Revalorisation des retraites agricoles : qui va payer ?
Les retraites agricoles sont au programme du projet de loi de Financement de la sécurité sociale.
On l’appelle le Plfss. Pour les non-initiés ce sigle veut dire projet de loi de financement de la sécurité sociale. Mieux vaut le connaître car cette loi va impacter tout le monde, y compris les agriculteurs. Tout d’abord, il est prévu que la gestion des régimes maladies et accidents du travail des non-salariés agricoles soient, dès 2014, gérés intégralement par la MSA. Jusqu’à présent, ces régimes étaient répartis entre le Gamex qui est un groupement d’assureurs et la Mutualité sociale agricole (MSA). Cela représente une économie de 20 millions d’euros. La mise en place d’un guichet unique à la MSA fait aussi partie de la réforme afin de simplifier « les démarches des exploitants agricoles concernés», explique le gouvernement dans le dossier de presse Plfss 2014.
Des charges en plus sur les actifs
Suite aux mesures annoncées pour la réforme des retraites, se posait la question du financement. Selon Jean-Paul Bizien, le président du syndicat des anciens exploitants (Snae), «les mesures de financement proposées sont loin d’être satisfaisantes» car elles reposent sur les actifs. En effet, le Plfss prévoit l’intégration dans l’assiette sociale du chef d’exploitation des revenus perçus par les conjoints et les enfants mineurs associés non exploitants de sociétés agricoles. Les réserves de la MSA seraient aussi utilisées à hauteur de 160 millions d’euros en quatre fois (soit 40 millions par an entre 2014 et 2017).
La Fnsea a réagi par le biais d’un communiqué le 8 octobre suite au conseil des ministres : «la revalorisation des retraites agricoles doit être financée par la solidarité nationale et non par les actifs agricoles, déjà fragilisés par des revenus et des trésoreries eux-mêmes affaiblis». «Dans un autre secteur une telle mesure existe», s’insurge-t-elle avant d’ajouter : «jamais les revenus d’associés de sociétés taxées à l’impôt sur le revenu n’ont été réintégrés dans l’assiette des cotisations sociales». De plus, cette mesure devrait rapporter 168 millions d’euros, «une charge» pour la Fnsea qui en appelle aux parlementaires «pour qu’on cesse de taxer toujours plus les secteurs productifs, véritable source de créations d’emplois».
ZOOM
238 000 exploitants concernés par la revalorisation des retraites
Le projet de loi de la réforme des retraites dont l’examen a débuté le 7 octobre à l’Assemblée nationale consacre un volet à la revalorisation des petites pensions des non salariés agricoles. En particulier, il prévoit un complément différentiel de retraite complémentaire. Ce complément permettra de porter la retraite minimale des exploitants à 73% du Smic en 2015, 74% en 2016 et enfin, 75% en 2017. La mesure s’applique à l’ensemble des retraités du régime, quelle que soit la date de liquidation de leur pension. Au total, 238 000 exploitants devraient être concernés, en 2015, par la mesure – son coût est évalué à 72 millions d’euros en 2015, et 146 millions d’euros en 2017.
Des points gratuits vont en outre être attribués aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux, y compris ceux à la retraite. Environ 557 000 personnes devraient être concernés par ce point. Son coût : 160 millions d’euros par an.
Le projet de loi permet également la réversion de la RCO (Retraite complémentaire obligatoire) aux conjoints survivants, même si l’agriculteur n’avait pas liquidé ses droits à la retraite avant son décès. Les conjoints collaborateurs ne sont plus affiliés par ailleurs à la MSA en cas de décès, de divorce ou de départ à la retraite du chef d’exploitation. Le projet de loi leur donne la possibilité de continuer à cotiser (et donc à acquérir des droits à la retraite) même dans ces trois cas de figure.
Polypensionné : prise en compte du salaire annuel moyen
Le projet de loi prévoit aussi d'améliorer la situation des salariés polypensionnés, c'est à dire ceux qui ont eu une activité de salarié au régime agricole, et, à un autre moment, au sein d’une entreprise ou une société relevant du régime général. Ces salariés polypensionnés se voyaient jusqu’alors calculer leur retraite, non pas sur les 25 meilleures années de toute leur carrière, mais sur une proportion des 25 meilleures années dans chacun des régimes. Désormais, leur retraite sera calculée sur le salaire annuel moyen tout régime confondu, donc sur l’ensemble de leur carrière. Et le salarié touchera sa retraite d’un seul régime, le dernier auquel il aura été affilié dans son activité.