Vaches et chevaux font bon ménage au pâturage
Une prairie préservée, des animaux sereins et en bonne santé : le pâturage mixte équin-bovin s’avère très avantageux. En attestent les premières tendances qui découlent du projet de recherche PaturBovEquin, mené par l’Inrae et l’IFCE.
Une prairie préservée, des animaux sereins et en bonne santé : le pâturage mixte équin-bovin s’avère très avantageux. En attestent les premières tendances qui découlent du projet de recherche PaturBovEquin, mené par l’Inrae et l’IFCE.
Voilà trois ans que les chevaux côtoient les vaches dans les prairies du Haras du Pin, dans l’Orne, sous le regard attentif des experts de l’Inrae et de l’IFCE (Institut français du cheval et de l’équitation). L’objectif du projet de recherche PaturBovEquin qu’ils mènent : définir les bénéfices du pâturage mixte équin-bovin et préciser les modes de conduite.
«Cette pratique, utilisée depuis des décennies par les éleveurs, consiste à conduire différentes espèces d’herbivores sur une même surface, de manière simultanée ou alternée, au cours de la saison de pâturage», précise Frédéric Launay, directeur du domaine expérimental Inrae du Pin-au-Haras, dans une vidéo postée sur le site de l’Inrae. Les données recueillies sur le comportement alimentaire des animaux, les caractéristiques du couvert prairial et l’évolution du parasitisme gastro-intestinal des deux espèces laissent présager des résultats favorables au pâturage mixte. Ceux-ci devraient être confirmés cette année, mais les premières tendances sont déjà données.
Premièrement, sur le volet alimentaire, une homogénéisation du couvert semble s’opérer de manière plus importante dans le traitement mixte. «Les comportements alimentaires complémentaires des deux espèces favorisent la croissance de l’herbe», note Frédéric Launay. Guillaume Teinturier, éleveur de soixante-dix vaches allaitantes et d’une douzaine de chevaux Percherons à Villeneuve-en-Perseigne, dans la Sarthe, en atteste : «les chevaux vont pâturer les refus que les bovins ne mangent pas et vice-versa. Du coup, on aura une herbe de meilleure qualité. Bien rasée, elle repousse mieux et s’avère plus riche pour les animaux.»
Le régime alimentaire des équins présente en fait de fortes similitudes avec celui des bovins. Tous deux préfèrent pâturer les graminées. Les légumineuses et les plantes diverses sont utilisées secondairement et davantage par les bovins que par les équins. Ceci résulte probablement d’une meilleure aptitude des ruminants à détoxifier les métabolites secondaires présents dans ces plantes. Par ailleurs, les équins pâturent plus ras que les bovins grâce à leur double rangée d’incisives. Ils s’alimentent pendant seize heures par jour en moyenne, contre huit heures chez les ruminants.
Gagnant gagnant
Deuxièmement, sur le volet parasitaire : «le nombre moyen de vermifuges administrés aux poulains sur la saison de pâturage est réduit», constate Laure Briot, ingénieure de développement élevage des équidés à l’IFCE. Le principe est simple. Si une espèce consomme les parasites de l’autre et que ces parasites ne sont pas compatibles avec la deuxième espèce, alors ils n’arrivent pas à faire leur cycle et meurent. Par exemple, quand un petit strongle est consommé par un bovin, il ne peut pas se reproduire et créer une nouvelle lignée qui pourrait infester le cheval venant pâturer ensuite. Le cycle est rompu, la charge parasitaire diminue. Ce principe a une limite :
une espèce de strongles (Trichostrongylus axei) est commune aux équins et aux bovins. Enfin, le pâturage mixte aurait un effet bénéfique sur la croissance des bovins : les génisses conduites en pâturage mixte semblent présenter une meilleure croissance.
Les éleveurs qui pratiquent cette technique sont convaincus. Thierry de Chambord, manager du Haras d’Al Shahania Stud à Menil-Vicomte (Orne), atteste même qu’il «n’imagine pas pouvoir élever de bons chevaux, de futurs cracks, sans avoir de bovins dans les prairies.»