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Une ONG et le Santerre s’unissent en faveur d’un sol vivant

TFT (The Trust Forest), organisation internationale à but non lucratif, qui travaille sur la résolution des problèmes environnementaux, rencontrait les acteurs du Santerre pour présenter son projet : mettre le sol au centre de la qualité.

© Pixabay

Qu’est-ce que TFT, ONG internationale qui s’occupait au départ de la lutte contre la déforestation, vient faire dans le Santerre ? «Nous voulons réfléchir à ce qu’est l’agriculture de demain, et le Santerre nous paraît être un lieu de convergence des chaînes de valeur», expliquait Bastien Sachet, directeur de TFT.

Jeudi 25 janvier, l’organisation avait convié les responsables de la Sitpa (groupe Neslé), des représentants de E.Leclerc, Rev3 Hauts-de-France (la troisième révolution industrielle dans les Hauts-de-France, projet initié par la Région et la CCI), la chambre d’agriculture et, bien sûr, les agriculteurs, pour présenter le projet et proposer à ces acteurs de s’y engager. L’objectif est le suivant : «produire des innovations pour que les sols du Santerre soient les plus vivants possibles», précise Bastien Sachet. L’ONG souhaite aussi valoriser les résultats obtenus, pour que les consommateurs puissent identifier les produits cultivés dans des «sols de qualité».

TFT espère convaincre d’autres industriels, comme Tereos ou Bonduelle, distributeurs et agriculteurs du secteur à se joindre au projet pour qu’il puisse être mené à bien. «Nous avons besoin de tous les acteurs de la filière pour que cela fonctionne, puisque chacun a un rôle à jouer.»

Les agriculteurs, experts du sol

Le plan : partir de l’expertise des agriculteurs, premiers exploitants du sol, et mettre en avant les pratiques qui favorisent la conservation des sols vivants. Par chance, le Santerre compte déjà un bon nombre d’agriculteurs très impliqués dans la conservation des sols. TFT souhaite dresser le diagnostic de ce qui existe déjà, puis définir des axes de travail pour que ces initiatives isolées deviennent un vrai moteur du territoire. Des réunions et des expériences dans les exploitations seront régulièrement organisées.

Une initiative saluée des agriculteurs. Laurent Degenne, installé à Licourt, se réjouit de cette «nouvelle démarche, où rien n’est imposé. L’ONG donne sa confiance à ceux qui savent, soit aux agriculteurs». Alexandre Deroo, polyculteur à Méharicourt, trouvait aussi «l’approche séduisante. On espère que TFT va réussir à accrocher d’autres groupes, avec d’autres industriels, car notre petit groupe du Santerre n’arrivera pas à révolutionner le monde à lui seul !».

Plus de renseignements : contacter TFT par mail, m.till@tft-earth.org

«Un sol en bonne santé : notre souci»

TFT a convié quatre agriculteurs du Santerre à témoigner de leurs pratiques culturales axées sur la conservation des sols. Guillaume Bruniaux, exploitant à Davenescourt, pratique les TCS (techniques de conservation des sols) et les semis direct sous couvert, Alexandre Deroo, polyculteur à Méharicourt, ainsi qu’Aurélien Desrousseaux et Xavier Soilleux, installés à Arvilliers, cultivent sans labour depuis de nombreuses années. Ils répondaient aux questions de Bastien Sachet, directeur de TFT.

Pourquoi avez-vous voulu sortir des méthodes conventionnelles ?

Nous sommes les premiers concernés par les problématiques de tassement des sols. Nous avons réfléchi à comment favoriser la vie du sol, réduire nos intrants, et utiliser le plus possible d’engrais verts.

Quels résultats avez-vous obtenus ? Quelles sont les contraintes ?

Pour les aspects positifs, nous pouvons souligner une meilleure portance du sol, une dégradation des matières bien meilleure depuis que nous ne labourons plus, une meilleure autonomie alimentaire, avec une fertilité du sol plus naturelle. Nous utilisons de moins en moins d’engrais et de produits phytos, et nous ne sommes pas au bout de notre système. Et puis, nous n’avons pas de perte de rendements ! La question qui demeure est celle du salissement des parcelles. Dans certaines zones, nous avons du mal à maîtriser la pousse de ray-grass, par exemple.

Comment avez-vous fait pour appréhender le sujet et quelle prise de risque ?

Nous avons fait cela progressivement. Souvent, le groupe est un vrai plus dans le partage. Et puis, nous avons chacun une notion de risque qui nous est propre. Ces pratiques impliquent forcément d’être beaucoup dans les champs pour contrôler les maladies, les invasifs… Moi, par exemple (Alexandre Deroo), je mesure tout. Je me balade toujours avec une bêche et un pénétromètre dans mon coffre pour évaluer l’état du sol avant d’intervenir. On oriente notre tour de plaine en fonction du bulletin de santé du végétal. Mais notre chance est d’avoir un sol tolérant et très facile dans le secteur.

Quels obstacles peut-on rencontrer pour adopter ces méthodes ?

Le premier obstacle est psychologique. Il faut s’affranchir des idées préconçues. Il y a aussi les problèmes d’enherbement que nous avons évoqués, l’équipement, car le matériel est différent si on veut planter avec des résidus en surface, le temps à consacrer, car un essai se fait sur un an. Il faut bien trois ou quatre ans avant d’être opérationnel. Nous nous inquiétons aussi de l’interdiction du glyphosate. Nous n’arrivons pas à nous en passer encore dans nos systèmes pour régler certains problèmes de repousse. Nous allons devoir trouver des solutions. Enfin, il y a le frein organisationnel. Il faut toujours s’adapter au contexte climatique. On ne refait jamais deux fois la même chose !

Comment vos efforts sont-ils valorisés aujourd’hui ?

Personne ne s’en occupe (rires) ! La rémunération est la même. Si ce n’est qu’on est mis en avant désormais. Il y a quinze ans, on se cachait, car le labour faisait partie du cahier des charges de certains industriels. Aujourd’hui, on organise des portes ouvertes chez nous pour vanter nos efforts. Mais il manque une véritable communication, pour permettre une distinction de ces pratiques pour le consommateur. C’est l’espoir qu’on peut émettre de ce projet.

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