Edouard Brunet : «le sujet principal est l’installation des jeunes»
Un mois après son élection en tant que président des JA de la Somme, Edouard Brunet, vingt-six ans, installé à Cayeux-sur-Mer, livre ses ambitions.
Quel agriculteur êtes-vous ?
Je suis né dans l’agriculture, et je ne me verrais pas faire autre chose. En classe de CP, je disais que l’école était nulle, parce qu’on n’y apprenait pas à nourrir les vaches (rires). Plus sérieusement, je suis un passionné d’agronomie. Dans le cadre du BTS ACSE, j’ai d’ailleurs effectué un stage d’un mois et demi dans une exploitation de 5 000 ha, au Brésil, dans le Mato Grosso. Je voulais en savoir plus sur les techniques de semis direct, sous couvert. Ils sont très avancés dans ces pratiques, là-bas. Je les mets en place petit à petit dans l’exploitation, avec des résultats encourageants. Mais pas toujours évident de bouleverser le système et les habitudes ! Et puis, les Bas-Champs présentent des conditions compliquées. Si je suis heureux dans mon tracteur, j’aime aussi l’élevage. Tous les soirs, ou presque, je consulte mes mails avec les veaux. Ça les habitue à moi, et puis ils sont apaisants.
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous investir auprès des JA ?
Au lendemain de mes dix-huit ans, je m’investissais pour le canton d’Ault, Saint-Valéry-sur-Somme et Gamaches, qui devait être renouvelé. Il fallait quelqu’un pour défendre les Bas-Champs et l’environnement. Il y a quatre ans, j’entrais au bureau, puis je devenais secrétaire général, car défendre l’agriculture samarienne auprès des politiques et du grand public me tient à cœur. J’ai conscience qu’être président est un sacré engagement, très prenant, car il faut aussi être présent sur le terrain. Mais il faut bien que quelqu’un représente les jeunes. Et je suis motivé pour cela. Au niveau personnel, c’est aussi très enrichissant. Je rencontre des gens de tous les horizons.
Quels seront les enjeux de ce mandat de deux ans ?
Notre sujet principal est l’installation des jeunes. Avec une moyenne départementale de 24 000 € de DJA (Dotation jeune agriculteur), le parcours qu’a mis en place la Région fonctionne bien. Mais nous militons pour faciliter davantage les reprises d’exploitations, à toutes les échelles, au niveau national. Nous aimerions, par exemple, une réforme du système fiscal agricole, avec une exonération d’impôts pour les cédants. Plus largement, on aimerait que les agriculteurs, et donc les jeunes, puissent accéder à des prix plus rémunérateurs. A notre échelle, ce n’est pas évident, mais nous devons être force de propositions. Cela implique d’être toujours au courant des sujets d’actualité, comme ceux du glyphosate ou du Mercosur en ce moment, pour pouvoir réagir.
Et à l’échelle de la Somme ?
J’aimerais vraiment que les JA puissent se réapproprier les places dans les différentes instances (chambre d’agriculture, Groupama, CerFrance, FDSEA, coopératives…), dans lesquelles nous sommes sensés siéger. Nous devons être acteurs des décisions, car elles concernent notre avenir. Nous aimerions, par exemple, travailler avec Noriap, dans le cadre du projet de recrutement de Cocorette. L’œuf est un marché porteur, et pourtant, peu de jeunes se lancent. Noriap pourrait nous donner des outils pour pouvoir les divulguer sur notre réseau. Nous devons poursuivre notre implication dans l’accompagnement des projets, que ce soit de la vente directe, un méthaniseur ou du bio… Nous devons aussi améliorer notre communication, pour expliquer nos pratiques aux citoyens, et pour relayer nos actions auprès de nos adhérents. Les agriculteurs sont de moins en moins impliqués. Difficile de faire sortir les gens de leur exploitation pour aller manifester. C’est inquiétant, parce qu’on doit pouvoir se faire entendre. Les remotiver est un défi.
Cette communication doit-elle être parfois provocatrice ?
Il faut secouer les gens pour avoir un effet ! Pour annoncer notre AG, nous avions effectivement fait une affiche qui mettait en scène des cochons et des légumes à la place des députés de l’Assemblée nationale. On pensait qu’en secouant les politiques, ils viendraient nous voir. Plusieurs d’entre eux ont envoyé des mails de mécontentement, alors on a diffusé une vidéo, avec ce sujet «Faut-il coucher pour réussir ?», en réponse. Nous disons tout haut qu’on existe, pour qu’on ne nous oublie pas.
L’exploitation familiale, en bref
- Edouard sera installé en Gaec au 1er avril, avec ses parents, à Cayeux-sur-Mer
- Exploitation de polyculture-élevage
- 210 hectares
- 80 vaches laitières
- Vaches allaitantes et atelier de taurillons
- Elevage porcin