Revenu des producteurs : il ne sera pas à la hauteur de la récolte
Présentant devant la presse la récolte de céréales à paille française 2015, le président de l’Agpb a pu se réjouir d’un bilan exceptionnel. Mais le revenu céréalier demeure précaire et la compétitivité du secteur est menacée par les arbitrages nationaux de la Pac.
La récolte de céréales à paille 2015 aura été d’autant plus exceptionnelle - record de production de blé tendre à plus de 40 millions de tonnes - que les conditions météorologiques (chaleur et sécheresse) pouvaient inspirer des inquiétudes légitimes. La précocité de la récolte de céréales d’hiver leur a permis d’échapper à la courte période de vraie canicule, le bon état des nappes phréatiques a limité le manque de précipitations et, certaines cultures de printemps (orge) ont fait preuve d’une surprenante résistance (adaptation de la plante ?) à des conditions climatiques adverses.
Quoi qu’il en soit, comme le rappelait Philippe Pinta, président de l’Agpb, au cours d’une conférence de presse sur la rentrée céréalière, le 27 août, le premier constat qu’inspire cette récolte 2015 de céréales à paille est que la France réaffirme sa capacité à produire beaucoup et bien, avec une régularité que lui envient la plupart des autres grands producteurs mondiaux, et qui lui vaut la confiance des pays importateurs.
Le défi de l’export
Outre le record en volume établi par le blé tendre, grâce entre autres à un rendement lui aussi record de 78,7 quintaux/ha en moyenne nationale, l’Agpb peut se féliciter de la qualité de la moisson, facteur primordial de vente sur les marchés. Les autres motifs de satisfaction procurés par la récolte céréalière 2015 sont la reprise de la production de blé dur, après la catastrophique dernière campagne et une érosion régulière des surfaces, ainsi qu’une production d’orge de 12,5 millions de tonnes, en hausse de 15 % sur la moyenne quinquennale.
Il va maintenant falloir vendre cette production de blé tendre, particulièrement élevée. A ce propos, Philippe Pinta a salué la performance de la filière pour avoir permis en 2014-2015 l’excellent dégagement à l’exportation d’une moisson pénalisée par un pourcentage important de petits blés. La qualité de la récolte 2015 autorise donc tous les espoirs.
Un revenu en berne
Malgré cette bonne récolte de céréales à paille, le revenu des producteurs est «toujours en berne. Les revenus ne seront pas au rendez-vous», a déclaré le président Philippe Pinta, en dénonçant «des normes superflues qui font exploser les charges». L’Agpb réclame donc un gel à 5 % du prélèvement des aides au profit de la surprime aux premiers hectares, un déblocage de la mesure agroenvironnementale en zones intermédiaires. Elle reprend, par ailleurs, le mot d’ordre de la Fnsea pour un moratoire sur les normes et une fiscalité innovante.
«Je suis extrêmement inquiet pour le revenu 2015 des producteurs spécialisés en céréales et oléoprotéagineux», a confié Philippe Pinta, évoquant un niveau voisin des
16 400 euros dégagés en 2014. Les prix ont en effet chuté en un mois et demi de 40 euros par tonne de blé tendre à moins de 140 euros/t départ ferme, d’après ses chiffres.
Des revenus mis à mal par la chute des prix
Malheureusement, d’autres grandes cultures, en particulier maïs et oléagineux, ne connaissent pas le même succès, et leur baisse de production va peser sur un revenu céréalier déjà mis à mal par la chute actuelle des prix : 40 €/t depuis le début de la campagne, mais aussi, par des charges qui restent élevées, pratiquement au niveau de 2014.
Par ailleurs, les céréaliers français, plus que leurs concurrents, sont pénalisés par les arbitrages nationaux de mise en œuvre de la Pac, multipliant en matière d’environnement des normes qui freinent la production et en font exploser les coûts. «Il faut, affirme le président de l’Agpb, dégager l’horizon des exploitations céréalières. Il faut débrider l’initiative et assurer la liberté d’entreprendre en agriculture.»
L’appel de l’Agpb à la manifestation du 3
C’est pourquoi l’Agpb soutient totalement le mot d’ordre de la Fnsea dans sa demande de moratoire sur les normes et une fiscalité innovante. Son président a appelé, de ce fait, les céréaliers à manifester avec la Fnsea le 3 septembre.