Gaec des Normandes : une ferme de référence en lait
Installé en Gaec avec ses parents en 1995, puis avec son frère en 2005, Stéphane Leullier a parié sur la race Normande.
«On peut toujours mieux faire. Si, en général, ce sont dans les périodes de crise que l’on s’améliore le plus, moi, je suis toujours en recherche de la perfection pour notre élevage de Normandes», explique d’emblée Stéphane Leullier. Sa ferme fait partie des référentes en lait, tant en termes de production que de qualité de lait. Pourtant, ce n’était pas gagné d’entrée de jeu avec cette race qui produit moins de lait que les autres races spécialisées. Mais c’est pourtant celle-ci qu’il a retenue pour son élevage, et c’est tout sauf le fruit du hasard.
«C’est une race qui présente une valeur ajoutée supérieure à d’autres races spécialisées, parce qu’elle est plus riche en matières grasses et protéiques et à plus de poids carcasse, soit 400 kg en moyenne. Certes, derrière, il y a plus de travail puisqu’elle produit moins de lait et qu’il faut plus de bêtes, ce qui implique plus de bâtiments. Mais, avec les matières grasses et protéiques obtenues, on gagne 40 à 50 € de plus pour 1 000 litres de lait produits. Et avec le poids carcasse, on est payé autour de 3,30 € le kilo et 3,50 € le kilo pour les taurillons dont le poids moyen est de 450 kg», explique l’éleveur.
Gagner en temps et qualité
Chez les Leullier, l’organisation du travail est réglée comme une partition de musique. A Stéphane, l’alimentation, la génétique et la gestion. Au frère, Sébastien, la traite et la conduite du troupeau laitier. Dès potron-minet, chacun sait exactement ce qu’il doit faire. Pour gagner du temps, leur choix s’est porté sur la traite robotisée. Autre choix stratégique : des bâtiments fonctionnels. D’abord, le bâtiment principal des vaches avec des logettes paillées et raclées automatiquement, puis d’autres lots en aire paillée, et une nurserie récente avec un distributeur automatique de lait, un distributeur automatique de concentrés et une gaine de ventilation. «Gagner du temps, c’est la base de la future laitière, dit Stéphane Leullier. Il faut donc être attentif pour pouvoir faire le meilleur vêlage possible.»
Côté qualité du lait, les objectifs sont, là aussi, clairement définis : être en dessous de 300 000 cellules et, pour les butyriques, en dessous de 1 000 spores. Pour y parvenir, point de secret. «Il faut virer les vaches à cellules et, pour les butyriques, un gros travail d’hygiène doit être fourni dès la conception du silo, mais aussi sur la propreté des logettes, des vaches et du robot», relève Stéphane Leullier. Un choix qui paie, puisque sa coopérative donne 1 € de plus pour 1 000 litres de lait quand les spores sont en dessous de 1 000. Au-dessus, le couperet tombe : sur la paie de l’éleveur, ce sont trois euros par 1 000 litres qui sont retirés si les spores sont entre 1 000 et 2 000. Avec moins de 30 000 germes, moins de 250 000 cellules et moins de 1 000 spores butyriques, l’éleveur a droit à la prime super qualité, soit 6 € de plus pour chaque 1 000 litres.
Alimentation et génétique
L’alimentation joue aussi son rôle dans la qualité du lait. Outre la recherche de qualité, l’objectif est d’avoir le maximum de lait avec la ration de base. Pour ce faire, la ration hivernale se compose de 35 kg de maïs, de 2 kg d’enrubannage de luzerne, de 500 gr de paille, de 1,5 kg de pulpes sèches («avec les pulpes surpressées, on a noté qu’on montait en butyriques», dit-il), de concentrés et d’un correcteur azoté. Tous les fourrages sont produits sur place. L’été, les vaches vont en pâture.
Outre l’alimentation, un travail est aussi fait sur la génétique. «Le but est, là encore, d’augmenter le potentiel des vaches», ajoute-t-il. Des transportations embryonnaires sont réalisées sur les génisses. Les embryons récupérés sont reposés sur des receveuses, «ce qui permet un gain génétique puisqu’on collecte les meilleures vaches», indique-t-il. Cette manipulation génétique est faite en contrat avec une entreprise de sélection. L’intérêt ? Pour un coût moyen de collecte de sept à huit embryons, l’éleveur sort de sa poche autour de 1 100 €. Mais si les embryons sont viables, l’entreprise de sélection lui reverse 700 €. Et l’entreprise s’engage à prendre un mâle. «Quand un mâle est retenu, on gagne 1 500 €. Si tel n’est pas le cas, on récupère 150 €. Ensuite, soit on le garde, soit on le revend», relève Stéphane Leullier. Rien ne se perd.
Au final, pour avoir la meilleure marge brute, deux paramètres comptent : les coûts de production et le produit (lait et viande). D’où le choix de la race Normande, mais aussi une efficacité recherchée sur les rations alimentaires, les productions fourragères et l’usage des intrants et produits phytosanitaires. A ce sujet, «depuis plus de vingt ans, on met plus d’engrais de fond», indique l’éleveur. Autre poste, mais plus difficile à gérer : les frais vétérinaires. «Nous avons fait le choix du préventif plutôt que de jouer les pompiers. Traduction : on vaccine toutes les vaches pour les maladies néo-natales et les veaux contre les problèmes respiratoires», commente l’éleveur. La boucle est bouclée.