Céréales bio : s'organiser pour répondre à une demande grandissante
A l’occasion des JTIC, des acteurs de l’amont et de l’aval de la filière céréales ont expliqué leurs solutions et leurs problématiques pour répondre à la demande, toujours grandissante, pour des produits issus de l’agriculture biologique.
En France, la consommation de produits issus de l’agriculture biologique augmente fortement. D’après l’Agence Bio, en 2017, la valeur des achats des produits alimentaires issus de l’agriculture biologique est estimée à 8,373 milliards d’euros, soit une croissance de près de 17 % par rapport à 2016. Les produits céréaliers ne dérogent pas à la règle.
Par exemple, entre 2016 et 2017, la consommation de produits de boulangerie et pâtisseries fraîches a augmenté de plus de 20 % en valeur. «Le bio est une activité qui se développe et qui est sortie de sa niche», se félicite Oliver Deseine, directeur de la meunerie «Les Moulins de Brasseuil». Il est intervenu le 7 novembre, lors des JTIC, (Journée techniques de l’industrie céréalière, les 7 et 8 novembre à Paris), à l’occasion d’une conférence sur la filière céréalière et le bio.
Cependant, il n’est pas toujours aisé de répondre à cette augmentation de la demande. La production biologique, pas seulement de céréales, représentait, en 2016, 5,7 % de la surface agricole utile. De plus, d’après l’Agence Bio, la filière céréalière est quelque peu à la traîne. Les surfaces de grandes cultures biologiques atteignaient 357 000 ha fin 2016, dont 40 % en conversion, soit 3 % des surfaces totales en céréales et oléo-protéagineux. Un des premiers freins est donc lié à l’approvisionnement.
Pour les coopératives spécialisées dans les céréales cultivées selon les principes de l’agriculture biologique, il est souvent nécessaire d’avoir des territoires de collecte conséquents pour réunir assez d’adhérents. Axéréal Bio s’approvisionne ainsi sur quinze départements, avec seulement six techniciens pour six cents adhérents et 40 KT de céréales.
Même constat pour Corab, coopérative 100 % bio qui, pour deux cents adhérents et 12 000 tonnes de grains, étend sa zone de récolte sur tout le Poitou-Charentes, allant jusqu’au nord de la Dordogne, en Vendée et dans le Limousin. Les coopératives doivent aussi gérer des catalogues de références importants, avec quarante codes produits pour Axéréal Bio, par exemple.
Un marché complexe et spécifique
«Le marché existe. Il faut répondre à la demande, mais il faut l’appréhender dans toute sa spécificité et sa complexité», précise Gilles Renards, directeur d’Axéréal Bio. Il faut ainsi prendre en compte l’importance de la variabilité climatique, mais aussi une nouvelle réalité pour les métiers des organismes stockeurs, qui «ne se rémunèrent pas de la même manière que dans le conventionnel», souligne le directeur.
Mais la surface en bio pour les céréales est tout de même en forte croissance. Elle augmente de 15 % par an pour Axéréal Bio. Ainsi, Olivier Deseine espère pouvoir approvisionner son moulin avec des céréales bio 100 % françaises d’ici trois à quatre ans. Actuellement, 15 % des céréales transformées aux «Moulins de Brasseuil» proviennent des pays tiers.
La filière a déjà beaucoup évolué pour s’adapter à ces nouvelles demandes des consommateurs en s’appuyant sur des outils de récolte et de stockage spécifiques, mais aussi en travaillant sur la génétique et en faisant évoluer la qualité des grains pour avoir des farines plus homogènes, qu’il est aussi plus aisé d’utiliser dans les processus de panification.
«Au départ, les farines bio n’étaient pas faciles à travailler pour les transformer en pain mais, aujourd’hui, la filière est mieux organisée. Les farines sont plus stables, et cela nous permet de faire de meilleurs produits», se félicite Robert Scharr, cofondateur de Patibio, boulangerie bio semi-industrielle. Il note tout de même qu’il faut parfois faire de la pédagogie avec les clients pour leur expliquer que les pains faits avec des farines biologiques sont moins linéaires.