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Chasse
Des bassines en open-bar pour la petite faune

A Fransures au sud d’Amiens, Antoine Roussel, un jeune agriculteur et chasseur mobilise les membres de la société de chasse pour aménager et entretenir des points d’eau artificiels où la petite faune sauvage vient s’abreuver en cette période de sécheresse.

Chaque tournée de remplissage des bassines est aussi l’occasion d’observer des indices de fréquentation.
© V.F.

Éleveur de vaches laitières, Antoine Roussel sait à quel point l’abreuvement est essentiel à la bonne conduite et à la performance de son troupeau. En ce qui concerne la faune sauvage, il ne lui a pas échappé non plus que tout ce que compte la plaine comme faisans, lièvres, perdrix et autres chevreuils et sangliers ont eux aussi soif depuis que canicule et sécheresse touchent le département. Aidé de plusieurs membres de la société de chasse, le jeune garçon a récemment aménagé des bassines qu’il alimente en eau claire. Six au total ont été réalisées, dans la plaine comme dans les bois. « Depuis avril, on n’a pas eu de pluies significatives », constatait Antoine, mi-août. En plus de cela, le territoire de la commune de Fransures ne compte ni lacs, ni rivières, « hormis une mare dans le centre du village…, mais c’est tout ».

Recharge et observation

Le premier point d’abreuvement qu’il a réalisé « à la force des bras » se situe dans une parcelle de tournesols, juste derrière l’un de ses bâtiments de ferme. La méthode ? Un trou d’une largeur ne dépassant pas un mètre, une longueur d’environ deux mètres et une profondeur comprise entre 10 et 15 centimètres. Pour que l’eau reste suffisamment longtemps, hormis le phénomène d’évaporation naturelle, une bâche en plastique tapisse le fond de chaque bassine. Chacune peut contenir entre 120 et 180 litres d’eau. Au fond de chaque bassine, le jeune agriculteur a installé des pierres. « C’est une façon d’éviter que la bassine ne soit trop profonde et que les jeunes se noient s’ils tombent dedans. Il ne faut pas que ce soit un piège », décrit-il. « Les premiers points d’eau ont été réalisés le 5 août, se souvient Antoine. Il faut recharger environ tous les 8 jours ». L’opération se fait avec une citerne tirée par un tracteur, « pour n’avoir qu’une seule tournée à faire ». L’observation de la fréquentation est en revanche plus régulière. Tout est prétexte à visiter l’une ou l’autre bassine, à la recherche de traces de pattes ou d’une plume… Parfois, il se peut aussi qu’un visiteur pas vraiment délicat vienne « squatter » les lieux. De quoi parle-t-on ? Du sanglier, pardi, qui cherche à se souiller et n’hésite à lever la bâche de son groin. « On essaie de tendre les bâches avec des bouts de bois et de la terre, mais ça ne tient pas toujours… » soupire Jean-Marie, l’un des chasseurs de Fransures qui accompagne Antoine dans la réalisation.

Pour Francis, un autre chasseur bénévole, « le plus dur, c’est le terrassement… surtout en sous-bois ». Mais au final, comme l’assure Sophie, jeune chasseresse, « il faut simplement y mettre de la bonne volonté ». Pour rendre l’installation plus durable, l’idée de remplacer les bâches par des cuves de 1000 litres sciées en deux pourrait faire son chemin. Mais pour l’heure, Antoine et ses acolytes donnent le sentiment d’avoir fait « avec les moyens du bord ». Simple, dans l’urgence, mais efficace.

eau gibier

« Qui d’autre que les chasseurs ? »

A un mois de l’ouverture générale de la chasse, les quatre amis espéraient d’abord que les efforts qu’ils réalisent tout au long de l’année seront récompensés ; l’abreuvement de la petite faune n’étant qu’une goutte d’eau dans leur investissement pour leur passion. « Si on veut du gibier sur un territoire, il n’y a pas de secret, constate ainsi Jean-Marie. Il faut s’en préoccuper, et pas seulement la veille de l’ouverture ». En parcourant le territoire, on aperçoit çà et là des agrainoirs. Quelques miradors aussi qui servent actuellement à la régulation de prédateurs, tels que le renard. « En ce moment, ce n’est pas la nourriture qui manque en plaine pour les animaux, mais l’eau », rappelle de son côté Francis. Et d’assurer que les deux vont de pair.

Hormis la perdrix grise, tous semblent sereins pour la prochaine saison : « On ne va pas dire qu’on ne voit pas d’animaux, ce serait mentir, assure Jean-Marie. Les lièvres sont là, les faisans aussi, et c’est grâce aux chasseurs qui s’en occupent. Si nous ne le faisions pas, qui d’autre prendrait le relais, hormis quelques agriculteurs qui le font aussi sans être forcément chasseur, simplement parce qu’ils sont au contact de la nature comme nous ? » Antoine, avec sa double casquette d’agriculteur-chasseur, est à l’aise sur le sujet, veut sensibiliser d’autres personnes, mais il faut avouer qu’il s’agit typiquement du genre de question qui interpelle sans forcément trouver de réponse.

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