Conseils sur la manipulation et la contention des bovins
Manipulation et contention des bovins. Ce qu’il faut savoir.
Rares sont ceux qui n’ont jamais ressenti une grosse frayeur face à un bovin irascible. Plusieurs témoignent d’ailleurs de l’accident dont ils ont été victimes, ou dont ils ont entendu parler. Pour la conseillère en prévention de la MSA, Christine Bresson, «les accidents sont plus ou moins graves, avec des conséquences qui peuvent aller de l’immobilisation de quelques jours au handicap, voire au décès». Chaque année, d’après la MSA, «plus de la moitié des accidents du travail déclarés par les exploitants sont liés aux activités d’élevage bovin».
Aménagement des bâtiments, utilisation d’un matériel adapté, mais aussi comportement humain face aux animaux sont autant de leviers d’intervention de la MSA pour prévenir l’accident. Lors d’une formation sur la prévention organisée par la MSA, l’accent a été mis sur la relation homme-animal, avec l’intervention de Roger Seron, pédicure bovin depuis trente ans, et formateur à l’Institut de l’élevage.
Adopter la zen attitude
Pour éviter l’accident, la première des recommandations est d’adopter une attitude sereine face aux animaux : «Les animaux ressentent votre état émotionnel, explique Roger Seron. Il faut leur parler, car ils s’habituent à la voix de l’éleveur. Il ne faut surtout pas les trahir, ni les saisir et bien les prévenir de ce que l’on va faire. Avoir des animaux calmes, c’est une habitude qui se construit dès leur plus jeune âge.» Néanmoins, poursuit Roger Seron, «le contact doit être franc, sans effleurement». Selon le spécialiste, «c’est la nature et la fréquence des contacts qui vont déterminer la relation homme-animal».
Des animaux sensibles aux couleurs
Parmi d’autres conseils du spécialiste, on retiendra qu’il ne faut jamais tourner le dos à un taurillon, ne pas taper l’animal à l’arrière du jarret, ne pas le regarder dans les yeux - il considère cela comme une agression -, éviter les gestes brusques pour le faire avancer, les bruits, ou encore éviter une exposition à la lumière trop forte et les zones d’ombre au sol. Lors du transport, la bétaillère ne devra pas être trop brillante, et être bien calée. Les couleurs claires et/ou fluo sont stressantes pour les animaux tandis que les couleurs foncées seront plutôt apaisantes. «En noir, on passe partout, note Roger Seron, alors que le jaune est la pire des couleurs parce qu’elle réfléchit la lumière.»
Une réflexion dans l’aménagement
Lorsqu’on réfléchit à la construction d’un bâtiment destiné à l’élevage bovin - qu’il soit laitier ou allaitant -, plusieurs aménagements doivent être prévus : matériel de contention, passage d’homme entre les boxes, barrières à ouverture rapide… puisqu’en effet la répétition du saut d’une barrière peut avoir des conséquences sur le squelette humain. L’outil de contention, autour duquel on doit pouvoir circuler, va, quant à lui, aider à réduire le stress de l’animal pendant la manipulation et les soins.
Bâton et anneau nasal pour manipuler
«Indispensable» pour l’éleveur, «le bâton est là au cas où, prévient Roger Seron. C’est un prolongement du bras qui fait un bruit auquel l’animal est sensible, qui sert pour le contact et pour le guidage». De couleur jaune, il sert «à éloigner, non pas à matraquer. Quand on tape sur un animal stressé, c’est encore pire».
Le taureau reproducteur, de plus en plus présent dans les exploitations, selon Roger Seron, est un cas à part : «L’écornage du taureau doit avoir lieu à l’âge adulte, en l’absence de l’éleveur. Un taureau qui a gardé ses cornes a appris à se défendre avec. Le jour où on lui enlève, il devient handicapé, donc moins dangereux», assure le formateur.
La pose d’un anneau nasal avec licol facilitera également sa manipulation, même si le taureau reste un animal imprévisible et protecteur vis-à-vis de son troupeau. Dès lors, explique Roger Seron, «si un taureau montre des signes d’agressivité, pas de quartier. Votre vie ne vaut pas celle d’un taureau, même s’il fait de très bons veaux».
Les inséminateurs ne sont pas épargnés
Parce qu’ils sont en contact quasi quotidien avec les animaux, les inséminateurs paient, au même titre que les éleveurs, un lourd tribut lors de leurs interventions. Lors de l’assemblée générale de la section nord de la coopérative d’insémination Evolution, à Saint-Martin-les-Tatinghem, le 19 mars, son directeur général adjoint, Gilles Delaporte, est revenu sur le coût des accidents du travail pour l’entreprise : «Une fin de carrière pour inaptitude en raison d’un accident du travail, c’est 100 000 € pour la coopérative. Chaque année, nous en avons en moyenne trois…»
En 2018, le nombre de jours d’arrêt de travail pour accident s’est porté à 2 348 au niveau national, ce qui représente l’équivalent du temps de travail de onze salariés, avec une durée moyenne d’immobilisation de trente-sept jours. Ce chiffre, révèle Gilles Delaporte, «est important, trop important». Pour les adhérents de la coopérative, le coût de l’accidentologie au travail se répercute aussi sur le prix des inséminations, autour de 1,33 € par insémination artificielle (IA). L’un des enjeux est également d’améliorer la réussite des IA : «Une bonne contention permet d’améliorer la reproduction», constate Adrien Chevrel, responsable de la région nord. Ce que confirme Gilles Delaporte : «Lorsqu’on insémine, la femelle doit être parfaitement immobile. Pour déposer la semence, l’espace n’est pas plus grand qu’une pièce d’un euro. Nos inséminateurs sont précis dans leurs gestes, mais il faut quand même que les conditions soient favorables.»