Céréales
Que faut-il penser des orges de printemps semées à l’automne ?
Afin de sécuriser rendement et qualité brassicole, une technique se développe en lien avec le réchauffement global du climat : les orges de printemps semées à l’automne. Cela représente près de 80 000 ha au niveau national.
Afin de sécuriser rendement et qualité brassicole, une technique se développe en lien avec le réchauffement global du climat : les orges de printemps semées à l’automne. Cela représente près de 80 000 ha au niveau national.
Cette année, les OPsa (semis d’orge de printemps à l’automne) s’en sortent mieux en rendement que les orges de printemps semées au printemps : en effet, les semis d’automne ont permis de sécuriser la densité épis des OPsa à l’inverse des orges de printemps semées classiquement, qui enregistrent un défaut de 25 % d’épis/m2 par rapport au pluriannuel (stress hydrique printemps 2022). Notons toutefois que cette pratique n’est pas sans risque (risque de gel, maladie...) et ne doit pas être généralisée. Retour sur les résultats rendement des dernières années et les recommandations en termes de conduite agronomique.
Dans ce regroupement d’essais 2022, LG Flamenco arrive en tête, suivie par la référence en orge de printemps RGT Planet, qui fait une très bonne année 2022 comparativement aux deux années précédentes. Lauréate et Focus arrivent respectivement en 3e et 4e position. KWS Faro, référence en orge d’hiver, est légèrement en dessous de la moyenne du regroupement. Fandaga, KWS Fantex et KWS Thalis forment le trio de fin. Ces résultats sont à consolider avec le regroupement pluriannuel car le comportement des variétés est très marqué par les conditions de l’année.
Les enseignements des essais historiques
L’expérimentation sur les OPsa a été fréquemment testée chez Arvalis durant ces quinze dernières années et permet de prendre de la hauteur par rapport aux résultats de 2022.
Le potentiel des OPsa est légèrement inférieur à une orge d’hiver (- 15 % en moyenne), mais présente une régularité et des rendements souvent supérieurs aux semis d’orge de printemps en cas de sécheresse au printemps (et d’hiver doux), et d’autant plus en sols superficiels. Sur une synthèse de quinze essais Arvalis Nord-Loire, il est observé en moyenne + 10 à + 15 q/ha au bénéfice des semis des orges à l’automne par rapport à un semis au printemps avec, durant les années sèches parfois, des rendements qui varient de + 20 à + 50 % au bénéfice des semis d’automne, c’est malheureusement également le cas inverse durant les hivers froid lorsque l’OPsa gèle avec parfois des destructions totales. Les années humides ou bien en craie/limon lorsque le stress hydrique est moyen (hors cas de sécheresse extrême 2022-2020-2011), il y a peu d’écarts entre semis d’automne et printemps.
Le semis de l’orge de printemps à l’automne permet d’être plus robuste vis-à-vis des sécheresses au printemps en sécurisant le nombre d’épis par m2 (période plus longue pour fabriquer des tiges par rapport à un semis de printemps, précocité du cycle, système racinaire plus performant). Cette précocité permet aussi d’esquiver en partie les fins de cycle échaudantes. Les teneurs en protéines sont également plus contenues, en particulier les années sèches, ce qui est intéressant en valorisation brassicole. Seul bémol, le risque de gel plus accru...
Les résultats des essais 2022 sont très clairement en faveur des orges de printemps semées à l’automne compte tenu de la sécheresse intense subie au printemps (rappelons également que l’hiver a été doux cette année) : les rendements sont au rendez-vous avec des teneurs en protéines comprises entre 9,5 et 11,5 %, répondant ainsi aux exigences du cahier des charges brassicole. Néanmoins, les années antérieures incitent à une certaine prudence afin de ne pas généraliser cette pratique. L’analyse des risques encourus amènent les recommandations suivantes en termes de conduite.
Date de semis : attention au risque «gel»
Cependant, les OPsa sont plus exposées aux différents risques de gel : des températures en dessous de - 10/- 12°C durant l’hiver peuvent provoquer un gel partiel ou total des plantes. Le réchauffement climatique engendre des hivers de plus en plus doux, mais également des extrêmes plus forts. Nous ne sommes donc pas à l’abri d’un coup de froid intense, même si cela est moins fréquent dans notre région. La date de semis influencera peu ce type de gel, les essais historiques montrent que parfois c’est la date de semis en novembre qui est touchée par le gel hivernal et parfois c’est la date de semis en octobre, parfois les deux. Par ailleurs, un semis début novembre permet d’avoir des OPsa au stade épi 1 cm à des dates habituelles pour les orges d’hiver et donc de limiter le risque de gel de l’épi possible avec températures en dessous de - 4°C durant la montaison.
Bioagresseurs : restez vigilants
Si on fait le tour des bioagresseurs susceptibles d’affecter cette orge de printemps semée à l’automne, d’abord rappeler que les variétés inscrites sont toutes sensibles aux mosaïques de type Y1 comme Y2. Par ailleurs, bien que le semis soit tardif, rien n’empêche de voir le développement de pucerons dans un contexte d’hiver doux.
Désherbage : choisir ses parcelles et les mélanges herbicides
Concernant la lutte contre les mauvaises herbes, semer une orge de printemps fin octobre revient soit à décaler la date de semis d’une céréale d’hiver, soit à faire l’impasse sur la capacité nettoyante de cette orge quand elle est semée au printemps. Dans ces conditions, l’orge de printemps implantée à l’automne ne sera pas indemne de graminées adventices. Les produits racinaires d’automne autorisés sur les orges d’hiver le sont également sur ces orges de printemps. Pour des questions de sélectivité, on évitera les mélanges de trop de matières actives les unes avec les autres. Par ailleurs, l’application d’herbicide à l’automne semble augmenter le risque de destruction de la culture par un fort gel hivernal. Dans tous les cas, on préférera implanter une orge de printemps fin octobre – début novembre sur des parcelles présentant des infestations les plus faibles possibles. Outre le fait de ne pas avoir dépensé un herbicide en cas de gel de la culture, c’est une manière de gérer durablement des parcelles encore propres.
Lutte contre les maladies et la verse : à ne pas négliger
Du côté de la lutte contre la maladie et la verse, certes, les orges de printemps semées à l’automne semblent moins sensibles aux maladies que la majorité des orges d’hiver semées début octobre, mais la vigilance sera de mise vis-à-vis d’attaques précoces de rhynchosporiose en sortie d’hiver tout particulièrement. En effet, ces orges de printemps restent néanmoins plus sensibles aux maladies que les mêmes semées au printemps.