pouvoir d’achat des Français demande à l’amont (producteurs et transformateurs) de baisser leurs prix de 2 à 4 % selon les produits. «Inadmissible» pour la FNSEA qui constate que «les cours de certaines matières premières augmentent (+ 20 % pour les céréales, + 25 % sur le soja). Ces coûts renchérissent considérablement le coût de l’alimentation animale pour tous les éleveurs». Pour le syndicat agricole, «il est indispensable que ces hausses de coût de production soient répercutées dans les conditions générales de vent».
Risque sur la souveraineté alimentaire
Les deux ministres semblent être sur la même longueur d’ondes que les agriculteurs et les transformateurs notamment quand ils déclarent de manière très pudique à propos des distributeurs : «certains comportements interrogent quant à leur conformité à la loi», comportement que le gouvernement «ne comprend pas». Pour ce dernier, les distributeurs «rompent (…) le consensus qui avait su émerger des États généraux de l’alimentation et se heurtent aux principes de la loi tel que celui de la construction en avant du prix. En cela, cette attitude fait porter un risque sur la pérennité de notre souveraineté alimentaire». L’Association nationale des industries alimentaires (ANIA) déplore, elle aussi, les pressions exercées par les grandes enseignes sur leurs entreprises, en particulier par des «menaces de déréférencement». Les grandes surfaces recourent de plus en plus aux “pénalités logistiques” (pour livraisons en retard notamment). «Ça devient un centre de profit chez les distributeurs. Ça devient systématique et même choquant», confie-t-on dans l’entourage du ministre de l’Industrie.
La solidarité, un lointain souvenir ?
Afin de faire entendre raison aux grandes enseignes, les ministères de l’Agriculture et de l’Industrie ont décidé d’intensifier les contrôles de la loi Egalim menés par les services de la DGCCRF. Ils ont aussi lancé une adresse de signalement (signalement@agriculture.gouv.fr) pour des «prix constatés en magasin qui paraissent trop bas par rapport aux coûts de production ainsi que des problèmes d’étiquetage». Une initiative saluée par la FNSEA qui y voit une manière de limiter «les pratiques abusives et délictueuses constatées lors des négociations». Il reste un peu moins d’un mois pour trouver un accord et mieux répartir la valeur ajoutée tout au long de la chaîne alimentaire. La solidarité affichée lors du premier confinement, entre l’amont et l’aval pour “tenir bon” semble, à ce stade, un lointain souvenir.