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Pommes de terre
Fesneau reconnait un risque de «désengagement» des producteurs de fécule

Le 27 octobre 2022, le sénateur (LR) de la Somme Laurent Somon avait adressé une question écrite au ministre de l’Agriculture Marc Fesneau sur la situation de la filière fécule ; lequel lui a répondu le 12 janvier dernier.

Concurrence d’autres cultures plus rentables, sécheresse en 2022, hausse des coûts des intrants…  Face à ces faits, les producteurs sont de plus en plus nombreux à se détourner de la fécule.
Concurrence d’autres cultures plus rentables, sécheresse en 2022, hausse des coûts des intrants… Face à ces faits, les producteurs sont de plus en plus nombreux à se détourner de la fécule.
© Stéphane Leitenberger

On pourrait résumer la question adressée par le sénateur de la Somme Laurent Somon à Marc Fesneau par «Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour sauver la filière fécule de pommes de terre en France ?» Dans une question écrite formulée le 27 octobre dernier, l’élu de la Somme qui avait participé quelques semaines plus tôt à une rencontre dédiée relate l’état des lieux de la filière fécule et les inquiétudes que les acteurs de la filière ont partagé avec lui : 200 000 t produites annuellement, un million de tonnes de pommes de terre transformées, un amidon de grande qualité, deux usines performantes – dont une à Vecquemont –, des efforts de recherche, mais aussi une «grave crise conjoncturelle qui se traduit par une baisse rapide des engagements des agriculteurs.» 

 

Peu de réponses du ministre

Sur le constat, Marc Fesneau semble partager : «Face aux difficultés, les producteurs tendent à se désengager des contrats passés avec les transformateurs et à abandonner cette culture dans leurs assolements, d’autant plus que les prix actuellement élevés des céréales et oléagineux constituent une concurrence forte dans les choix d’assolement faits par les agriculteurs», écrit-il. 

Les réponses apportées aux attentes, quant à elles, apparaissent moins nombreuses, et peu satisfaisantes aux yeux de l’interprofession, d’où un appel de cette dernière au chef de l’État (lire ci-dessous). 

Dans sa réponse au parlementaire de la Somme, Marc Fesneau revient sur le maintien dans le plan stratégique national (PSN) pour la programmation de la Pac 2024-2027 de l’aide couplée de 80 € par hectare, «avec une enveloppe et un montant moyen à l’hectare inchangés pour assurer un soutien à la filière pour les campagnes à venir». Mais pour la filière, le compte n’y est pas. La raison ? La concurrence avec d’autres cultures jugées plus rentables, mais aussi l’effet de la sécheresse (2022) et une forte hausse des intrants. Pour faire face à ces difficultés, le ministre Fesneau rappelle que des solutions existent. Exemple ? Il affirme ainsi que «les producteurs de pommes de terre féculières peuvent bénéficier des soutiens mis en place par l’État». De quoi s’agit-il ? D’abord, de la mise en place d’un dégrèvement «d’office» de la taxe sur le foncier non bâti, le report d’échéances ou la prise en charge de cotisations sociales. Le locataire de la Rue de Varenne évoque ensuite le plan de résilience économique et sociale «avec notamment la prolongation du dispositif de prêts garantis de l’État (…) et le guichet d’aide au paiement des factures d’électricité et de gaz qui bénéficie aux industries féculières et qui pourra être cumulé avec l’amortisseur électricité.» 

 

Aide à la compétitivité

En ce qui concerne l’augmentation du montant de l’aide couplée à l’hectare, comme le demandent les producteurs, la réponse est en revanche négative : «En l’état des arbitrages rendus sur le plan stratégique national, dans un contexte d’enveloppes fermées pour l’ensemble des aides couplées et de compétition entre les filières pour en bénéficier, il n’est pas possible de donner une suite favorable à une demande d’augmentation de l’aide couplée fécule», prévient ainsi Marc Fesneau. 

La seule solution valable aux yeux du ministre de l’Agriculture semble être de faire porter à la filière fécule un programme opérationnel (PO), à la condition préalable que la filière se structure en organisations de producteurs (OP). Mais là encore, l’affaire semble rude et sans effet immédiat si l’on tient compte des délais nécessaires à la constitution et à la reconnaissance d’OP. Alors que les acteurs de la filière fécule réunis au sein du GIPT craignent pour la survie des deux féculeries françaises, le gouvernement rappelle, non sans un certain cynisme, que «l’État peut aussi intervenir de façon efficiente en accompagnant les industriels du secteur dans leurs projets d’investissement via France 2030 (sic), afin d’aider les industriels à dégager de nouveaux gains de compétitivité ou à conquérir de nouveaux marchés, et les pousser ainsi à augmenter le prix payé aux producteurs». 

Le GIPT en appelle à Emmanuel Macron

Dans une lettre adressée au président de la République Emmanuel Macron le 18 janvier, le président du GIPT, Arnaud Delacour, a demandé que soit annoncé un système d’aides exceptionnelles aux planteurs évalué à 500 €/ha de pommes de terre féculières, soit une enveloppe globale de 8 à 9 M€ par an pour les années 2023 et 2024. La demande n'est pas nouvelle, mais elle n'a pas reçu jusqu'ici de réponse favorable du ministère de l'Agriculture. «Fortement perturbée» depuis deux ans, la filière féculière est «moins attractive» pour les agriculteurs et ce, «malgré les hausses des prix de contrats annoncées par Roquette frères et Tereos pour cette campagne et celle à venir», estime Arnaud Delacour. En 2021, 23 055 ha de terres étaient consacrés à cette culture et 20 270 ha en 2022. «Nous anticipons 17 000 ha en 2023 et les dénonciations actuelles de contrats pourraient annoncer moins de 15 500 ha plantés en avril 2024», prévient-il. Une «baisse drastique», qui ne permettra pas d’alimenter les «deux dernières féculeries françaises», selon le GIPT, qui pointe un risque de fermeture réel. Parallèlement, «la balance commerciale actuelle de la filière féculière est fortement positive : + 70 % de la production de fécule française est exportée», rappelle le président du GIPT. 
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