Foncier
Terres aux enchères : les acheteurs se défilent
La cession aux enchères de deux lots de terres agricoles sur les communes de Gentelles et Boves qui devait se tenir mardi 15 mars au tribunal d’Amiens n’a pas eu lieu, faute d’enchérisseurs.
La cession aux enchères de deux lots de terres agricoles sur les communes de Gentelles et Boves qui devait se tenir mardi 15 mars au tribunal d’Amiens n’a pas eu lieu, faute d’enchérisseurs.
Il y a bien eu quelques acheteurs potentiels dans la salle d’audience du tribunal d’Amiens ce mardi
15 mars après-midi pour suivre la vente aux enchères de deux lots de terres agricoles (voir nos précédentes éditions), mais ces lots n’auront finalement pas trouvé preneur. La raison ? L’absence d’enchérisseurs. Durant les deux séquences d’une minute trente pendant lesquelles ils auront pu se manifester, pas un n’a en effet levé la main pour témoigner un intérêt envers l’un ou l’autre lot. La salle située au rez-de-chaussée de l’aile gauche du Palais de justice était pourtant bien pleine puisqu’au moins une trentaine d’agriculteurs avaient pris place sur les bancs réservés au public. Sous leur manteau, des pancartes sur fond blanc sur lesquelles on pouvait lire «Pas de terre aux enchères» qu’ils n’ont pas eu besoin de brandir. Leur motivation ? Elle était simple : assister, dans un silence quasi monacal, à la vente. Au milieu, les acheteurs ou leurs conseils ont préféré se faire discrets.
Report de la vente
Pour le moins inédite, la situation a provoqué une certaine irritation chez le président du tribunal, raillant ceux qui sont venus «assister au spectacle». Après avoir constaté le «caractère infructueux» de la vente, celui-ci a été contraint d’annoncer un report de la vente. À l’issue de l’audience, les agriculteurs présents étaient tous satisfaits du résultat de leur courte mobilisation. «Je tiens à remercier l’ensemble des agriculteurs venus en nombre occuper la salle, a lancé Denis Bully, président de la FDSEA, depuis les marches du Palais de justice. Il était important de montrer notre opposition à ce genre de méthode et montrer que les gens confrontés à ce genre de situation ne sont pas seuls.» Président des Jeunes agriculteurs de la Somme, Benjamin Bizet a lui aussi fait part de sa satisfaction du moment, comme de ses doutes pour l’avenir : «Le résultat est bon, mais en tant que jeune installé, c’est la manière de faire qui inquiète. Le foncier est quelque chose d’important pour tout jeune qui veut s’installer. Quand on voit le prix que certains sont prêts à mettre, on s’attend à des heures compliquées si on ne met pas les pieds dans le plat.»
«Pas la norme»
Ce sentiment, il est également partagé par Élie Vermersch, secrétaire général des JA de la Somme :
«La mobilisation a payé. Des jeunes sont venus, c’est bien, mais qu’elle sera la suite ?», interroge-t-il. Et pour l’avenir, quel regard porte-t-il sur l’envolée des prix du foncier ? Sa réponse est franche : «Clairement, on est inquiet. Imaginons qu’un jeune soit confronté à ce genre de situation. Le principe d’une vente aux enchères, c’est de faire monter les prix pour en tirer le maximum. En ce qui concerne les terres, on se retrouve avec des niveaux de prix exorbitants qui deviennent des références et rendent les choses encore plus compliquées qu’elles ne le sont déjà.» Secrétaire générale de la FDSEA de la Somme, Marie-Françoise Lepers souligne, elle aussi, son indignation face à la méthode : «Ce n’est pas une façon de procéder, a-t-elle dit. Nous ne voulons pas que cette manière de faire devienne la norme.» Et Denis Bully de conclure : «Les terres agricoles n’ont pas leur place dans un palais de justice.»